Le voyage extraordinaire du soldat Jacques en Noëlie (4 ème partie)
Sur les routes de Noëlie
— Alors comme ça, Monsieur Jacques, vous êtes représentant d’une fabrique de jouets ? Je croyais qu’ils étaient tous chinois les fabricants !
— Presque tous, heureusement en France nous avons pu sauvegarder quelques ateliers, je représente un groupement de fabricants. Et vous, Rose, vous vous impliquez dans l'entreprise de votre père ?
— Le moins possible, il ne m’a reconnu que tardivement, je considère ne rien lui devoir, ce n’est pas le brave homme que l’on croit, mais un autocrate prêt à tout pour s’enrichir.
— Ah bon ? Que voulez-vous dire ?
— Je veux dire que toutes les combines sont bonnes pour faire du fric. Ici comme ailleurs, les gens riches en veulent toujours plus alors qu’ils sont parfaitement incapables de dépenser tout l’argent qu’ils ont déjà !
— Attention ! hurla-t-elle en freinant brutalement pour ne pas écraser un groupe de lapins. gambadant sur la route.
— Dites-moi mademoiselle, j’adore cette voiture et je ne m’ennuie pas avec vous, mais votre lutin secrétaire m’a dit qu’il y avait plus de deux cents kilomètres jusqu’à la résidence des Fouettard et nous roulons à quarante à l’heure, au mieux, sur le plat, le passage des collines là-bas ne va pas être simple ! Nous n’arriverons pas avant le milieu de la nuit… pour dîner…?
— N’ayez aucune inquiétude, si le temps s’écoule ici beaucoup plus lentement, l’espace également obéit à des lois différentes.
— Ah ! comment ça ?
— Mais oui, cette route passe par ce petit bois juste au sommet de la colline et nous traverserons un trou de l’espace qui nous mènera à la sortie opposée du bois à environ dix minutes de chez les Fouettard. Il y a bien deux cent quinze kilomètres entre mon domicile et le leur mais en traversant le bois nous effectuerons deux cents kilomètres sur dix mètres. La magie de la Noëlie, nous vivons dans un espace-temps différent, une sorte de boucle quadridimensionnelle dans laquelle vit le petit peuple, les lutins, les gnomes, les farfadets, les gobelins, les fées etc… Il n’existe que trois points de contact avec votre monde, les deux postes-frontières terrestres et la fenêtre aérienne au-dessus de la forêt des gnomes.
— J’ai pu constater qu’il y avait un trafic aérien important la nuit et beaucoup de camions passent la frontière sur la route qui mène chez votre père. Vous recevez autant de jouets que ça ? Quasiment tous les jours ! Pourtant la distribution n’a lieu qu’une fois l’an !
— Je ne me soucie pas trop de ça, les réceptions de marchandises, mais on ne reçoit pas que des jouets, on nous livre aussi de la nourriture, des produits de toilette, des boissons… Tenez, par exemple, des milliers de bouteilles de soda, on reçoit aussi du coca en tonneau avec des bouteilles de gaz carbonique, nous avons une petite unité de mise en canette à côté des entrepôts.
La voiture abordait la côte et ahanait de plus en plus devenant si poussive qu’elle sembla sur le point de s’arrêter au moment où nous atteignîmes le sommet.
— Faites bien attention, quand nous arriverons dans cette petite clairière d’ici deux cents mètres, il y aura comme un tremblement léger et nous serons passés de l’autre côté… Hop ! nous y sommes ! Les bâtiments au fond, dans la vallée, c’est la résidence Fouettard.
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Entre gnomes et fées
Bella commença par inspecter son dragon qui ne semblait pas avoir trop souffert. Avec l’aide de quelques gnomes, elle déchargea les paquets et son bagage fixés dessus, puis entreprit de le sortir de la hutte dans laquelle il s’était malencontreusement encastré. Elle contempla alors les dégâts causés au village, deux huttes et le puits situé entre les deux un peu défoncés sous le choc. Il s’agissait de cabanes en partie construites en bois avec une toiture en chaume. Elle se demanda comment réparer puis se souvint de la sorcière Melula, censée être sa correspondante sur place et surtout vivant à proximité. S’adressant à celui qui paraissait être le chef du village, elle lui demanda :
— Je vais vous laisser mon dragon pour un petit moment le temps d’aller chercher Melula pour qu’elle m’aide à réparer vos maisons.
e Sans attendre de réponse, elle partit dans la direction qu’ils lui avaient indiquée et, entre trois gros bouleaux d’au moins 20 m de hauteur, trouva une cabane dont la cheminée fumait indiquant que sa propriétaire s’y trouvait. En arrivant près de la porte, elle se mit à chanter à tue-tête Avec une voix de soprano :
— ♫ Si tu vas à Rio,♪♫ n’oublie pas de monter là-haut ♫ ♫ Dans un petit village ♪
La porte s’ouvrit et Mélula apparut en reprenant avec elle :
— ♪♫ Caché sous les fleurs sauvages, ♫ Sur le versant d'un coteau.♪♪
Elles éclatèrent de rire en s’étreignant. Bella lui conta sa mésaventure espérant qu’elle pourrait l’aider. La sorcière après l'avoir écoutée, réfléchit durant quelques secondes puis :
— Vois-tu, je n’utilise jamais mes charmes, sortilèges et enchantements sans contrepartie, mais pour toi je ferai une exception, allons voir un peu ce désastre. Tu sais que je n’ai jamais pu créer de philtre d’amour ou de sorts d’amour, mais en construction, je suis parmi les meilleures. Lorsque j’étais jeune j’ai fait des études d’architecture aux Beaux-Arts, tu as vu ma cabane, je l’ai réalisée seule, solide, confortable et protégée par les trois bouleaux pubescents. Ah ! nous arrivons, ah oui ! quand même !Tu n'as pas fait dans la dentelle !
— Tu peux m'aider à réparer ça ?
— Sans doute, comme on dit chez nous ce n’est pas sorcier ! Je retourne chez moi préparer deux ou trois petites choses, j’en ai pour une petite heure, en attendant fais évacuer le village et enlève tes affaires de là, ça risque de souffler pas mal.
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Sur la plage
Allongée sur la plage de Mohammedia à trois cents mètres du bureau Interpol situé de l’autre côté du boulevard Hassan II, l’agent Costello se dorait tranquillement au soleil printanier profitant d’un repos bien mérité. Elle rêvassait, imaginant ses collègues de Marseille en course-poursuite avec les trafiquants comme dans « Taxi » ou « Le transporteur » puis elle essaya d’imaginer la capitaine Fleur, qu’elle surnommait mamyfleur, engoncée dans une tenue de ski, couverte d’une chapka, d’un anorak molletonné, d’un passe-montagne et d’une écharpe géante avec trois tours autour de son cou, cette image lui fit étouffer un petit rire moqueur, la pauvre pensa-t-elle.
Elle entendait un bruit curieux et réalisa soudain que son téléphone buzzait dans son sac à côté d’elle, c’était son bureau qui lui demandait par SMS de venir d’urgence. Elle enfila son pantalon et sa chemise rapidement, plia son drap de bain qu’elle rangea dans son sac, mit ses sandales et quitta la plage avec regret, un dernier regard sur la mer, les mouettes, le bel athlète bronzé en train de se pavaner devant les touristes étrangères et elle repartit vers la ville, son bureau et les ennuis qu’elle pressentait.
Elle dut patienter, son chef qu’elle voyait à travers la vitre parlait au téléphone et ça avait l’air de barder. Il raccrocha et lui fit signe d’entrer.
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