Chapitre 7 : La lettre de Nicolas

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Le lendemain, Christine, décidée à faire la paix avec son fils, vient le réveiller, mais tout ce qu’elle trouve en rentrant dans sa chambre est une lettre étendue sur son lit. La mère, confuse, avance dans la pièce obscure d’un pas hésitant et le coeur serré. Les mains tremblantes, elle tient la lettre et redoute son contenu. Christine l’ouvre et ne reconnaît que trop bien cette écriture, ces fautes d’orthographe et cette calligraphie déplorable qui ont été acquises par un dur labeur rempli de sueurs et de larmes.

« Chère Maman,

C’est très dur pour moi ces temps-ci, à l’école et à la maison… J’ai l’impression que l’Académie ne m’apporte rien de bon. J’ai perdu tous mes amis de l’école élémentaire. Je n’arrive pas à m’en faire de nouveau. Charlie… c’est à peine s’il me parle. Bref… Je me sens seul. La solitude n’a jamais vraiment été un problème, mais maintenant je me sens seul et ça fait mal. Quand je vois des personnes faire les pitres, je les envie… Je les envie d’avoir des amis et moi non. Hier, je crois m’en être fait un, il s’appelle Frank. Il m’a forcé à manger avec lui et m’a défendu quand je me faisais insulter de monstre par une fille que, j’ignore comment, mais elle sait ce que je suis. Après la retenue, Frank m’a vu, par accident, m’envoler, je lui ai donc révélé mon secret, mais il est trop tôt pour savoir si je peux vraiment lui faire confiance… Il m’a dit qu’il ne le dirait à personne, mais… je ne sais pas quoi en penser. Peut-être que demain toute l’école sera au courant de ce que je suis vraiment.

Et il y a à la maison. J’ai conscience que tu veux me protéger, mais à trop me contrôler, je me sens emprisonné. À chaque fois que tu me chicanes d’avoir volé, je me suis vu comme un monstre. Quand tu as été d’accord qu’on me mette un sceau magique, je me suis senti déshumanisé… Quand tu as pleuré ce jour de mes deux ans où ma magie est apparue et que je suis devenu ce que je suis, c’est la première fois que je me suis senti différent. Ta réaction de ce jour-là est encore dans ma mémoire. Pourquoi as-tu pleuré ? C’est parce que tu venais de réaliser que t’avais donné naissance à un monstre ? Je ne veux pas te dire que tu es une mauvaise mère. Au contraire, je trouve que tu as été une très bonne mère qui est toujours là pour notre bien et nous protéger. Mais, je suis devenu une menace pour notre famille. Je l’ai bien compris… Tu as peur que je vous tue tous par accident. Je comprends pourquoi tu voulais que j’aille ce sceau. C’est parce que je suis un danger. Mais, malgré ça, je refuse de porter cette muselière magique, je me sens déjà assez comme une monstruosité. Alors s’il te plaît, je ne veux pas l’être davantage. Comme toi, je désire protéger les personnes que j’aime. La seule solution que j’ai trouvée est difficile et déchirante… Pour vous protéger de moi et ne pas perdre toute mon humanité, je dois partir. Partir loin de vous tant que je ne maîtriserai pas encore ma future puissance. Maman, papa, Camille, Alexis, Rosalie, Juliette et Aurélie, vous allez me manquer.

Nicolas »

Christine lâche la lettre confuse. Son corps entier tremble, sa respiration se fait difficile et saccadée. Des larmes commencent à couler. La mère chuchote en boucle le prénom de son fils. Elle veut s’effondrer, mais elle ne peut pas se le permettre. Christine accourt à l’extérieur de la maison. La jeune femme lève les yeux dans l’espoir de voir son fils, mais tout ce qu’elle voit est un ciel azur vide de nuages. Désespérée, elle crie le nom du jeune garçon en libérant toutes les larmes de son corps.

***

Il est tard dans la nuit, l’adolescent remplit son sac de vêtements et de quelques collations. Il laisse son ordinateur portable sur son bureau. Avant de partir, Nicolas désactive la géolocalisation de sa montre. N’ayant pas de téléphone, l’adolescent ne peut plus être localisé d’un quelconque appareil technologique. Il sort par la petite fenêtre de sa chambre et prend quelques secondes avant de s’envoler, maussade. Dans le ciel, les nuages sont épais et gris. Quelques gouttes de pluie tombent, mais cela ne dérange pas le fugueur qui accélère sa vitesse de vol. Il a l’intention de quitter Raillard, la capitale, et de se diriger vers Trois-Courants, la troisième ville la plus peuplée de la province de Durlad. Sans être optimiste, Nicolas voit cette fugue comme une nouvelle étape de sa vie qui commence ou encore comme une nouvelle aventure qu’il se doit d’affronter seul. L’adolescent survole le champ où il a dévoilé sa réelle identité quelques heures plus tôt. Il regarde l’étendue de blés avec des regrets. Tout à coup, Nicolas se fait violemment frapper par un éclair, gémit de douleur et lutte pour ne pas s’évanouir à une telle hauteur. Il descend en vitesse, mais perd connaissance avant d’atterrir. D’un fracas morbide, son corps s’effondre sur le sol.

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