Chapitre 9 (1/3) : Un maigre espoir

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Le détective aux cheveux grisâtre rentre au poste de police, complètement enragé.

« Je vais le foutre dans un pensionnat pour délinquants, ce semi-monstre ! » hurle-t-il complètement humilié avant de s’asseoir brusquement à son bureau.

Il tapote sur son ordinateur. Ses yeux gris sont froncés. À la vue d’un courriel de son supérieur, son visage se décrispe et affiche de l’incertitude. Duplessis rentre dans une pièce aux murs entièrement en verre. Les grands fauteuils en cuir sont parfaits pour des discussions informelles. Cependant, c’est à son bureau, là où sont abordées les affaires les plus urgentes, que le chef de la police l’attend. Ce dernier n’est pas seul. Un homme au dos musculeux et aux larges épaules est assis face à lui.

Par un signe de la main de son supérieur, Duplessis les rejoint. Une fois devant l’inconnu, il s’aperçoit de sa réelle nature. Ses cheveux sont des cristaux de sels et d’autres poussent sur sa mâchoire comme une barbe mal rasée. Ses avant-bras, son torse ainsi que le bas de ses jambes sont recouverts d’une membrane rocailleuse beige clair.

« Un semi-monstre…» pense-t-il d’un air dédaigneux.

Ce « semi-monstre » n’est pas comme les autres. En voyant ce regard odieux, le semi-golem fronce ses yeux beiges et sort de sa poche sa pièce d’identité. L’emblème est gravé, en son centre, d’un grand arbre au tronc et aux branches particulièrement épaisses ainsi que, dans le coin supérieur droit, d’un petit numéro huit. Le badge est à la fois semblable et bien différent de celui d’un policier.

Le détective blêmit et regrette automatiquement sa pensée. Devant lui se trouve un guerrier de rang Sage. Moins d’une centaine de personnes au pays portent ce rang. Duplessis recule d’un pas, visiblement apeuré.

  • Vous… vous êtes Roger Bergeron ! Le tout premier guerrier semi-élémentaire de Koden. Que… que faites-vous ici ?! balbutie-t-il.

Un sourire moqueur se dessine sur le visage du semi-golem de sel.

  • J’ai entendu dire qu’un jeune semi-golem t’a échappé… Comment il s’appelle déjà ?
  • Euh, Nicolas Thibodeau, répond-il en regardant dans son dossier.
  • Ha ha ha, tu t’es fait avoir par un enfant de douze ans, s’esclaffe-t-il avant d’afficher un regard plein d’animosité. S’il faut que tu regardes dans tes dossiers pour me dire le nom du gamin que tu es censé retrouver depuis trois jours, je crois pouvoir affirmer que les rumeurs disant que tu l’appelles « le semi-monstre » sont vraies. Si cela ne tenait qu’à moi, je t’en ficherais une en plein visage. Donne-moi son dossier. Je m’en charge.

Duplessis est abasourdi par ce changement d’attitude.

  • Les… les guerriers n’ont rien à voir avec les affaires de la police, balbutie-t-il en tenant fermement le dossier entre ses mains.
  • Après avoir échoué à l’attraper avec toutes les ressources que tu as déployées, l’Organisation des guerriers de Koden a décidé d’en faire une quête. En bref, en acceptant cette quête, ta chasse au « semi-monstre » se termine aujourd’hui, explique le guerrier en prenant le dossier des mains de Duplessis, avant de se diriger vers la sortie.

« Ha… et une dernière chose… que je ne te reprenne pas à traiter un autre gamin de monstre, c’est à cause de flics comme toi que beaucoup de mes semblables rejoignent le BCM. »

Il sort du bureau avec une démarche rigide et remplie d’agressivité. En arborant un regard déterminé, il agrippe son médaillon en diamant qui lui remémore des évènements passés qui le remplissent encore de remords aujourd’hui.

« Je te retrouverai Nicolas Thibodeau, quoi qu’il en coûte… »

***

Sous un soleil couchant, Nicolas survole la ville aux toits en tuiles bleues. Il vole à toute vitesse en fonçant dans les nuages sur sa route. Il veut aller le plus loin possible de cette ville qui lui rappelle autant de mauvais souvenirs.

Le centre-ville est entouré par d’anciennes murailles de pierres datant de la lointaine époque coloniale. Les fortifications de plusieurs mètres de haut finissent leur course dans une imposante montagne escarpée, appelée la falaise d’Abraham. Une immense chute y coule et est visible sur plusieurs kilomètres à la ronde, la Chute Diamant.

Un gigantesque bâtiment en tuiles bleues est incrusté du haut en bas de la falaise. Le bas du monument s’appelle la Citadelle-du-Roy-Soleil et rend hommage à un vieux roi de Sanchaud, le pays qui a fondé la ville de Raillard. Au sommet se trouve la Cathédrale de la Chute qui vénère le tout puissant Démiurge de l’eau, Poséidon du panthéon gifosien. Autrefois, la résidence de prêtes et de personnes influentes, le monument construit dans la falaise est désormais un hôtel de luxe. Ce bâtiment aux dimensions gargantuesques est sans conteste ce qui fait la renommée internationale de Raillard, la capitale nationale de la province de Durlad.

Nicolas en voyant la cathédrale, décide d’aller y prier. Le garçon est loin d’être un fervent pratiquant, mais il préfère mettre toutes les chances de son côté avant de commencer son périple. Normalement bondé, à cette heure presque tardive il ne reste à l’entrée de l’église que quelques fervents croyants et prêtres. Le semi-golem rentre par la grande porte de plusieurs mètres de haut.

À l’intérieur, plusieurs rangées de bancs en bois gravés font face à une immense statue d’un semi-poisson. Les murs sont jonchés de tableaux retraçant les périples et légendes de Poséidon. Plusieurs paires de colonnes à l’architecture gifosienne séparent l’allée principale des rangées de bancs. Sur ces piliers se trouvent plusieurs lampes magiques à base d’aigue-marine. Une fois à quelques mètres de la statue de Poséidon, Nicolas s’agenouille, lie ses mains entre elles et ferme les yeux.

« Bonjour… euh… ou plutôt bonsoir, Poséidon, Démiurge des mers et des océans ainsi que chef des dieux de l’eau du panthéon gifosien. Je m’appelle Nicolas Thibodeau. Je sais que je ne te pris jamais… Pardon si je ne tiens pas mes mains de la bonne manière. De toute façon, tu dois déjà te faire plein d’idées à mon sujet : un semi-élémentaire renié par les dieux. Mais… je tente quand même ma chance. J’aimerais que tu me souhaites bonne chance, lors de mon voyage. Je pars pour protéger ma famille et pour rester quelqu’un de bon… Je ne veux pas faire partie de ces statistiques sur les semi-élémentaires criminels… Je veux rester sur le droit chemin. Je me disais… même si tu me détestes à cause de mes origines, peut-être que tu voudrais bien accéder à la demande de quelqu’un qui s’efforce à rester vertueux… Alors, s’il te plaît, envoie-moi un signe… Donne-moi l’espoir dont j’ai affreusement besoin. Dis-moi que je peux être autre chose qu’un criminel, autre chose qu’un monstre. S’il te plaît ! Dis-moi que je peux être quelqu’un de bien, aussi bien que le plus grand des saints. S’il te plaît, dis-moi que je peux être humain, que j’ai le droit de voir autre chose qu’un monstre devant un miroir. S’il te plaît… » prie-t-il avant d’adresser un regard ému à la statue.

Nicolas attend quelques minutes dans l’espoir de ressentir quelque chose, mais rien ne se produit. Dépité, le semi-golem sort du temple. En se camouflant dans un Nuage invisible, il se sent stupide d’avoir pu espérer quelque chose d’un dieu et s’envole de nouveau en direction de Trois-Courants.

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