Chapitre 11 (2/3) : La goutte d'eau qui fait déborder le vase

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Le semi-golem se dépêche d’aller récupérer le cartable dont il a besoin pour le prochain cours. Une grande adolescente aux longs cheveux bleu et rouge pastel l’attend accotée à son casier. Nicolas fronce les yeux, impassibles et prêts à en découdre. Les corridors se trouvent presque vides, la grande majorité des élèves s’avère déjà en salle de classe. Une ambiance glaciale sépare Nicolas et Maxime dorénavant seul.

  • Comme quoi c’est vrai ce qu’on dit… Le criminel revient toujours sur le lieu du crime, lâche-t-il, hostile.

La magicienne de vapeurs exprime du mécontentement.

  • Je ne pensais pas avant-hier soir que tu réagirais à mon message de manière aussi lâche.
  • Tu voulais que je fasse quoi d’autre ? Que je te saute dessus ?!
  • Oui, exactement ! Je voulais qu’enfin tout le monde voie ce que tu es vraiment : un semi-monstre.
  • Arrête de dire n’importe quoi !? Je suis un humain normal.
  • Et menteur, en plus ! lâche-t-elle avec un sourire en coin. Tu crois que ne suis pas au courant pour ta dispute avec Charlie Houde de la classe A ? J’ai tout vu et j’en ai bien assez entendu pour pouvoir enfin confirmer mes doutes.

Le visage de Nicolas se crispe de frayeur.

  • Arrête, tu dis n’importe quoi !

C’est par accident et pure coïncidence que Maxime a entendu tout ce qu’il ne fallait pas. Le jour de la dispute, la jeune fille, déprimée, mange seule, comme à son habitude, dans les estrades qui font face aux différents terrains de sport et de combat. Nicolas et Charlie s’étaient malencontreusement disputés juste à côté de l’estrade.

  • Tu sais Nicolas… Il y a un moment où tu m’as fait douter. J’ai cru que les semi-monstres n’étaient peut-être pas tous méchants. Après tout, toi tu étais calme et discret… Mais ça, c’était avant que tu partes une semaine je ne sais où. Maintenant, tu es quelqu’un de dangereux, colérique, d’irritable et qui ne se gêne pas de répondre aux provocations.

Nicolas serre les dents, agacé. Ses yeux commencent à se gorger d’eaux et émanent une légère lueur turquoise.

  • Tu ne t’es jamais dit que c’est peut-être parce que je n’en peux plus de ton comportement avec moi. Ça fait depuis la rentrée que tu es méchante et que tu m’humilies. Tu me traites de tous les noms alors que tu ne me connais même pas !

Maxime est déconcertée. Le semi-golem, d’habitude si neutre, se trouve sur le bord des larmes et affiche un visage désespéré. Cette expression fait vibrer le cœur de l’adolescente qui s’en retrouve chamboulé. Elle voit, un bref instant, une partie d’elle en Nicolas avant de se raviser.

  • Me… ne me fait pas rire ! Des larmes de semi-monstre ne valent rien. Elles ne servent qu’à duper ! dit-elle, ébranlée. Les semi-monstres ne sont bons qu’à être des criminels, des terroristes ou au mieux des armes pour l’armée ! Tu n’en fais pas exception. Je vais faire en sorte que tout le monde sache pour toi, pour que tout le monde sache pour le danger que tu représentes !

La cloche qui annonce le début des cours de l’après-midi sonne. Maxime claque de la langue, irritée.

  • Je te laisse tranquille pour cette fois, mais ça sera pas la dernière. J’ai pas envie qu’on m’exclût de l’école pour de vulgaires retards, lâche-t-elle en déguerpissant à la salle de cours.

Nicolas, seul dans la salle des casiers des premières années tremble. Sa respiration devient difficile. Son cœur bat la chamade au point d’en exploser. Des sueurs froides coulent sur sa peau terne. Ses yeux lâchent quelques larmes, mais Nicolas les essuie aussitôt. Lentement, l’adolescent essaie de reprendre le contrôle et de se calmer. Une pensée lui traverse l’esprit.

« Tu vas te laisser faire aussi facilement ? Elle t’a humilié. Vas-tu vraiment laisser passer ça ? »

« Non… », marmonne le semi-golem en terminant de s’essuyer les yeux.

Son regard furieux émane une forte lueur turquoise au point que cela ressemble à de la vapeur ou encore de la fumée. Une flamme de rancœur intense s’allume dans son cœur blessé. Une fois en classe, il n’a d’yeux que pour son ennemie. En pensant à côté de son bureau, il lui donne un papier sur lequel est écrit : « Ce soir après les cours, dans le champ à côté de l’école. »

***

En sortant de l’école, Maxime voit le regard de Nicolas inhabituellement froid. Certes, le garçon n’est pas réputé pour son expressivité, mais ses yeux turquoise émanent habituellement de la douceur et du calme.

« Allons-y », lâche le semi-golem, d’une voix sec.

Une distance les sépare. Nicolas marche vite et d’un pas pressé, tandis que Maxime marche normalement, mais de manière incertaine. Elle se trouve bouche bée de l’attitude du garçon.

À cette période de l’année, les bottes de foin ont été ramassées et le champ labouré pour le préparer à l’hiver. Complètement camouflé par des nuages, le ciel est teinté de gris et le soleil s’avère discret.

Après une marche sans paroles d’une quinzaine de minutes, les deux adolescents se trouvent en plein milieu du champ. D’un air hésitant et agressif, la magicienne brise le silence.

« Tu peux bien me dire ce qu’on fait ici ? »

Le semi-golem se retourne vers elle. Ses yeux turquoise émanent une lueur vive, incarnant sa colère et sa frustration. La jeune adolescente se fige, déroutée.

« Tes… tes yeux, ils brillent ! Ça veut dire que tu es bien un semi-monstre ?! »

Le garçon ne répond pas et se contente de commencer une incantation, d’une voix froide.

« Je fuis la réalité dans les cieux. Nuage illusoire, descends et fais-nous sombrer dans ton univers. Fata Morgana. »

Un énorme dôme de nébulosités se forme et englobe une grande partie du champ. De l’extérieur, rien ne semble avoir changé, tandis que de l’intérieur une membrane recouvre le ciel et le sol. Les deux adolescents semblent au cœur d’un immense nuage blanc et azuré.

« On va être tranquille maintenant… Si je t’ai emmené ici, c’est pour qu’on règle nos comptes une bonne fois pour toutes », explique-t-il, les yeux vides, en jetant sa montre.

Ses cheveux reprennent leur apparence de nuages. Cependant, ils n’arborent pas leurs splendides teintes blanches et cyan habituelles, ils sont grisâtres et d’un bleu terne.

  • T’es contente ? Tu as eu ce que tu voulais… Je l’avoue, je suis l’un de ces affreux semi-monstres…

Maxime, confuse, ne sait pas comment réagir. Jamais elle n’aurait imaginé ce scénario.

  • Pour… pourquoi me l’avouer maintenant ?
  • Tu en savais déjà trop pour que je continue de nier… Tout ce que je te demande, c’est de, s’il te plaît, n’en parler à personne. Je ne suis pas méchant, demande Nicolas, désespéré.
  • Tu sais très bien que je ne peux pas faire ça ! Toi et tous les semi-monstres représentez un danger pour la société ! Ne pas le dire c’est mettre en danger les autres élèves de l’école ! s’exclame-t-elle, déterminée.
  • Maxime… s’il te plaît… supplie-t-il en avançant d’un pas.
  • N’approche pas, espèce de monstre ! Si tu fais un pas de plus, je te défonce !
  • Nicolas s’effondre, complètement démuni. La lueur turquoise dans ses yeux disparaît, il ne reste qu’un vide profond de désespoir.

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