Chapitre 43 : Le poids du mensonge

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Je n’aurais jamais dû entrer dans ce magasin. Tout en moi savait que c’était une mauvaise idée. Mais mes pas m’avaient portée ici presque malgré moi. Une impulsion. Une nécessité.
Je m’étais dit que j’allais juste jeter un œil, rien de plus. Mais je savais pourquoi j’étais là. Je cherchais une tenue pour le 14. Quelque chose de parfait. Quelque chose qui répondrait aux attentes d’Hector.

Ce n’était pas un endroit où je faisais habituellement mes achats. Les vêtements ici étaient audacieux, trop audacieux. Des robes si courtes qu’elles frôlaient l’indécence, des décolletés vertigineux, des jupes moulantes qui semblaient défier la gravité. Mais à cet instant, une part de moi se sentait… attirée. Presque excitée à l’idée de trouver la tenue parfaite.

Mes doigts effleuraient les tissus satinés, les dentelles provocantes, quand une voix familière m’a figée sur place.

— "Cloé ?!"

Je me suis retournée d’un coup, et mon cœur s’est arrêté. Sabrina se tenait là, à quelques mètres de moi, un sourire éclatant sur le visage.

— "Oh mon Dieu, qu’est-ce que tu fais ici ? Ça fait une éternité qu’on ne s’est pas vues !"

Elle s’est approchée, tenant une paire de chaussures à talons et un sac dans ses mains. Toujours rayonnante, toujours pleine de vie. Moi, je restais figée, incapable de bouger, comme si elle m’avait prise en flagrant délit.

— "Je… Je fais un peu de shopping," ai-je réussi à bafouiller.

Elle a jeté un coup d’œil rapide aux vêtements que je tenais, et ses yeux se sont immédiatement illuminés.

— "Wow, c’est pour Matt ?!"

J’ai ouvert la bouche, mais aucun mot n’en est sorti.

— "Euh… non, pas vraiment," ai-je fini par répondre, trop vite.

Son sourire a vacillé une seconde. Elle semblait perplexe, mais elle a rapidement retrouvé son enthousiasme.

— "Bon, qu’est-ce que tu cherches, alors ? Une robe pour sortir ? Un rencard ?"

J’ai secoué la tête, incapable de formuler une excuse crédible. Sabrina a regardé les vêtements que je tenais : une robe noire extrêmement moulante et un chemisier transparent.

— "Cloé… Tu as changé, hein ? La robe noire que je t’ai aidée à choisir a fait son effet, alors ? Matt doit être aux anges, c’est sûr !"

J’ai senti mes joues s’enflammer. Elle parlait avec tant de naturel, avec tant de bonne intention. Elle pensait que tout ce que je faisais était pour Matt, pour cette relation normale et saine qu’elle voyait en nous. Et moi, je me tenais là, à lui mentir ouvertement.

— "Oui, elle… elle a eu son effet," ai-je murmuré, incapable de la regarder dans les yeux.

Elle a souri, satisfaite, et a pris un chemisier similaire à celui que je tenais.

— "Tu sais, ce genre de tenue te va super bien. Je te vois tellement avec ça et des talons ! Matt ne te lâchera plus !"

Chaque mot qu’elle disait était comme une lame qui s’enfonçait un peu plus profondément dans ma poitrine. J’avais envie de tout lui avouer. De lui dire que ce n’était pas pour Matt, que ce n’était même pas pour moi. Que ces vêtements étaient pour répondre à des ordres, pour plaire à un homme qu’elle ne connaissait pas et qui contrôlait ma vie.

Mais comment ? Comment expliquer ça à quelqu’un comme Sabrina, qui voyait le monde avec tant de simplicité ?

— "Tu sais, tu m’impressionnes, Cloé," a-t-elle ajouté, en regardant une jupe qu’elle tenait contre elle. "Ces derniers temps, j’ai l’impression que tu es plus confiante. Plus… audacieuse. Ça te va bien."

Audacieuse. Ce mot m’a presque fait rire. Si seulement elle savait.

J’ai forcé un sourire et répondu vaguement, espérant qu’elle n’insisterait pas.

On a continué à parler de choses légères, mais tout au long de la conversation, je sentais ce poids sur ma poitrine. Sabrina était là, à m’encourager, à croire en moi, alors que je lui mentais sans arrêt.

Quand elle m’a dit au revoir, j’ai failli la retenir. J’ai failli lui dire la vérité. Mais les mots sont restés coincés dans ma gorge.

Je l’ai regardée partir, son sourire éclatant encore gravé dans mon esprit. Et moi, je suis restée là, les mains pleines de vêtements que je n’aurais jamais dû acheter, déchirée entre la honte et l’envie irrésistible de continuer.

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