Chapitre 10 (2/9) : Un mentor et des amis

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Nicolas rentre dans une maison de taille modeste. Dans le vestibule, une penderie entrepose des manteaux et des paires de chaussures à la fois d’adultes et d’adolescents.

« Mets-toi à tes aises », lâche Roger en montant à l’étage du dessus.

Nicolas, un peu intimidé, reste au rez-de-chaussée et trouve rapidement le salon. Des fauteuils et divans en cuirs usés et décolorés font face à une petite table basse en bois sur laquelle reposent plusieurs assiettes et l’imposante télévision cathodique.

« Mmh, ça me rappelle des souvenirs. On en avait une jusqu’à mes cinq ans… »

Il y des fenêtres, cependant elles sont cachées derrière de longs rideaux bruns aux motifs floraux à la mode il y a plus de quinze ans. En allant un peu plus loin dans la demeure, il finit par trouver la cuisine puis un autre couloir. Les murs soutiennent de vieilles armoires en bois et aux poignées en cuivre. La seule chose qui semble neuf dans la pièce s’avère le réfrigérateur en acier inoxydable.

« Probablement que l’ancien a lâché pour qu’il détonne autant… »

Le garçon continue dans l’autre couloir, il y trouve une toilette et deux chambres. La première, ses murs, ses draps, ses rideaux, ses meubles, tout s’avère gris. Avec son grand lit défait, c’est visiblement la chambre de Roger. La deuxième pièce demeure des plus énigmatique puisqu’elle semble appartenir à un adolescent. Cependant, elle est étonnamment bien rangée : les étagères, quoique vieillottes, sont dépourvues de poussières, les draps bleu clair du lit ne laissent paraître aucun pli et aucun vêtement ne traîne sur le vieux plancher en bois. Les murs sont recouverts d’images de vieilles vedettes des années 90, tandis que sur la table de chevet se trouvent des photos argentiques. On y voit Roger un peu plus jeune, accompagné d’un adolescent semi-golem aux cristaux bleu clair et parfois d’une femme.

  • Tu ne devrais pas être ici, lâche Roger d’un ton sévère.

Nicolas sursaute.

  • Pardon… je savais pas que je ne pouvais pas rentrer ici, répond-il en sortant de la chambre.
  • C’est rien, mais n’y retourne plus, s’il te plaît.
  • D’accord. Pardon encore… dit Nicolas en affichant une tête d’enterrement.

Roger le remarque et essaie d’y remonter le moral en lui montrant sa chambre au grenier. La pièce s’avère grande. Au fond de la pièce se trouve son lit et, à son pied, un vieux coffre parfait pour stocker ses affaires. Une porte donne sur un petit balcon. Roger le présente comme l’endroit idéal où s’envoler et atterrir. Les yeux turquoise du garçon affichent de l’émerveillement en apprenant qu’il pourrait voler comme il le souhaite.

  • Pourquoi vous me laissez voler ? Vous n’avez pas peur que quelqu’un me voie ?
  • Tu te rends invisible quand tu voles à ce que je sache ?
  • Ou… oui ?
  • Tu as ta réponse ! Et surtout, selon moi, ce n’est pas grave si quelqu’un te voit voler. Je suis d’avis que tu devrais être fier de qui tu es, Nicolas. Tu ne t’en rends pas encore compte, mais une fois tes pouvoirs bien maîtrisés, ta nature de semi-golem se révélera davantage comme un don plutôt qu’une malédiction. En plus, savoir voler comme tu le fais à ton âge… Ça serait du gâchis de te l’interdire. Tu ne crois pas ?

Le jeune semi-golem de nuages s’avère stupéfait et heureux des dires de son nouveau mentor. Il le regarde de la tête aux pieds, émerveillé par la prestance du guerrier.

  • Tu as raison.

Un léger sourire satisfait se dessine sur le visage de Roger.

  • Bon. Ça te tente d’aller voler jusqu’au centre-ville ? J’ai une belle place à te montrer !

Nicolas n’a pas à se le faire proposer deux fois qu’il se trouve d’ores et déjà dans le ciel, camouflé dans un nuage invisible.

  • On ne va pas se perdre de vue si je suis invisible ? demande-t-il, soucieux.
  • Pas du tout. Tu vas voir, après ta première transformation, tu vas te découvrir des capacités que tu ne soupçonnais même pas ! Comme voir le monde sous la forme de mana.

À ces dires, ses iris beiges s’illuminent légèrement.

  • Avec cette vue, tout ce qui libère du mana te devient visible, même les choses normalement invisibles.
  • Quoi, vraiment ?!
  • Non, il y a bien des limites à tout. Cette vision s’arrête avec ma capacité à détecter la magie.
  • Euh, je ne suis pas trop sûr de te suivre…
  • Pour que ça soit plus clair, prenons les statistiques de détection et de furtivité. Par exemple, si ma capacité de détection est de cinq, cela veut dire que je n’arriverai pas à voir le mana des mages qui ont une statistique de furtivité supérieure à cinq. Bon, il ne faut pas prendre tout au pied de la lettre non plus, des statistiques restes qu’un indicateur. Ce n’est pas parce qu’un mage a une furtivité légèrement supérieure à ma détection que je ne le verrai pas. C’est surtout si ce mage se concentre à camoufler sa présence ou moi qui se concentre à détecter ces présences que cela va se jouer.

Maintenant que tout est plus clair dans l’esprit de Nicolas, les deux semi-golems s’envolent en direction du centre-ville. Ils se rapprochent des nuages. L’adolescent virevolte paisiblement à travers eux. Roger ébloui par la facilité qu’a le garçon à voler lui fait remarquer. Curieux de voir jusqu’où les talents de son disciple se limitent, il lui propose une course. La ligne d’arrivée est la muraille qui délimite la vieille partie de la Raillard. Nicolas accepte, cependant les résultats sont déjà courus d’avance avec une victoire fracassante du mentor. L’adolescent arrive avec un peu de retard complément essoufflé.

  • Vous… vous volez si vite… Moi qui pensais voler vite… balbutie-t-il en s’effondrant sur une plateforme de nuages qu’il crée à l’instant.
  • Pourtant tu as fait une performance remarquable qui n’a rien à envier aux apprentis guerriers de nos jours !
  • Vrai… vraiment ? demande Nicolas, les yeux scintillants.
  • Oui, pour sûr ! Même certains vrais guerriers devraient en prendre de la veine.

Le garçon rougit à vue d’œil, à la fois heureux et embarrassé par autant de compliments qui viennent d’un Sage. Les deux semi-golems continuent leur virée dans les airs, avant de faire un détour vers un fast-food. Une fois le souper en poche, le ciel commence à prendre ses teintes crépusculaires. Le ciel est peinturé d’orange et de rouges tandis que les nuages sont rosés. Le soleil se rapproche de plus en plus de l’horizon.

Le maître et son disciple se posent sur le plus haut clocher de la Cathédrale de la Chute. De là-haut, c’était le lieu parfait pour admirer Raillard et ses périphéries tout en mangeant un hamburger. C’est la première fois que Nicolas voit un tel panorama. Les hautes murailles et les quelques gratte-ciel du Vieux-Raillard paraissent petits à cette distance. Non loin d’eux, longe un fleuve à l’eau teintée par l’orange flamboyant du soleil somnolent. De l’autre côté des murailles, une mer de toits en tuiles bleus recouvre la ville. Les deux semi-golems commencent à manger, mais le regard du guerrier reste fixé sur les cheveux châtain du garçon.

  • Nicolas, désactive ta montre qui change la couleur de tes nuages, tu es bien plus beau comme ça. De toute façon, personne ne peut nous voir d’ici.

L’adolescent hésite, mais finit par le faire. Il se sent libre, mais ne sait pas si c’est grâce à au paysage ou parce qu’il est dehors sans se cacher.

  • C’est si beau ! dit-il, émerveillé.
  • C’est pour ça que j’aime bien manger ici. En plus de sa beauté, cette vue me rappelle pourquoi je suis devenu un guerrier : pour protéger tous ces lieux magnifiques et ces personnes qui y vivent, explique Roger, fier.

L’adolescent regarde le guerrier et voit en lui l’avenir qu’il pourrait et désire avoir.

« Woua, il est trop cool. »

  • Je… je me demandais… Vous vouliez m’aider à maîtriser ma transformation et mes pouvoirs. Quand est-ce que vous voulez commencer ?
  • Hmmm… Tu as eu une semaine bien épuisante… Demain, on est jeudi et tu as école. Je te propose qu’on commence ta formation samedi, ça va te permettre de récupérer un peu.

Nicolas acquiesce d’un air impatient. Après cette sortie, une relation de confiance s’instaure entre le mentor et son élève. Ce dernier ne s’avère plus aussi craintif. La maison dans laquelle il osait à peine se mouvoir plutôt lui semble dorénavant beaucoup plus accueillante. Le grenier, qui lui a semblé comme vieillot et vide, lui paraît maintenant comme sa nouvelle chambre, un espace où il se sent en sécurité.

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