Chapitre 59 : Les messages

3 minutes de lecture

De : Maeva

À : Cloé

22h17 : Maeva :
"Alors, Cloé, tu as fouillé, hein ? Tu as trouvé, je suppose."

22h17 : Maeva :
"Tu te demandes comment, n’est-ce pas ? Comment j’ai fait. Pourquoi j’ai fait. Mais surtout… pourquoi toi. Je parie que tu es assise quelque part, tremblante, avec mon petit journal sous les yeux, en train de te demander ce que tu pourrais me dire si tu avais encore la force de parler."

22h18 : Maeva :
"Tu n’as jamais vraiment réfléchi à ce que tu avais laissé derrière toi, pas vrai ? Marius. Mon frère. Il n’était qu’un gamin, Cloé. Un PUTAIN DE GAMIN. Et toi, tu l’as poussé dans cette rivière. ‘Un accident,’ tu disais. Mais moi, je savais. Je savais que tu n’avais pas tout dit. Tu n’as jamais tout dit, Cloé. Tu te penses meilleure que tout le monde, mais au fond, tu es comme tout le monde : égoïste, lâche, insignifiante."

22h19 : Maeva :
"Tu crois que j’ai oublié ? Que j’allais vivre avec ça toute ma vie, sans rien faire ? Non, Cloé. Moi, je n’oublie pas. Chaque jour, pendant toutes ces années, j’ai attendu. J’ai souri. J’ai joué mon rôle. La meilleure amie parfaite. La confidente. Mais tout ça n’était qu’un jeu."

22h19 : Maeva :
"Hector. Haha. Tu l’aimes, Hector, pas vrai ? Tout ce que tu as fait pour lui, Cloé… Ce que tu as ENDURÉ, ce que tu as RESSENTI. Tout ça, c’était moi. Moi, qui te regardais sombrer, chaque jour un peu plus. Moi, qui écrivais chaque mot. Qui t’attendais derrière chaque message."

22h20 : Maeva :
"Et tu sais quoi ? Je t’ai regardée aimer ça. Ça, c’était la meilleure partie. Te voir plonger dans tes propres désirs, te perdre dans ton propre chaos. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même, Cloé. Tu as fait tout ça parce que tu en avais ENVIE. Moi, je n’ai fait que te donner la corde. C’est toi qui as décidé de la passer autour de ton cou."

22h21 : Maeva :
"Et maintenant ? Qu’est-ce que tu comptes faire ? Te cacher, pleurer, te rouler en boule dans ton lit ? Vas-y, Cloé. Fais ce que tu veux. Ça ne changera rien. Tout le monde t’a vue. TOUS. Ils savent. Ils savent qui tu es. Ce que tu es. Et crois-moi, ils ne l’oublieront jamais."

22h22 : Maeva :
"Oh, et une dernière chose… Le pire dans tout ça, c’est que je n’ai rien inventé. Tout ce que tu es, tout ce que tu fais… c’était déjà là. Moi, je n’ai fait que te montrer le miroir. "

Le téléphone m’échappe des mains, tombant sur le sol dans un bruit sourd. Les mots dansent encore dans mon esprit, se gravent à vif, comme s’ils refusaient de me laisser en paix.

"Je n’ai rien inventé."

Un rire nerveux m’échappe, incontrôlé, comme si mon corps n’arrivait plus à décider entre pleurer, crier ou simplement s’effondrer. J’ai envie de briser quelque chose. De briser tout.

Maeva.

Je tremble. Tout mon corps tremble. Mes mains, mes jambes, même ma poitrine, comme si l’air ne voulait plus entrer dans mes poumons.

Elle a tout prévu. Tout. Et maintenant, tout le monde sait.

Je serre mes bras autour de moi, essayant de contenir cette douleur sourde qui me ronge de l’intérieur. Mais c’est inutile. Elle est là. Elle grandit.

"Tout ça, c’était toi."

Non. Ce n’est pas vrai. Ce n’est pas moi. Mais pourquoi une partie de moi, cette infime partie que je déteste, semble vouloir acquiescer ?

Mes jambes flanchent, et je me retrouve à genoux sur le sol, le regard perdu sur le mur devant moi. Je sens la froideur du carrelage à travers mes vêtements, mais c’est comme si mon corps refusait de répondre.

Je voulais la vérité. Je pensais que découvrir qui était Hector me libérerait. Mais c’est pire.

C’est pire parce que Maeva a raison sur un point. Ce que j’ai fait… ce que je suis devenue…

Je l’ai laissé arriver.

Les larmes coulent, chaudes, brûlantes, inarrêtables. Tout mon être est traversé par un mélange de colère, de honte et de désespoir.

Et maintenant ?

Je me redresse légèrement, une main crispée sur le bord de mon lit, l’autre essuyant maladroitement mes joues. La lumière de ma lampe de chevet vacille légèrement, projetant des ombres étranges sur les murs de ma chambre. Tout autour de moi semble flou, irréel.

Le désordre règne dans ma tête plus que dans cette pièce. Mon sac est jeté dans un coin, mes vêtements forment une pile abandonnée sur le sol, et mon téléphone gît là, sur le tapis, l’écran noir, mais ses mots résonnent encore dans l’air.

Qu’est-ce que je suis censée faire maintenant ?

Je lève les yeux vers la fenêtre, où la lumière blafarde d’un lampadaire éclaire faiblement la rue déserte en contrebas. Le silence de la nuit est presque assourdissant, pesant, comme s’il voulait m’écraser.

Je suis seule. Complètement seule.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Petite Poire ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0