Chapitre 50 : Le dernier

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Je crois que je n’ai jamais été aussi nerveuse.

Toute la journée, j’ai essayé de garder mon calme. De me convaincre que ce soir serait la dernière fois. Que ce serait le point final, le moment où je dirai à Hector que c’est fini. Mais plus l’heure approchait, plus mon cœur battait fort, et plus mes pensées s’entremêlaient.

Quand l’alarme de mon téléphone a sonné, me rappelant qu’il était l’heure de partir, je me suis levée et j’ai respiré profondément.
"Ce sera la dernière fois," ai-je murmuré à haute voix, comme une prière ou une incantation.

Je me suis préparée méticuleusement, comme s’il s’agissait d’un rituel.

J’ai enfilé la jupe noire que j’avais achetée il y a quelques semaines, si moulante qu’elle semblait fusionner avec ma peau. Elle s’arrêtait bien trop haut sur mes cuisses, laissant mes jambes nues exposées. Puis, j’ai choisi le chemisier transparent que j’avais pris lors de ce fameux shopping où Sabrina m’a surprise. Il laissait voir distinctement ma poitrine, dévoilant chaque détail sans rien cacher.
Pas de sous-vêtements, bien sûr.

Je me suis regardée dans le miroir, cherchant à comprendre ce que mon reflet exprimait. Était-ce de la peur ? De l’excitation ? Une forme de résignation ? Peut-être un mélange des trois.
Mes mains tremblaient légèrement lorsque j’ai attrapé mon sac. J’ai pris une dernière inspiration et quitté l’appartement.

Les 50 kilomètres qui séparaient mon appartement de l’entrepôt sont passés comme dans un brouillard.

La route était déserte, et la monotonie du bitume défilant sous mes roues m’a permis de me perdre dans mes pensées.
Je pensais à Matt, à son sourire, à tout ce qu’on avait partagé récemment. À ce que je voulais lui dire après ce soir. À la vie normale que je rêvais de construire avec lui.
Je pensais aussi à Hector. À tout ce qu’il m’a fait faire, à tout ce que j’ai découvert sur moi-même grâce à lui, mais aussi à tout ce qu’il m’a pris. Et maintenant, je m’apprêtais à tourner la page.

"30 minutes d’avance."
C’était la consigne qu’il m’avait envoyée.

Quand je suis arrivée, l’endroit était exactement comme je l’imaginais.

Un entrepôt abandonné, immense et vide, perdu au milieu de nulle part. Les murs étaient gris et décrépits, le sol couvert de poussière. Une lumière tamisée éclairait faiblement la pièce centrale, créant une ambiance étrange, presque irréelle.
Je suis sortie de la voiture, mes talons claquant contre le sol en béton. Le bruit résonnait dans l’immensité de l’espace, me donnant la sensation d’être minuscule. Seule.

En entrant, j’ai vu une croix tracée au sol, marquée à la craie blanche. Une croix simple, nette, mais étrangement oppressante.

Je savais ce que je devais faire.

J’ai retiré mes vêtements, un à un, jusqu’à me retrouver complètement nue.

L’air était frais contre ma peau, et j’ai senti un frisson parcourir mon corps. Ma respiration était lente, mais chaque inspiration semblait plus difficile que la précédente.

Je me suis agenouillée sur la croix, posant mes genoux exactement sur les intersections des lignes. Le béton froid mordait ma peau, et je pouvais déjà sentir une douleur sourde s’installer. Mes mains étaient posées sur mes cuisses, mon dos droit, mon regard fixé sur l’obscurité devant moi.

"Attends, le temps qu’il faudra."

Ces mots résonnaient dans ma tête, comme un ordre irrévocable. C’était tout ce qu’il avait dit, tout ce qu’il avait exigé. Alors, j’ai attendu.

Les minutes s’écoulaient, interminables.

Le froid du béton sous mes genoux devenait insupportable. Chaque muscle de mes jambes hurlait à l’arrêt, mais je restais immobile. Je ne pouvais pas bouger. Je ne devais pas bouger.

Ma respiration se faisait plus rapide, presque haletante, à mesure que les minutes passaient. L’entrepôt était plongé dans un silence total, à peine troublé par quelques craquements du bâtiment et le léger sifflement du vent à travers les fissures des murs.

À chaque craquement, mon cœur ratait un battement. Et pourtant, rien ne venait.

Mon esprit commença à s’égarer. Je pensais à Matt, à Sabrina, à Maeva. À tout ce que j’avais perdu, et à ce que j’espérais encore sauver. Je me répétais que ce serait la dernière fois. Que cette nuit marquerait la fin de tout ça.

Après ce qui m’a semblé une éternité, un bruit lointain a brisé le silence.

Le ronronnement d’un moteur. Non, plusieurs moteurs.

Je relevai légèrement la tête, mes muscles raides protestant contre le mouvement. Au loin, à travers les grandes fenêtres cassées de l’entrepôt, je vis des phares percer l’obscurité. Une lumière crue et blanche qui semblait presque irréelle.

Mon cœur s’accéléra.

Les voitures approchaient lentement, leurs phares illuminant progressivement l’intérieur de l’entrepôt. Les murs semblaient se resserrer autour de moi, et l’air devenait plus lourd à chaque seconde.

Puis, elles s’arrêtèrent. Trois voitures. Non, quatre.

Le silence retomba, encore plus oppressant qu’avant.

J’entendis les portières s’ouvrir. Un bruit sec, mécanique, suivi de pas. Des bruits lourds, déterminés, qui résonnaient sur le béton.

Mon souffle était court, presque inaudible. Mes mains tremblaient légèrement sur mes cuisses, mais je les forçais à rester en place.

Ils arrivaient.

Le bruit des pas se rapprochait, résonnant dans l’immensité vide de l’entrepôt. J’essayais de deviner combien ils étaient. Six ? Sept? Plus ? Chaque pas résonnait comme un coup de marteau dans mon esprit.

Puis, ils s’arrêtèrent.

Je sentais leur présence derrière moi. Une chaleur humaine, lourde, palpable, contrastant avec le froid du béton et de l’air nocturne.

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