Douzième chapitre : Léony

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Deux ans après le décès de Steven, et avant le retour de Mickaël à Glasgow, je suis devenue arrière-grand-mère. Véra et Jimmy m'ont fait le cadeau d'une petite Léony. Cette nouvelle naissance m'a, comme la venue de Véra avec le décès de ma mère, apporté bien du réconfort. J'adore cette petite. Elle est pleine de vie, comme tous les enfants. Elle ne manque jamais de me faire un beau dessin, je les garde tous très précieusement. Véra et Jimmy viennent au moins une fois dans l'été avec elle, pour quelques jours de vacances, et puis, je la vois aussi au printemps et à Noël. Parfois, ils viennent pour un week-end, même si ça fait un peu de route. Il m'arrive encore souvent de prendre le train qui me permet d'aller directement à Glasgow. Avec l'âge, cependant, je vais moins voyager. J'ai de la chance, toutefois, car toute ma petite famille ne vit pas trop loin de moi. En deux heures, les enfants peuvent être là. Et, depuis qu'il est revenu à Glasgow, Mickaël n'hésite jamais à faire le trajet.

Avec l'arrivée de Léony, Ingrid a aussi décidé de travailler moins. Elle garde la pitchoune l'après-midi. Je ne sais pas si elle aura des frères et sœurs, Véra ne semble pas forcément vouloir fonder une grande famille. Quant à Mickaël, il a bien le temps d'y penser...

Peu après son retour à Glasgow, il a rencontré Betty. Il me l'a présentée assez vite. Il en est très amoureux. C'est une jeune femme bien élevée, gentille, mais d'un caractère un peu spécial. Je m'entends cependant bien avec elle, et elle ne rechigne pas à venir jusqu'à Fort William quand Mickaël le propose. Je perçois cependant que leur relation n'est pas tous les jours facile. Si, avec moi, elle se montre toujours agréable, un jour, Ingrid me confie cependant qu'elle devient inquiète : le dimanche précédent, Mickaël était passé les voir, il semblait très énervé, agacé. Il a fini par avouer à sa mère qu'il commençait à en avoir assez de devoir toujours tout justifier... Betty lui aurait fait une scène pas possible parce qu'une nuit, il était rentré tard du restaurant. Mais il ne sait jamais à quelle heure exactement il va finir, il arrive qu'un service se prolonge, et cela avait été le cas. Cette histoire m'a un peu inquiétée moi aussi, et quand je les ai revus, à Glasgow, au printemps, j'ai bien senti qu'il y avait "de l'eau dans le gaz". Betty était assez fermée, silencieuse. Ils ne se sont pas attardés, alors que d'habitude, Mickaël aime bien rester dîner chez ses parents quand je suis là.

L'été suivant, il est venu seul à Fort William, pour toutes ses vacances. C'était fini avec Betty. Après presque deux ans de vie commune, il avait mis fin à leur relation. Il ne s'est pas vraiment confié sur leur rupture, il m'a juste dit que cela avait été assez pénible, mais il n'en pouvait plus et il ne se sentait plus amoureux. Il m'a simplement dit : "Elle a tout gâché avec sa jalousie maladive."

Je ne peux pas dire qu'il avait le moral dans les chaussettes, comme après sa rupture avec Lilou, mais j'ai bien senti qu'il avait besoin de se faire chouchouter. J'ai ressorti mes livres de recettes, on a cuisiné ensemble, nous avons passé aussi du temps au jardin. Puis il est parti en balade, sur les Hébrides, pour revenir passer ses derniers jours avec moi. Il est reparti, gonflé à bloc, pour Glasgow.

Mais si les choses semblaient s'arranger pour Mickaël, de son côté, mon "petit-fils d'adoption" partait en vrac.

**

Je vous ai déjà parlé de Jenn, vous disant qu'elle et Sam s'entendaient bien. Depuis deux ans, ils sortaient ensemble, ils avaient franchi le pas un peu avant que Mickaël ne rencontre Betty. Jenn pensait s'installer à Glasgow, lorsque sa mère est tombée malade. Elle est atteinte d'une leucémie. Très vite, son état de son santé s'est détérioré et Jenn a fait le choix de revenir sur Fort William, pour s'occuper d'elle et soulager un peu son père. Sam a eu beaucoup de mal à accepter cette décision, et il a rompu. D'après Mickaël avec qui j'ai eu l'occasion d'en parler, la maladie d'Helen le renvoie au souvenir de sa mère. Jenn a beaucoup souffert de l'attitude de Sam, de son incompréhension. Je ne sais pas ce que ça va donner, entre ces deux-là, mais je pense que Sam a fait un mauvais choix. Acceptera-t-il de revenir en arrière, je l'ignore...

Je trouve en tout cas que les jeunes n'ont pas forcément la vie plus facile que nous. D'un point de vue matériel, les choses n'ont plus rien à voir avec ma propre jeunesse. Mais pour ce qui est des relations... Oh certes, les mariages d'amour n'étaient pas forcément la majorité, quand j'étais jeune. L'intérêt, le rang social, les biens, cela jouait beaucoup dans la balance et bien des couples se sont mariés sans amour. Quand Steven disait que nous avions eu de la chance, c'est vrai. Nous nous sommes aimés, et durablement. Aujourd'hui, on peut plus facilement mettre fin à une relation, mais parfois, un peu vite, enfin, je trouve. Et puis, la situation économique n'aide pas. Quand on cherche du travail, on est parfois obligé de quitter sa ville, sa région, sa famille. Quand son conjoint ou sa conjointe travaille, et parfois, quand il y a des enfants, il faut faire un choix difficile. De mon temps, la femme suivait son mari. Comme moi j'avais suivi Steven, comme Jeanne est venue vivre avec Eric. Les femmes travaillaient avec leur mari, que ce soit dans les fermes, dans les petits commerces, ou même à l'usine. Aujourd'hui, c'est plus rare, et cela rend les choses parfois plus compliquées. Par contre, les femmes ont gagné leur indépendance : elles ne dépendent plus de leur mari pour vivre. Et cela, c'est une liberté inestimable.

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