Chapitre 38 : Le vide

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Cela fait deux semaines que je ne sais plus où j’en suis. Deux semaines où chaque jour se ressemble, où le silence est devenu mon seul compagnon. Deux semaines sans Matt.

Je n’ai pas eu le courage de lui écrire, et lui non plus n’a rien fait pour me contacter. Peut-être qu’il a enfin compris. Compris qu’il ne pouvait pas m’aider. Que je ne pouvais pas lui donner ce qu’il voulait, ni être celle qu’il pensait aimer. Peut-être qu’il a simplement abandonné, comme moi je l’ai fait.

Et cette pensée me dévore. Parce que s’il a abandonné, qu’est-ce qu’il me reste ? Maeva est chez ses parents, Sabrina est engloutie par son travail, et moi… moi, je suis seule. Vraiment seule. Il n’y a personne pour combler ce vide qui m’enveloppe, personne pour me tendre la main ou me sortir de ce gouffre. Le silence est mon seul compagnon, et il m’étouffe.

J’erre dans mon appartement comme une ombre. Les jours se fondent les uns dans les autres, sans début ni fin. Mon réveil sonne, mais je reste couchée. Parfois, je me lève juste assez pour attraper un morceau de pain rassis ou boire un verre d’eau, puis je retourne m’enfouir sous mes draps. Les heures passent, mais je ne les vois pas.

Les cours ? Un bruit de fond lointain. Je m’y traîne sans écouter, sans participer. Juste pour donner l’illusion que je suis encore là. Les sorties ? Inutiles. Les discussions anodines ? Fatigantes. Tout me semble fade, sans goût, sans texture. C’est comme si le monde entier avait perdu sa couleur.

Mais Hector.

Hector est toujours là.

Je n’ai pas eu le courage de lui écrire ces derniers jours. Pas parce que je voulais l’ignorer, mais parce que je ne savais plus quoi lui dire. Chaque mot que je tapais me semblait faux, inutile, déplacé. Pourtant, ce matin, sans même y penser, mes doigts ont cliqué sur son nom.

Je me suis retrouvée à relire nos échanges. Ces messages où il me parlait de contrôle, de soumission, de limites à briser. Ses mots avaient quelque chose d’hypnotique. Comme une mélodie qui ne quitte jamais votre tête. Une promesse de libération que je ne pouvais trouver ailleurs.

Mon cœur battait fort, mais pas de peur. Non. C’était autre chose. Une sorte d’impatience fiévreuse, presque animale. Comme un appel auquel je ne pouvais plus résister.

Alors, j’ai craqué.

"Hector, j’ai besoin de toi."

Je me suis arrêtée là un instant, mes doigts tremblant légèrement. Une larme chaude a roulé sur ma joue, mais je ne l’ai même pas essuyée. Je savais ce que je faisais. Je savais que je m’abandonnais encore à lui, mais je n’avais plus la force de lutter.

"Je sais que je n’ai pas été régulière ces derniers temps, mais je ne peux plus continuer comme ça. Je veux que tu me donnes un défi. Quelque chose d’intense. Quelque chose qui me sorte de ce vide. Je te promets que j’accepterai tout ce que tu me demandes."

Quand j’ai appuyé sur "envoyer", mes mains tremblaient si fort que j’ai dû poser mon téléphone. Je me suis laissée tomber sur mon lit, fixant le plafond. Qu’avais-je fait ? Était-ce une bonne idée ? Non, sûrement pas. Mais une part de moi, celle qui criait plus fort que toutes les autres, voulait désespérément sa réponse.

Une heure plus tard, mon téléphone a vibré. Son nom s’est affiché sur l’écran, et mon souffle s’est coupé. J’ai ouvert le message.

"Je savais que tu reviendrais. Prépare-toi, Cloé. Je vais te donner ce que tu cherches."

Ces mots étaient simples, presque secs, mais ils ont résonné en moi comme un écho. Je les ai relus plusieurs fois, laissant chaque syllabe s’imprimer dans mon esprit.

"Je savais que tu reviendrais."

Bien sûr qu’il savait. Hector sait toujours. Il sait ce que je veux, ce que je ressens, ce dont j’ai besoin, même quand moi, je ne le sais pas. Il ne pose jamais de questions, il ne doute jamais de moi. Il me voit telle que je suis, ou du moins telle que je commence à être.

Je ne sais pas encore ce qu’il va me demander. Pas cette fois. Mais je sais une chose : je suis prête. Peu importe ce que c’est, peu importe à quel point c’est extrême, je veux le faire.

Je veux m’oublier. Juste pour un instant.

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