106 - déambulation
Vendredi 14 Août 2116. Le soleil se lève et on fait l’amour. Je me retiens de jouir, j’ai besoin de toutes mes forces. Je la laisse récupérer et je l’embrasse sur la joue :
- Je reviens vite, soleil de ma vie, mon fruit défendu, je t’aime.
Je me réfugie vite à l’ombre de la Cathédrale. Il fait déjà chaud. J’entre par la petite porte sur le côté, directement en face de la Chapelle. Il fait frais. Ça sent la pierre sacrée. J’inspire profondément et je ferme les yeux. Je m’approche à tâtons et et je trouve les barreaux. J’ouvre les yeux et je regarde la statue de Jeanne. Même elle, elle regarde Greta, qui regarde en haut. J’entre et je me place dans l’axe de son regard. On ne voit rien. C’est le toit. Sombre. D’ailleurs c’est bizarre, il n’y a qu’à cet endroit où il fait nuit, là où regarde Greta. Mais je sens le regard de Jeanne sur moi. Ça me met mal à l’aise, je ressors vite de là, de la Cathédrale et de son ombre pour le réchauffer au soleil. Je me retourne et je regarde les pierres blondes de cette masse de Dieu. J’aimais bien toute cette spiritualité. Mais je crains que ce ne soit plus possible. Je dois renoncer à ma Foi, avoir l’esprit clair pour savoir qui je suis et où je vais, sans artifices. Il y en a marre des histoires. Je ne veux pas qu’on me raconte la mienne. Et je n’ai pas envie de revoir Greta non plus. Je me rappelle de Victoria. Elle m’aimait bien. Izzy me l’a présentée. Elle me considérait comme si je faisais partie de la famille. Je me souviens de ses regards sur moi et de ses phrases bizarres. C’est comme si à l’époque elle savait déjà. Elle baigne à fond dans l’Invisible et dans la religion aussi. Il lui faut au moins ça pour survivre à son histoire torturée. Mais où est-elle ? Elle a disparu de la circulation. Elle se fait discrète depuis la B4. Alors je vais voir celle qui peut me mettre en contact avec elle. J’arpente les couloirs éteints de son école en regardant les peintures étranges au mur. Et soudain elle est là au bout du couloir. Je l’appelle :
- Izzy ?
- Bri ? C’est toi ? J’ai cru que c’était un fantôme.
- Tu es toute seule, ici, dans le noir. C’est triste. Viens, je te ramène à la vie, à la ville. Il ne faut pas rester ici Izzy. Tout ça, c’est fini. Et Sabine a disparu.
- Non, elle est en vacances, avec Adèle, sur une île.
- Ah bon ? Cool. Tant mieux. Bref, je suis venue pour…
- Victoria. Elle m’a appelée. Elle m’a dit que quelqu’un allait venir me demander, la demander. Mais elle ne savait pas qui.
- On s’en fiche Izzy. Le plus important c’est toi.
Je lui prends la main et je ne la lâche plus jusqu’à Laguna City.
Annotations
Versions