Chapitre 2. La rencontre

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Il l’avait suivi dans les méandres des couloirs de l’hôpital, ils finirent par arriver à la maternité. Des cris d’enfants retentissaient, des rires… Sur le chemin, ils avaient croisé des gens souriants, oui, ceux qui venaient rendre visite à un membre de la famille ou des amis qui venaient de mettre au monde un enfant désiré… Pas son cas à lui ; parachuté « père » en cette matinée d’avril… Le 21 avril, pas le 1er avril… Même pas un énorme poisson d’avril. Louis était perdu, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait.

Une fois arrivé au niveau du bureau des sages-femmes et des infirmières, Mme Rosenoir avait présenté Louis avec un sourire qui n’avait en rien trahi le souci dont elle allait devoir faire part à l’équipe par la suite :

— Bonjour Mesdames, voici Monsieur Leblanc, le papa de Madeleine.

Divers commentaires avaient fusé : « Ah ben, elle tient vraiment de son père, on ne peut pas le louper ! Le roux a dominé ! », « Oh oui, elle a les yeux de la même forme ! », « J’espère que cela ira Monsieur, ne vous inquiétez pas, elle est sage comme bébé ! », « Vous avez déjà préparé tout ce qu’il faut chez vous ? Pour les bibis et les couches ? Parce que cela va vite à cet âge-là ! »…

Une sage-femme lui avait tendu un bambin criant et avait tenté de le lui mettre dans les bras.

— Tenez, la voici !

Louis avait fait un pas en arrière, en oscillant de la tête, en murmurant tout bas,

— Non, non…

En regardant le bébé qu’on lui avait tendu, un bébé bien rouge à force de pleurer, mais roux, d’un beau roux, avec beaucoup de cheveux… Comme dans sa famille, comme les enfants de sa sœur… Il avait articulé de manière plus audible,

— Non, non, ce n’est pas possible…

Il avait détourné la tête de l’enfant qu’il portait dans ses bras. Les yeux baignés de larmes, il avait eu envie de hurler.

Interloquée par son comportement, la sage-femme s’était inquiétée,

— Et, Monsieur, vous êtes sûr que ça va ? Asseyez-vous, vous êtes tout blanc !

Elle avait ensuite interrogé Mme Rosenoir du regard, tout en fronçant les sourcils…

— C’est quoi cette scène ?

Mme Rosenoir était alors intervenue, sur un ton sceptique ;

— Apparemment, M. Leblanc n’était au courant ni de la grossesse, ni de l’accouchement d’Églantine, enfin, c’est ce qu’il prétend.

Face aux soupçons de l’assistante sociale, Louis avait vivement réagi :

— C’est la vérité, je ne sais pas qui est cette Églantine ! Je ne comprends pas comment cette enfant peut avoir un air de famille avec moi ! Mais j’aimerais comprendre, votre clinique effectue-t-elle des tests de paternité rapide ? Vous savez, ceux qui sont faits en 2 jours, je suis prêt à payer un supplément pour que cette affaire soit tirée au clair.

Dans ses bras, l’enfant avait gigoté, le rappelant à la réalité de la chose. L’équipe lui avait alors indiqué qu’ils allaient discuter immédiatement de cette situation problématique. Après quelques coups de téléphone, il avait vu plusieurs personnes arriver et rejoindre les autres dans le bureau, après l’avoir détaillé au passage. Ils l’avaient laissé seul, dans le couloir, avec l’enfant dans les bras.

Fatigué par ce qu’il était en train de vivre, il avait fini par s’asseoir sur l’une des chaises présentes dans le couloir. De ce poste, il pouvait voir le staff qui s’était réuni autour de son cas, les sages-femmes, les infirmières, le pédiatre de l’enfant, l’assistante sociale… Il lui avait semblé que cela discutait ferme ! Puis, cela s’était calmé et une des sages-femmes était venue vers lui, en s’arrêtant devant l’un des tiroirs pour en extraire deux écouvillons pour le prélèvement ADN.

— Monsieur Leblanc, voilà, la clinique dispose d’un laboratoire permettant d’obtenir les résultats ADN en 48h, nous appliquerons donc cette procédure express pour le prélèvement que je vais vous faire à vous et à Madeleine.

Elle lui avait demandé d’ouvrir la bouche et avait frotté l’intérieur de la joue pour obtenir quelques cellules épithéliales. Elle avait ensuite fait de même avec Madeleine, mais avec beaucoup plus de douceur. Une fois les échantillons en lieu sûr, elle lui avait indiqué, sèchement,

— Voilà Monsieur, vous serez fixé dans 48h, l’équipe peut se permettre de garder Madeleine encore 48h, malgré le fait que sa mère ne soit plus hospitalisée. Mais pas plus.

Elle lui avait alors repris Madeleine des bras, la berçant tout doucement, en chantonnant et en la rassurant, alors que Madeleine pleurait.

— Ma pauvre puce, t’y peut rien toi… Mais oui, c’est triste, mmh… Vas-y, exprime-toi ma petite.

De retour chez lui, Louis était toujours dans un état second… Cinq minutes plus tard, quelqu’un avait sonné à la porte, c’était Éric, son ami, accompagné de Sarah, sa compagne.

Arrivé à l’étage, troisième sans ascenseur, Louis les avait fait rentrer et leur avait indiqué le salon… Puis s’était affalé dans l’un des fauteuils restés libres et avait tenté d’expliquer ce qu’il venait de vivre.

— C’est une histoire de fous, cette petite ressemble beaucoup à mes nièces, c’en est affolant !

Dans le brouillard, Éric s’était enquis,

— Et quoi, c’est quoi cette histoire d’abandon et de paternité ? T’as signé des papiers sur place ?

Curieuse et inquiète, Sarah lui demanda,

— Explique ce qu’il s’est passé, Louis, c’est quoi cette histoire, tu la connaissais cette fille ?

Louis leur avait raconté l’entrevue avec l’assistante sociale, la reconnaissance de paternité qu’il aurait signée, la confrontation avec le bébé… Et l’équipe de la maternité, qui semblait plus au courant que lui de « qui » il était et de ce qu’il devait « assumer ».

— Dans 48h, je serais fixé, ils verront bien que cet enfant n’est pas de moi, je pourrais contester cette reconnaissance que je n’ai jamais signée et la vie pourra reprendre son cours… Et dans un an, on s’en rappellera comme de la bonne blague de l’année !

De son côté, Sarah, travaillant dans un bureau d’avocat, mais dans le secteur immobilier, avait commencé ses recherches : oui, une femme pouvait abandonner son enfant sous certaines conditions, et c’est ce que cette Églantine semblait avoir fait. Par contre, ce qui l’inquiétait plus, c’était cette reconnaissance de paternité qui avait été faite devant notaire et qui, selon l’assistante sociale, semblait authentique. Elle avait tenté d’obtenir plus de détails de la part de son ami.

— Louis, te souviens-tu de la date qui figurait sur l’acte ? Histoire que tu puisses vérifier ton emploi du temps pour ladite date, lorsque tu voudras contester l’authenticité de cette reconnaissance de paternité.

— Ouf… Euh, en janvier, je crois, dans les 20, mais je ne suis plus sûr de la date…

Sarah avait repris, très sérieuse :

— Un conseil, lorsque tu retourneras chercher les résultats dans deux jours, demande à obtenir l’original ou une copie de cette reconnaissance de paternité. Il va te falloir trouver un avocat spécialisé dans les affaires familiales, je vais voir ce que je peux faire au bureau, certains connaissent peut-être de bons éléments.

Les trois amis avaient terminé la soirée autour d’un bon repas, relativement sereins.

Louis était néanmoins resté avec une montagne de doutes et avait passé une mauvaise nuit, cette situation lui trottait en tête ; qui était cette Églantine ? La petite Madeleine lui avait étrangement fait penser à ses nièces, un air de famille ? Mais bon, il n’était pas le seul roux sur terre ! Qu’avait-il fait en juillet de l’année d’avant, il n’avait pas souvenir d’avoir eu une liaison, ni même une aventure… Alors comment avait-il fait pour féconder cette dénommée Églantine ?

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