De l’affrontement, il reste Nicolas d’intact, et Alexandre de blessé. Ce dernier utilise son mana pour se régénérer et, en une quinzaine de minutes, ses entailles se referment d’une couche superficielle. Cependant, un gros bleu demeure sur son flanc droit.

Les deux élèves continuent leur périple en direction de la base de la classe F. Leur progression se fait lente à cause des blessures d’Alexandre et en silence, car les deux adolescents ne sont pas de gros parleurs. Nicolas, en tête de file, est à l’affût du moindre son et empreinte magique. L’homme-loup tient à le remercier de l'avoir secouru, mais le semi-golem l’interrompt sec. À l’aide de son mana, il détecte quelques présences, dont une familière.

« Carte, dit Nicolas. »

Une interface semblable à un radar apparaît sur sa main droite. Il y a cinq points blancs non loin de lui.

« Des alliés. Pourquoi ils ne bougent pas ? »

• Qu’est-ce qu’il y a ?
• Je crois qu’il y a des élèves de notre classe qui ont des ennuis. Reste là et continue de te régénérer. Suis-moi à la trace depuis la carte. Si tu vois que je me fais éjecter, retourne à la base, ordonne le semi-golem en grimpant dans les arbres à l’aide de ses rubans.

Alexandre acquit d’un hochement de tête.

Nicolas saute de branche en branche à vive allure toute en se rééquilibrant subtilement à l’aide de sa capacité à voler. Il se rapproche suffisamment de ses camarades pour communiquer avec eux par télépathie.

• C’est Nicolas de la 1G. Vous allez bien ?

Après un long moment de silence, il entend une voix faible et somnolente.

• Nicolas… à l’aide… Elles se sont toutes endormies… J’ai les paupières si lourdes…
• J’arrive Alice, réponds le semi-golem d’un ton monotone.

L’adolescent accélère la cadence, en faisant de plus amples sauts. Soudain, quatre rayons lumineux jaillissent vers le ciel. Sur le radar, il ne reste qu’un point blanc.

« Merde… »

Il arrive sur les lieux et, du haut d’un arbre, camoufle sa présence.

Sa camarade Alice, vacillante, essaie tant bien que mal de repousser les assauts d’un semi-corbeau.

Nicolas évalue les différentes options pour la secourir. Il opte pour une attaque-surprise semblable à celle qu’il a faite plus tôt, mais un cri de corbeau retentit. Le garçon comprend tout de suite qu’il est repéré par un familier, car il n’est pas censé y avoir d’animaux dans la simulation.

Le semi-oiseau se tourne en direction du hurlement.

Nicolas forme une énorme plate-forme de nuage pour se cacher et mieux se mouvoir, mais des plumes transpercent la nébulosité et le harcèlent comme si son ennemi sait parfaitement où le jeune garçon se trouve.

« Comment il sait où je suis ?! » se demande-t-il avant de voir un corbeau dans le ciel. « C’est lui qui donne ma position ! Arcus ! »

Le garçon souffle un imposant nuage aussi droit qu’un trait en direction de l’oiseau, mais le corbeau l’esquive aisément. Le semi-golem réalise, tout en évitant des plumes noires à la fois du familier et du mage au sol, qu’il ne pourra pas toucher le volatile à l’aide d’arcus qui ne peut qu’aller en ligne droite et opte donc pour un sort plus flexible.

« Nuage aux multiples couleurs peint le ciel. Nuage nacré ! »

Deux sphères multicolores tournoient dans chacune de ses mains et se transforment chacun en sept rayons nébuleux. Quatre montent vers le ciel en direction du corbeau et les dix autres descendent vers le mage de plumes.

Nicolas supprime la densité de sa plate-forme nuageuse et se jette dans le vide, accompagné par ses rayons colorés. Le jeune garçon incruste les rubans de ses pieds dans un arbre et se met à courir sur le tronc. Ses projectiles tombent directement sur son adversaire, mais à une telle distance, le semi-corbeau a largement le temps de les bloquer d’un simple sort défensif. Nicolas en a conscience et profite du bref moment de répit pour réduire la distance qui les sépare.

À l’aide de ses rubans, il dévie de multiples plumes tranchantes.

« Retour au nid », dit le semi-corbeau.

Soudain, toutes les plumes qu’a lancées le mage plus tôt retournent vers lui avec Nicolas dans sa trajectoire. Le semi-golem saute précipitamment sur un autre arbre et écope de quelques blessures superficielles aux jambes et aux pieds. Tout à coup, le corbeau, visiblement amoché, s’apprête à faire un sort, mais Nicolas se jette sur lui et le tranche sec. La carcasse de l’oiseau se transforme en une explosion lumineuse.

« Suie ! » crie le semi-corbeau.

Nicolas est incapable de s’appuyer sur un arbre et invoque un nuage lenticulaire pour freiner sa chute. Cependant, la plate-forme ne résiste pas aux assauts et le semi-élémentaire tombe de nouveau. Le semi-corbeau entoure ses bras d’une énergie spirituelle ténébreuse semblable à des ailes,

« Ailes tranchantes. »

Ses ailes se durcissent, se hérissent et deviennent aussi tranchantes que des lames de rasoir. Le semi-corbeau arbore un grand sourire pensant Nicolas à sa merci quand soudainement il vacille. L’une de ses ailes vient d’être percée par un sort de pollen d’Alice.

« Elle s’est réveillée !? »

Décontenancé, il essaie de se rééquilibrer, mais il est trop tard, le garçon vient d’entrer sur le terrain de jeu de Nicolas qui n’en fait qu’une bouchée. Tranché en deux comme si c’était du beurre, Anthony, le mage de plumes est abasourdi. Son corps artificiel commence à se fissurer et se désagréger.

« Bien joué… », lâche-t-il, dégoûté.

« Limite du corps magique atteint. Éjection. »

Le semi-golem sort de l’explosion de lumière et se réceptionne sur un nuage.

• Merci beaucoup, Nicolas ! Sans toi, j’aurais été éjectée moi aussi, dit Alice joyeusement.
• De rien. Dépêchons-nous de partir. On n’est pas loin de la base de la 1F. On risque de se faire repérer.
• Ah ! Euh… Ok ?

Malgré leur mésentente de ce matin, il existe une certaine cohésion entre les deux adolescents qui se connaissent depuis plusieurs années.

• Où on va ? On ne va pas capturer leur drapeau ?
• Oui, mais avant il faut aller rejoindre Alexandre, répond Nicolas d’une voix neutre.
• C’est qui ça ? demande la semi-papillon visiblement interloquée.
• Le bestial.
• Ça m’étonne de toi. Je veux dire… que tu fasses équipe avec quelqu’un. À l’école élémentaire, t’avais beau avoir des amis, tu restais plutôt distant.
• Ne te fais pas d’idées. Comme toi, il était juste sur mon chemin.
• Je vois… répond Alice déconcertée.

Après quelques minutes de marche dans la forêt dense, Nicolas parvient de nouveau à nouer un contact télépathique avec son camarade.

• Alex, c’est moi. Tout s’est bien déroulé.
• Par le grand Fenrir, tu as fait vite !
• Hmm… Tu nous vois sur ta carte ? Viens nous rejoindre.