Chapitre 18

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— Salut mon vieux, surgit la voix de Liam. Salut Vic.

Nous le saluâmes en retour avec Victoria et saluâmes aussi Alex, Nate et Nathan. Tous étaient venus assister à notre galère comme ils l’avaient dit.

— Je ne comprends vraiment pas le principe de ce genre de bal, on fait tout sauf danser.

— Comme si ça pouvait t’ennuyer de ne pas danser. Tu détestes ça, Nathan, rigolai-je.

— Je sais, mais on n’appelle pas ça un bal alors. C’est plus une réception ou un cocktail.

— Je ne lui donne pas tort sur ce coup, reprit Victoria.

— Ils ont dit que c’était un bal parce qu’après il y aura un truc où les couples devront danser et chaque danse rapportera de l’argent ou un truc du style, reprit Liam.

Nous le regardâmes tous avec de grands yeux. Même Victoria ne semblait pas au courant. Liam nous regarda exaspérer.

— Il vous arrive de lire les programmes qui sont affichés dans l’entrée ?

— Parce qu’il y a des programmes ? demandâmes-nous en chœur.

— Mais quelle bande de… il n’y a pas de mots pour vous décrire. Vous êtes fatigants. Je n’en reviens pas que même toi, Victoria, tu ne les lises pas.

— J’avoue, Miss Parfaite qui n’est pas si parfaite, c’est choquant, je vais être traumatisé.

— Ferme-la, Thomas, reprit en rigolant Victoria.

Nous continuâmes de discuter tout en rigolant, bien que j’eusse du mal à me concentrer sur la discussion. Mon esprit n’arrêtait pas de divaguer. Je savais bien que mes amis et Victoria l’avaient remarqué mais ils faisaient comme si de rien et je leur en étais reconnaissant. Je n’avais pas envie de répondre à des questions.

La soirée semblait s'éterniser, chaque minute pesant sur mes épaules comme un fardeau insupportable. Je sentais la tension dans l'air, les regards curieux et les murmures étouffés qui accompagnaient notre présence. Ils savaient tous que nos parents allaient annoncer une grande nouvelle et ils avaient tous très bien deviné que cela nous concernait. Victoria et moi ne nous étions quasiment pas quittés de la soirée. Nous étions le centre de l'attention, un couple parfait sur le papier mais dans la réalité, c’était un autre sujet.

Enfin, après une éternité, le moment fatidique approcha. Mon père prit la parole devant tous les invités, annonçant avec un sourire triomphant nos prétendues fiançailles. Les applaudissements retentirent dans la salle, mais je ne les entendais pas. Mon père enroula un bras autour de mes épaules, comme si notre relation se voulait fusionnelle. Ce qui intérieurement me fit pouffer de rire. Quel cirque et dire que tous ces idiots y croient. Comment font-ils pour être les plus grandes puissances d’Europe, voire du monde pour certains, en étant aussi naïfs ? Victoria me lança un regard qui mêlait surprise et appréhension, mais je lui adressai un sourire forcé en retour. C'est ce qu'elle attendait de moi, ce que tout le monde attendait de moi.

Nous échangeâmes de nombreuses poignées de mains. Beaucoup nous félicitèrent aussi, ou nous demandèrent quand serait le mariage. Ils avaient tous l’air très heureux pour nous. Seulement, contrairement à eux, je voyais bien que ce n’était qu’une façade. Notre alliance faisait de nous des entreprises quasiment intouchables et ils le savaient très bien, ce qui devait profondément les énerver.

— Je reviens, je dois aller au petit coin, me chuchota Victoria à l’oreille.

J’acquiesçai et la regardai s’en aller, quand un vieux couple quinquagénaire dont j’avais oublié le nom vint m’aborder pour d’énièmes fausses félicitations. Bien qu’étrangement, j’eu l’impression que celles-ci semblaient vraies. L’homme commença à me parler de tout et de rien, usant du peu de patience que j’avais. C’est Victoria qui aime ça, pas moi. D’ailleurs, cette dernière mettait du temps à revenir. Pas que je m’inquiète mais faire la conversation me fatigue.

— Veuillez m’excuser, interrompis-je l’homme, ma fiancée s’est absentée depuis un moment maintenant, j’aimerais aller voir si elle va bien.

— Oh oui, vous avez raison.

Je m’éloignai de ce couple assez satisfait d’avoir réussi à les fuir. Je me dirigeai vers les toilettes, assez surpris de voir qu’elles étaient mixtes. Au moins je saurais plus facilement si elle se trouvait dedans ou non.

— Lâche-moi, entendis-je Victoria en entrant.

Un homme lui tenait le poignet.

— Il se passe quoi ? lui demandai-je.

— Dégage, du con, tu ne vois pas qu’on s’amuse ?

— Du con ? Du con sérieusement ?

Il ne me fallut pas une seconde de plus pour m’interposer et lui mettre un coup au visage. Cela l’abasourdit tellement qu’il tituba. Je profitai de ce moment pour lui apporter un deuxième coup laissant exploser toute ma rage. Il réussit à m’envoyer un coup de genou dans le ventre ce qui lui laissa l’opportunité de m’ouvrir la lèvre. Malgré tout, je repris le dessus en envoyant mon poing une troisième fois sur son visage. Je sentis son nez craquer et il tomba au sol. Je me mis sur lui avant de le frapper encore et encore. Je n’arrivais plus à m’arrêter. Toute la haine, toute la colère, toute la frustration sortait enfin. J’entendais Victoria qui me suppliait d’arrêter mais je n’y arrivais pas. Je ne le voyais plus comme un être humain mais plus comme un défouloir.

— Bordel, Thomas, tu vas le tuer, cria Victoria.

Je stoppai mon poing en l’air, commençant à réaliser ce que j’avais fait. Je laissai retomber mon bras le long de mon corps avant de m’asseoir le long du mur. Victoria vérifia le pouls de l’homme, ferma la porte des toilettes à clé avant d’attraper du papier qu’elle humidifia et de s’asseoir à côté de moi.

— Montre ton visage.

— Fous-moi la paix.

Victoria attrapa ma mâchoire avant de la tourner vers elle sans aucune douceur. Elle appliqua le papier sur ma lèvre. Je me contentai de la regarder faire.

— Tu as l’air énervé, déclarai-je.

— Non, tu crois ?

— Pourquoi tu l’es ?

— Tu aurais pu tuer un homme.

— Aïe, pas besoin d’appuyer si fort.

— Oh, je t’ai fait mal ? J’en suis navrée, répondit-elle ironiquement en recommençant son geste. Pourquoi l’as-tu tabassé ?

Comment lui dire que je n’en sais rien moi-même ?

— Il s’en est pris à toi.

— Ne me mens pas, Thomas. Notre relation est tout sauf normale mais on ne se ment pas.

— Il m’a mal parlé, répondis-je en détournant le regard.

— Thomas…

— Je n’en sais rien, OK ?

— Tu ne sais pas pourquoi tu l’as frappé ?

— C’est bon, arrête avec tes grands airs, on n’est pas tous aussi parfaits que toi, Victoria ! m’énervai-je en me relevant. Désolé de ne pas me contenir aussi bien que toi, de ne pas être irréprochable en toute circonstance ! Barre-toi si tu n’es pas contente !

— C’est bon, tu as fini ta petite crise ? Parce que tu commences à sérieusement m’agacer avec ton « Miss Parfaite », répondit-elle en se relevant aussi. Je ne t’ai rien dit de mal, juste que tu ne peux pas frapper quelqu’un comme ça sans raison. Tu imagines les répercussions que ça peut avoir ?

— Si tu me parles de réputation, je te promets, Victoria, que je sors de cette pièce et je retourne le frapper devant tout le monde.

— Je m’en fous de la réputation, Thomas ! Je te parle de la police, de morale et de conscience ! Toutes ces choses dont tu as l’air dépourvu.

Je la regardai. Vu son visage, elle avait dû comprendre que je n’avais pas apprécié ce qu’elle avait dit.

— Désolé de te l’annoncer, repris-je avec un faux air calme, mais tu n’es pas la première que je déçois. Si tu crois que j’en ai quelque chose à foutre de ton putain d’avis, tu te mets le doigt dans l’œil.

— Qu’est-ce que t’as dit ton père ?

Je la regardai abasourdi. Où veut-elle en venir ? Pourquoi le met-elle sur le tapis ?

— Je t’ai vue lui parler. Tout allait bien jusqu’à ce moment, alors je repose ma question, qu’est-ce que ton père a pu te dire pour te mettre dans un tel état ?

— Rien. Je m’en fous de mon père, il peut crever. D’ailleurs, c’est ce qu’il devrait faire, j’aurais enfin la paix.

— Comment tu peux dire ça ? Tu devrais éviter, tu pourrais le regretter.

— Ne me dis pas ce que je peux dire ou non, Victoria ! On est fiancés, mais on ne va jamais se marier et même si, par le plus grand des malheurs, ça devait arriver, tu ne seras ma femme que sur le papier. Je ne te considérerai jamais comme plus que cette meuf insupportable que je déteste et qu’on m’a imposée !

Les yeux de Victoria se remplirent de larmes. J'avais été trop loin. Beaucoup trop loin cette fois. Je le savais et elle le savait. Pourtant, je ne bougeai pas.

— Cet après-midi, j’ai cru que tu n’étais peut-être pas un aussi gros connard que ça. Que c’était peut-être juste une façade mais je comprends que je me suis trompée. Tu es pourri jusqu’à l’os.

— Désolé de te décevoir, Miss Parfaite.

Elle secoua doucement la tête avant de jeter le papier qu’elle avait encore dans les mains. Nos regards se croisèrent une nouvelle fois à travers le miroir des toilettes avant qu’elle ne rompe le contact visuel en attrapant sa pochette et en sortant des toilettes.

Je m'approchai des lavabos avant de m'appuyer dessus. Je me lavai les mains pour enlever le sang. En me regardant dans la glace, je vis ma lèvre. Rien de très voyant. Le gars n’avait vraiment aucune force. Pas étonnant qu’il ne s’en prenne qu’aux filles. C’est pathétique.

Je retournai dans le hall. Victoria se tenait au bar, un verre à la main. Je la rejoignis et m'assis en silence à côté d'elle. Mais cette dernière fit comme si elle ne me voyait pas. Alors qu'elle allait commander son quatrième verre en moins de cinq minutes, je fis signe au barman de ne rien lui donner.

— Mêle-toi de ton cul, Thomas, et laisse-moi boire mon verre.

— Non.

— Tu me gonfles avec tes monosyllabes, avec ton comportement, avec tout en fait.

— Je sais.

— Alors laisse-moi boire.

— Non. Tu es à un bal caritatif qui est loin d’être terminé et dont tous les regards sont braqués sur nous. Bien que je me moque éperdument de ce qu’ils peuvent penser de toi comme de moi, je sais que pour toi en temps normal ça compte et puisque tu es dans cet état à cause de moi, j’estime qu’il est normal que je t’empêche de faire quoi que ce soit que tu puisses regretter demain.

— Fais pas semblant que tu t’inquiètes pour moi, Thomas, alors que tu me détestes.

— Je ne te déteste pas.

— Ah ouais ? Alors récapitulons juste ce que tu as fait aujourd’hui. Ce matin tu m’as envoyé plusieurs piques mais bon à la rigueur ça, ça peut passer. Tu as failli me tuer avec un accident de voiture parce que ça t’amusait de me contredire ou de me faire peur je ne sais pas trop. Puis tu m’as balancé, comme à ton habitude, un tas de méchancetés. Je n’appelle pas ça apprécier quelqu’un.

— Bon dit comme ça, je ne sais pas trop quoi répondre pour me défendre.

— Rien, laisse tomber. Mais tu devrais apprendre à te comporter en adulte. Moi aussi je te déteste. Je hais chaque chose que tu dégages, ton air suffisant, ton comportement, ta méchanceté, tes sautes d’humeur, tout. Mais je ne te traite pas aussi mal pour autant. Ça ne me blesse pas vraiment ce que tu dis, je trouve juste cela particulièrement frustrant.

— Alors annulons le mariage.

Elle me regarda, estomaquée par ma proposition. Moi-même je ne réalisai ce que je proposais qu’une fois que je l’avais dit.

— Non.

— Pourquoi ?

— J’ai dit à mon père que je t’épouserais pour le bien de l’entreprise et je le ferai.

— Même si tu dois être malheureuse et ne jamais connaître l’amour ?

— Oui.

— Alors on reste mariés. Mais tu arrêtes de boire, lançai-je en interceptant son nouveau verre.

Je le reposai avant de la forcer à me suivre jusqu’à l’extérieur.

— Laisse-moi tranquille, Thomas.

— C’est bon ? Tu as fini ton caprice ?

— Je ne suis pas une gamine.

— Ton comportement dit le contraire.

— Tu te crois mieux ? Monsieur je tape sans raison.

— J’ai une raison, soupirai-je.

— Laquelle ?

— Une qui ne te regarde pas. Maintenant tu as deux options : soit on rentre de nouveau dans ce hall et on affiche un stupide sourire de personnes amoureuses, soit on rentre et on se saoule jusqu’à oublier nos prénoms. Alors, tu veux quoi ?

Victoria me lança un grand sourire.

— Deuxième option. On se saoule.

— Parfait. Donne-moi tes clés, je vais conduire.

— Euh non.

— Euh si.

— Non.

— Si.

— Non.

— Si.

— On va continuer longtemps ?

— Jusqu’à ce que tu me laisses conduire.

— C’est hors de question. Tu es à moitié bourré, tu risques de nous tuer.

— Et toi, sobre, tu as failli nous tuer. Je ne suis pas sûr que ce soit mieux.

Aïe. Elle marquait un point. Cette femme m’énerve avec ses répliques.

— Tu veux qu’on fasse quoi alors ?

— Je conduis. Je ne suis pas si bourrée que ça et je reste plus prudente que toi.

— Mais bien sûr.

— Tu veux qu’on appelle les gars ?

— Ils sont partis après l’annonce de mon père.

— Si tôt ?

— Ils bossent demain et bien que ce soient des fêtards ils évitent tout de même la semaine.

— En gros ils voulaient éviter de danser, vu ?

— Ouais, répondis-je en passant ma main dans les cheveux.

— Bon bah je vais conduire alors !

Nous prîmes la route. Bien que je ne sois pas rassuré que Victoria conduise.

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