J'ouvre les yeux. Un magnifique ciel étoilé s'offre à moi ! Je me redresse et regarde aux alentours. Je me trouve dans une plaine de sable qui s'étend à l'infini ! Intriguée, je murmure :

- Où suis-je ?

- C'est une excellente question.

Je sursaute et tourne ma tête vers l'origine de cette voix, à droite. Un homme aux cheveux et à la barbe blonde se tient assis, près de moi. Une petite fille à la longue chevelure dorée, qui m'est totalement inconnue, est accroupie près de lui. Elle lui modèle des jambes à l'aide de son sable. Je le reconnais aussitôt :

- Sieg !

C'est alors que cela me revient : l'explosion de la lance foudroyante sur la charrette ! Inquiète, je regarde partout autour de moi mais ne le vois pas. Je demande donc :

- Livaï ! Où est Livaï ?

- C'est pour lui que tu t'affoles ainsi ? J'ignore où il est. Quand je me suis réveillé, il n'y avait que nous deux, ici . . . Et cette mystérieuse enfant . . .

Nos yeux bleus convergent vers cette dernière. Elle a fini de modeler les jambes de Sieg. Elle se relève, prend son seau de bois et se dirige vers moi. Elle s'agenouille à mes côtés et entreprend de combler toutes mes plaies avec ce même sable. Je demande à mon aîné :

- Qui est-elle ?

- Je ne sais pas. En revanche, elle a l'air bienveillante donc je ne pense pas qu'il y a de quoi s'inquiéter de ce côté-là. Le fait qu'elle nous soigne en est une preuve bien suffisante. Elle vient sans aucun doute de nous sauver la vie !

- Et Livaï ? Pourquoi ne pas l'avoir emmené et sauvé, lui aussi ?

- Je sais juste que tu as l'air de beaucoup tenir à lui . . . Enfin qu'importe, dit-il en souriant. Je suis actuellement très heureux ! Sais-tu pourquoi ?

Je secoue la tête, en signe de négation. Il déclare :

- Tout simplement parce que, pour la première depuis vingt-deux ans, tu daignes enfin m'adresser la parole. Seulement, pourquoi avoir attendu si longtemps ?

Je rougis, embarassée mais lui réponds :

- Je t'en veux énormément pour tout ce que tu nous a fait subir ! Tu ne peux pas savoir à quel point nous avons souffert par ta faute ! Seulement . . . Malgré tout ce que tu as fait . . . Je t'aime encore . . . Alors . . . Partagée entre ces deux sentiments . . . Je ne savais pas quoi te dire . . . J'ai donc préféré garder le silence.

- Je comprends . . .

- À toi de t'expliquer, maintenant ! Tu dis être de notre côté mais tout ce que tu as fait jusque-là c'est massacrer notre peuple, soldats comme civils ! C'est complètement incohérent !

- Pour comprendre mes gestes, il faut d'abord comprendre mon plan d'éradication douce. Éléonore, est-ce que tu te souviens du jour où nos géniteurs nous ont emmené sur cette tour, en dehors du camp, pour admirer le paysage ? Te souviens-tu des paroles qu'a prononcées cet homme chargé du nettoyage du bâtiment ? Que nous a-t-il dit ?

- Je m'en souviens . . . Il a dit à nos parents qu'ils auraient mieux fait de ne jamais nous mettre au monde . . .

- Exactement. Je n'ai jamais oublié ces mots, ils m'ont marqué à vie ! En grandissant, j'ai réalisé qu'il n'avait pas du tout tort. Ces guerres incessantes dont souffre le monde entier sont engendrées par la crainte et la convoitise que génère la puissance des titans. Or, nous sommes, descendants d'Ymir, les seuls êtres capables de se transformer en ces monstres. En clair, plus d'eldiens, plus de titans et plus de titans, plus de conflits. Pour le bien de l'Humanité toute entière, nous devons nous sacrifier ! Sans compter qu'en disparaissant, notre peuple n'aura plus à endurer les souffrances de ce bas monde. En fait, nous sommes tous gagnants dans mon plan.

- Qu'est-ce que tu racontes ? ! Tu as perdu la tête ? ! C'est le raisonnement le plus insensé qu'il m'ait été donné d'entendre ! De toute façon, tu crois vraiment que notre peuple acceptera de se sacrifier tout entier avec toi ?

- Il n'aura pas vraiment le choix . . . Le pouvoir du titan originel permet de modifier l'organisme de tous les eldiens sur Terre. Eren et moi n'avons jamais eu l'intention de déclencher le grand terrassement. En réalité, nous allons nous servir du pouvoir de l'axe pour stériliser tous les descendants d'Ymir. Ainsi, nous ne pourrons plus jamais nous reproduire et notre peuple s'éteindra doucement, sans douleur.

- Eren veut l'extinction de notre peuple ? C'est impossible ! Cela ne lui ressemble absolument pas !

- Tu ne le connais malheureusement pas si bien que tu le penses . . .

La mystérieuse jeune blonde se lève. Elle a fini de soigner mes blessures. Elle reprend son seau, tourne les talons et s'éloigne.

Sieg remplace son air grave et sérieux par un sourire chaleureux. Il prend ma main dans la sienne, plonge son regard dans le mien et déclare :

- Tu ne dois surtout pas t'en faire car avant de sauver le monde, c'est Eren et toi que je veux sauver, Éléonore . . .