Ch.2.2

5 minutes de lecture

III


  Il lui suffit de rebrousser chemin pour arriver devant un beau bâtiment en pierre blanche que la multitude de détails requérant son attention lui avait caché quelques heures auparavant. Son appartenance à l’Ordre des Scientifiques Minérales lui permet d’accéder à de nombreuses facilités, notamment lors de déplacements professionnels comme celui-ci, et cette auberge luxueuse réservé aux chercheurs en voyage à la capitale en fait partie.

Dans le hall d’entrée, qui fait également office de lieu de repos, de nombreuses personnes arborent une pierre épinglée sur leur veste à droite du cœur. Du jaune, violet, bleu, rouge, ou vert, comme la sienne.

20h sonne sur la grande horloge au-dessus de la réception, ce qui fait sortir d’une petite porte à droite de la grande salle deux hommes intégralement vêtu de rouge, d’un veston serré près du corps et d’un pantalon droit terminé par un ourlet impeccable. Ils s’approchent chacun d’une des grandes fenêtres encadrant l’entrée majestueuse de l’auberge, et en descendent une sorte de voile sombre et transparente recouvrant l’intégralité des vitres. Les lumières suspendues de la pièce s’allument une à une, et une impression de douce soirée d’été envahi l’espace en un instant. Dehors, le soleil brûle toujours la ville et pourtant, à l’intérieur il semble être à son crépuscule continuellement.

Alda obtient la 224, qu’elle devra partager avec une consœur scientifique déjà installée depuis deux jours. Une fois les deux étages gravis et le valet portant son bagage remercié, elle découvre une double chambre réunie par un grand balcon commun, offrant une magnifique vue sur l’immense bâtiment de la galerie des arts à quelques parcs d’immeubles de là. Sa colocataire n’est pas ici, malgré le désordre manifeste dans lequel elle a laissé ses affaires.

Elle y aperçoit tout de même une veste blanche parée d’une pierre rouge. Une médecin ? Alda est ravie, l’occasion d’une discussion approfondie avec une Rouge ne s’est jamais présentée à elle.

« Plus que deux jours. »

Lorsque cette pensée lui traverse l’esprit, une boule naissante au creux de l’estomac lui impose de réfléchir à la suite.

Et si elle faisait erreur ? Si elle faisait mieux fait de rester en Dunad, chez elle ?

« Non, faire confiance à la science, et croire en moi afin de sauver le plus de personnes possibles, quoi que le conseil en pense. »

Afin de se libérer l’esprit, elle défait son bagage et range ses affaires de façon ordonnée. Elle pose son carnet sur le petit bureau sous la fenêtre, ainsi qu’un paquet soigneusement entouré, et c’est au moment où elle allait s’y assoir que la porte s’ouvre brusquement.

- Oh ! Bonjour ?

Une jeune femme de petite taille, semblant avoir milieu de la vingtaine, brune coiffée de cheveux courts ébouriffés arrivant juste sous ses oreilles, se présente comme étant la propriétaire du désordre, et colocataire pour un temps.

- Ravi de te rencontrer Bakleha !

- Je t’en prie ! Appelle moi Bak ! J’ai l’impression de me faire engueler par ma mère quand j’entends mon nom complet.

Très rapidement, le courant passe, et les deux femmes décident de passer le temps en continuant à discuter autour d’un verre, puis d’un des bons repas que peu offrir Horlondreg. Bakleha n’en est pas à sa première visite de la capitale, et ce qu’appris Alda par sa curiosité et son empathie, c’est que la fortune de ses parents lui permis beaucoup de voyages, ainsi qu’une place toute faite dans une grande école de science rouge à Bordéan, sur les rives est du continent.

- Il y a pire comme endroit pour ses études ! Au bord de la mer, à bonne distance du soleil, dans une grande ville remplie de choses à voir. Répondit Alda, entre deux gorgés de vin blanc de Dunad.

- Tu parles ! Naître et vivre dans les terres de Dunad, ça c’est le luxe ! Rétorqua-t-elle, ses pommettes rougis par l’alcool, avant d’ajouter :

- Mais tu sais… Bordéan, ce n’est pas comme tout le monde le pense. Tu n’y es pas allé récemment, j’imagine ?

- Non… ?

- Depuis que l’Empire à réquisitionné la majorité du port pour alimenter le conflit en Vardola de l’autre côté de la mer, la ville a bien changé de visage. Et pourtant, je ne suis pas bien âgée, mais j’ai eu le temps de m’en rendre compte.

Alda ne sourit plus, elle écoute attentivement la jeune médecine.

- Depuis plusieurs mois un couvre-feu nous oblige à rentrer avant 22h, nos cours pratiques se sont transformés en service obligatoire, et je ne compte même plus le nombre de chevaliers-soldats que j’ai dû recoudre, sans compter…

L’ambiance change radicalement, autant que le visage de la petite Bak s’alourdit subitement. Elle détourne le regard, ses doigts sert son verre comme un ancrage face à la tempête intérieure.

- J’ai que 24 ans... Je pensais jamais... voir autant de gens mourir devant moi.

- Bak…

La jeune femme essai tant qu’elle peut de contenir un sanglot qui pourtant éclate intérieurement. Un silence lourd s’installe.

- Et qu’est-ce que tu es venu présenter au conseil ?

Alda remarque que le changement de sujet qu’elle propose à un effet immédiat sur la médecine, ses yeux se recentrent, elle avale d’une traite son verre avant d’enchainer, l’air de rien :

- Je me suis passionné pour mon sujet d’examin final, et j’ai voulu l’approfondir bien au-delà de la consigne initiale. Tu as entendu parler de la folie solaire ?

- Oui bien sûr ! Quel horreur…

- Et bien, j’ai sûrement trouvé un remède. Mais le seul moyen de le mettre en place est de mobiliser des ressources et du personnel. Je pense qu’une dose doit être administré à chaque personne habitant dans la zone à risque des rayons solaires.

- Mais ça demanderait tellement de temps et d’argent !

- Je sais, j’ai déjà réfléchi à tout. Maintenant, il ne me reste plus qu’à exceller demain pendant ma présentation devant le conseil.

- Tu m’impressionne Bak, à ton âge…

- Et toi Alda ? Pourquoi est-ce que tu es venu à la capitale ?

- Moi ?...

La tension dans le creux de son estomac grandissait. La sensation désagréable est peut-être signe qu’elle fait bonne route. Comme elle peut-être une intuition de danger imminent. Mais son courage et sa persévérance lui dicte d’aller de l’avant, quoi qu’il arrive. Elle sait qu’elle peut résoudre un des grands malheurs de cette époque, même si pour y arriver, elle doit proposer au conseil d’enfreindre une de leur plus grande règle.

Les expérimentations qu’elle a toujours menées en secret doivent être connus de tous, pour le bien de tous.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Ben W ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0