Chapitre 15

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Elle ne répondait pas, occupée à regarder mon torse. Je n'avais enfilé qu’un bas de jogging.


— La vue te plait ? l’interrogeais-je.

— Comment tu peux être aussi bien foutu mais aussi con ? demanda-t-elle en me détaillant.


Victoria se redressa soudain lorsqu'elle se rendit compte de son comportement. Elle détourna les yeux gênée.

— Que fais-tu ici ? repris-je.

— Je n’ai pas envie de dormir.

— Tant pis pour toi.

— S’il te plaît, et si on se prenait un tout petit dernier verre ?

— Non, tu as assez bu.

— Quel rabat-joie.

— Dit la reine. Tu me remercieras demain. Allons, retourne te coucher.


Elle se leva mais retomba sur le lit, ce qui la fit éclater de rire.


— J’ai peut-être trop bu en effet.

— Tu crois ? répondis-je amusé.

— Tu m’aides ?


Je me penchai vers elle, cette dernière passa ses bras autour de ma nuque pendant que je la tenais sous les genoux.


— Je n’aurais jamais cru être portée comme une princesse.

— Profite, c’est la dernière fois.

— Tu ne pues plus le vomi, c’est agréable. Tu sens presque bon.

— Je ne sais pas si je dois prendre ça comme un compliment.

— Je ne sais pas. J’ai dit quoi déjà ?

— Soit tu as trop bu, soit tu ne tiens vraiment pas l’alcool, rigolais-je devant son air concentré.

— Waouh, mais tu as des bras énormes quand tu les contractes, cria-t-elle.

— Bordel Victoria, tais-toi, Nathan et Liam dorment à côté.

— C’est vrai ? Je veux aller les voir.

— Non.

— S’il te plaît.

— Pourquoi ?

— Je crois que c’est moi qui ai le pouce de Nathan, chuchota-t-elle.

— Ne t’en fais pas, je suis sûr que tu pourras le lui rendre demain.


J’aimais bien la Victoria bourrée. Je la trouvais particulièrement amusante. Dommage qu’elle ne soit pas toujours comme ça. Je la rallongeai de nouveau sur le canapé avant de disposer le plaid qu’elle laissait sans arrêt traîner, à ma plus grande exaspération. Mais bon, pour une fois son désordre était utile.

Je m’assis dans le fauteuil en face d’elle. Nous restâmes à nous regarder dans la pénombre.


— Quoi ? lui demandai-je.

— J’ai envie de vomir.

— Encore ? Bouge pas, je vais chercher une bassine et, par pitié, ne salis pas mon canapé.


Je me précipitai dans la buanderie et attrapai une bassine avant de lui apporter. J’eus à peine le temps de la lui tendre qu’elle recommença à être malade. Je lui tins les cheveux, un brin dégoûté.


— Je n’aurais clairement pas dû boire autant.


Lorsqu’elle se calma, je retournai dans la salle de bain afin de nettoyer la bassine. Cela fait, je me dirigeai vers le salon où je retrouvai Victoria endormie. Je m’assis sur l’accoudoir en la regardant. Je déplaçai doucement une mèche de cheveux qui lui cachait le visage. J’avais du mal à croire que demain, je serais fiancé avec elle. Je me rendis compte qu’en moins de deux semaines, ma vie avait complètement basculé. Je m’assis dans mon fauteuil mais mes pensées n’arrêtèrent pas de se bousculer. Malgré tout, je finis par m’endormir, la fatigue l’emportant sur mes préoccupations.


Je me réveillai en entendant du bruit. Une raideur dans le dos me fit réaliser que j’avais passé la nuit assis dans le fauteuil. Je jetai un coup d’œil où Victoria dormait paisiblement, puis je me levai discrètement pour ne pas la réveiller.

Je me dirigeai vers la source du bruit et vis Liam préparer le petit déjeuner. Ça ne me surprenait pas de voir à quel point il connaissait bien ma maison. Nous passions tous tellement de temps les uns chez les autres.


— Prêt, l’heureux fiancé ?

— Pourquoi me rappelles-tu ça dès le matin ? Je t’ai fait quelque chose ? Tu me hais, c’est ça ?

— Non, mais c’est assez amusant de savoir qu’un des plus gros dragueurs de notre bande d’amis se fiance.

— Sauf quand c’est toi qui es concerné. Tu prépares quoi ?

— Des gaufres. Victoria m’avait dit qu’elle adorait ça, vu la gueule de bois et la journée qui l’attend, je me suis dit que ça lui ferait plaisir.

— Quand est-ce que vous avez parlé ensemble ?

— Hier soir, surgit la voix de Victoria. Mais je crois qu’à ce moment-là, ta langue était en train de nettoyer les amygdales de cette fille. Merci, Liam.


Victoria attrapa une des gaufres avant de s’asseoir à côté de moi. Je la détaillai rapidement. Comme chaque matin ses cheveux ne ressemblaient à rien, du maquillage de la veille avait coulé sur son visage, principalement sous ses yeux. Elle faisait presque peur.


— Ça va, ta tête ? demanda Liam.

— Tant que je ne fais pas de mouvement brusque ou qu’il n’y a pas de bruit trop fort, ça va.


Je laissai tomber ma cuillère. Je n’avais pas oublié qu’elle m’avait bousillé une tenue entière de créateur à boire autant.


— Oups, répondis-je devant son regard tueur.


Liam lui tendit un verre de jus d’orange et un cachet d’aspirine.


— Tiens, j’ai préparé ça aussi, je me suis dit que tu en aurais besoin.


Elle le remercia et s’empressa de le prendre. Cette scène m’agaça au plus au point. Pourquoi mon ami était gentil avec elle ? Surtout aujourd’hui. Mais la question qui me perturbait le plus était : Quand étaient-ils devenus amis ? Je ne comprenais pas ce rapprochement aussi soudain.

Je croquai furieusement dans ma gaufre lorsque Nathan apparut. Lui était encore pire que Victoria. Cette dernière avait presque l’air en forme comparé à lui. Il s’assit lourdement sur la chaise en face de moi avant de se plaindre de la luminosité de la pièce. Je diminuai la puissance de l’ampoule à partir d’une application sur mon téléphone pour qu’il se sente un peu mieux.


— Tu as retrouvé ton pouce ? rigola Liam.

— Quoi ?

— Laisse tomber. T’as vraiment abusé hier mec, rigolais-je. Comme une autre. D’ailleurs, tu me dois une nouvelle tenue Victoria.

— Comment ça ?

— Tu m’as vomi dessus, j’ai été obligé de tout jeter.

— Tu n’avais qu’à les laver, je t’ai sali, je ne les ai pas mis en pièces.

— C’est presque pareil.

— Non, je veux bien payer le pressing mais c’est tout.

— Oh pitié, fermez-la, supplia Nathan en se tenant la tête.


Liam lui tendit un cachet et un verre de jus de fruit comme pour Victoria.


— C’est à quelle heure qu’on doit aller à la soirée organisée par nos parents ? demanda Victoria.

— Vingt heures, mais il faut qu’on aille chercher nos tenues à dix heures.

— Il faut qu’on aille se préparer alors, me répondit-elle en regardant son portable.

— Fais ce que tu veux.

— Tu vas pas commencer Thomas.

— Je ne commence pas, je continue.

— Tu es vraiment soulant dès le matin. Attends-moi avant de partir, on ira ensemble, ça ne sert à rien de prendre deux voitures, rétorqua cette dernière en sortant de table.

— Pourquoi te comportes-tu comme un vrai con ? me demanda Liam, tu étais super sympa hier soir avec elle. Je t’ai même entendu rire.

— Ce n’est pas parce que j’ai été gentil une fois avec elle, que j’ai ri, que c’est bon, nous sommes devenus les meilleurs amis du monde. Pour ma défense, la Victoria bourrée et la sobre sont complètement différentes. Maintenant je vais me préparer parce qu’aujourd’hui j’annonce mes fiançailles, donc à moins que tu souhaites encore prendre la défense de ta nouvelle amie, on se voit à la soirée.


Je quittai la table sans lui laisser le temps de répondre. Ils étaient ici comme chez eux, ça leur arrivait même de squatter chez moi quand je n’étais pas là. Ils ne seraient pas dépaysés si je ne restais pas.

Je me dirigeai vers ma chambre, ressentant une tension inconfortable dans l'air. Peut-être avais-je été un peu trop abrupt, mais cette situation me dépassait. Victoria et Liam semblaient si bien s'entendre, cela me perturbait. Pourquoi cette soudaine complicité ? Et pourquoi étais-je le seul à ne pas en faire partie ?

Je pris une douche rapide pour me rafraîchir, essayant de chasser ces pensées de ma tête. Mais elles persistaient, comme un nuage sombre qui refusait de se dissiper. En m'habillant, je repensai à la soirée qui m'attendait. Annoncer mes fiançailles devant nos parents et nos amis, c'était un événement que je n'aurais jamais imaginé vivre. Surtout avec Victoria. Mais le destin en avait décidé autrement.

Lorsque je fus prêt, je me dirigeai dans le salon. Liam et Nathan squattaient mon canapé.


— Vous comptez vivre ici ?

— Pourquoi pas, c’est pas mal ici, je trouve.

— Moi j’aimerais aller sous la douche avant, en plus, je n’ai pas ma voiture, rétorqua Nathan. D’ailleurs, il s’est passé quoi hier ?


Liam et moi nous regardâmes longuement avant d’éclater de rire.


— Tu cherchais ton pouce, essaya d’expliquer Liam en rigolant. Tu en as pleuré et tu as failli faire fuir presque tous ceux qui nous entouraient.

— Victoria nous a fait un strip-tease, ce qui a eu pour effet d’exciter tous ceux qui étaient restés. Avant de me confier qu’elle avait ton pouce. Oh, et elle m’a vomi dessus, continuai-je.


Nathan hocha lentement la tête, essayant sans doute de se souvenir.

Victoria fut enfin prête. Liam et Nathan me prévinrent qu’ils allaient prendre une douche avant de partir et que nous nous retrouverions ce soir.

Victoria me suivit, tandis que nous nous dirigions vers le garage.


— On prend ma voiture, me questionna Victoria.

— Elle est restée sur le parking du club, comment veux-tu faire ?


Au même moment, les lumières s'allumèrent doucement dans le garage, révélant une rangée de voitures scintillantes.


— Elles ne sont pas là que pour la déco, tu sais.


Je repérai rapidement la clé de ma Lamborghini rouge, une de mes préférées. Je pressai le bouton et le vrombissement du moteur résonna dans le garage, emplissant l'air d'une symphonie mécanique.

Victoria me lança un regard narquois tandis que nous nous dirigions vers la voiture. Elle semblait presque amusée par ma préférence pour les voitures de luxe.


— Pourquoi ne veux-tu pas de ma voiture ? Les tiennes sont vraiment… « m’as-tu vu ».

— Parce que si on prend la tienne, c’est toi qui conduis et je ne veux pas, répliquai-je.

— Pourquoi ?

— Parce qu'un escargot va plus vite que toi. Sans parler de la tonne d’alcool que tu as ingurgitée hier. Je suis sûr que tu en as toujours plus qu’autorisé dans le corps.

— Je respecte simplement le code de la route et je suis parfaitement sobre.

— Moi aussi. Bref, suis-moi.


Je m'installai derrière le volant, savourant le contact du cuir luxueux sous mes doigts. Victoria se plaça à côté de moi. Je démarrai la voiture, cette dernière fit un grondement rauque et nous sortîmes du garage pour nous diriger chez la styliste afin de récupérer nos tenues.

J’ouvris les fenêtres pour profiter pleinement. Je ne la sortais que très rarement. J’étais habitué à ma voiture et je ne pensais pas forcément à la changer. En plus, toutes mes affaires se trouvaient dedans et je n’avais pas envie de tout déplacer à chaque fois.

Lorsque je m’engageai sur l’autoroute, mon pied avait l’accélérateur facile. Je sentis Victoria se crisper à côté de moi en regardant le compteur de ma vitesse augmenter.


— Tu es au-dessus de la limite autorisée sur l’autoroute, Thomas.

— Je sais.

— Tu devrais ralentir.

— Ce genre de voiture est faite pour rouler vite. Ne t’inquiète pas, je maîtrise.

— Thomas, si nous avons un accident par ta faute je t’assure que ça va mal finir.

— Détends-toi, Victoria, où est passée celle qui a dansé sur les tables ?

— J’ai fait quoi ?

— Tu ne te souviens plus ?

— Tout est un peu confus.

— Pourquoi tu n’as rien demandé alors ?

— J’ai pas osé. J’ai eu peur de vos réponses.

— Tu veux savoir ?

— Non, pas vraiment.

— Comme tu le souhaites, Miss Parfaite.


Victoria soupira. Je continuai d’accélérer, le vrombissement du moteur me poussant à toujours dépasser les limites. Malheureusement, toute bonne chose a une fin et nous sortîmes de l’autoroute pour rentrer dans une petite ville.


Nous arrivâmes devant l'atelier de la styliste où nos tenues nous attendaient. Je garai la voiture devant le bâtiment et coupai le moteur, laissant le calme revenir dans l'habitacle.

Victoria semblait soulagée de sortir de l’habitacle après notre trajet mouvementé sur l'autoroute. Elle s'étira légèrement avant de descendre, ajustant sa tenue.


— Enfin arrivés, soupira-t-elle soulagée.


Nous entrâmes dans l'atelier où la styliste nous attendait avec nos tenues.


— Bonjour, dit la styliste avec un sourire chaleureux. Voici votre robe, Victoria. J'espère qu'elle vous plaira


Victoria récupéra aussitôt sa robe rose pale, visiblement impatiente. Elle l'examina avec attention, un sourire se dessinant sur ses lèvres.


— Elle est parfaite, merci beaucoup, répondit-elle avec enthousiasme.


La styliste se tourna ensuite vers moi, me tendant un costume impeccablement taillé.


— Et voici votre costume, Monsieur. J'ai pris en compte toutes vos préférences.

Je pris le costume noir et l'observai appréciant la qualité du tissu et la coupe ajustée.


— Merci, c'est parfait, dis-je.


Nous sortîmes de l'atelier, nos tenues en main, prêts pour la soirée qui nous attendait. Je déverrouillai la voiture et nous montâmes à bord, prêts à rentrer pour nous préparer.


— Tu es sûr de vouloir conduire ? demanda Victoria avec une pointe d'inquiétude dans la voix.

— Ne t'en fais pas, je vais ralentir cette fois.


Alors que j’allumai le moteur, la radio nous informa d’un bouchon provoqué par un accident.

Victoria se tourna vers moi.


— Il y a les routes secondaires, m’informa-t-elle.

— On ne risque pas d’arriver en retard ?

— Il n’y a qu’une demie heure de plus.

— Alors faisons ça.


Nous reprîmes la route. Une fois sortis de la ville et arrivés dans les chemin de campagne, je recommençai à accélérer. C’était encore mieux que sur l’autoroute, ici il n’y avait personne.


— Thomas, ralentis, si on a un accident ici, on sera très mal.

— Mais détends-toi un peu, rétorquai-je en accélérant encore.


Je roulais à vive allure, les lignes blanches de la route défilant sous les pneus de ma Lamborghini. Victoria marmonnait quelque chose à côté de moi, mais j'étais trop absorbé par le calme du paysage qui s'étendait autour de nous pour l'entendre. Les champs verdoyants et les arbres majestueux formaient un tableau paisible, contrastant avec la puissance brute de la voiture rugissante sous nos pieds.

Soudain, une ombre surgi de nulle part. Une silhouette élancée traversa la route avec une agilité effrayante. Je tournai brusquement le volant pour l'éviter, mais ce fut trop tard. Surgissant de l'obscurité, la biche percuta le flanc de la voiture avec un bruit sourd et un impact violent.

La Lamborghini dérapa. Les pneus crissaient sur l'asphalte alors que nous quittions la route emportés par l'élan. La voiture effectua plusieurs tonneaux et se renversa sur le toit avant de s'immobiliser dans un nuage de poussière et de débris.

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