Les meilleurs moments
N'y pense pas. N'y pense pas. Respire. Pense à autre chose, me dis-je intérieurement. Ce couloir me semble immense. Chacun de mes pas est hésitant, comme s'il refusait d'admettre la réalité à laquelle je suis confrontée. Pense à autre chose. Pense à de bonnes choses. De bons moments.
J'ai revu cette fille, Méline, une semaine après notre rencontre. C'était une soirée qu'elle avait organisée chez elle. Il devait y avoir beaucoup de monde. Tous ses amis à vrai dire. Mais quand je suis arrivée sous le porche de sa maison et qu'elle ouvrit la porte, c'est un tout autre accueil qu'elle m'avait réservé. Pizza, cocktails maisons, musique lounge et baisers furent les maîtres des lieux.
Des baisers. Surtout des baisers. Et puis, rapidement, il y eut notre première fois ensemble. Un rêve devenu réalité pour ma part. C'était tellement agréable. Son corps nu contre le mien, sa langue qui parcourait ma peau, ses doigts qui effleuraient des zones encore vierges de mon corps ; une alchimie parfaite dans un instant magique.
Un instant magique qui, une fois que nous avions fini, fut immortalisé par plusieurs clichés au polaroid. Des rires, des selfies improbables et dans le lot, une magnifique photo de nous. Nous en avions profité pour la coller sous sa planche de skate, juste à côté de la gravure de mon nom.
C'est alors qu'elle eut une idée originale et romantique. Cette planche serait notre Storyboard ; le scénario de notre vie retracé sur cette planche de skate. Le but était alors de vivre le plus de choses pour que cette planche déborde de souvenirs et qu'à la fin, s'il y en avait une, elle puisse raconter notre magnifique histoire.
Alors nous avons vécu tout ce qui pouvait l'être durant ces deux dernières années. Notre Storyboard était déjà bien remplie : dessins, photos, autographes, peintures, rayures, empreintes et traces de rouge à lèvres laissées par nos bouches avaient transformé cette planche à roulettes en une véritable œuvre d'art. L’œuvre de notre vie. L’œuvre de notre amour.
J'arrive enfin à l'extrémité du couloir, giflée par la réalité qui me réveille de cet état hypnotique. Il faut que je pousse cette porte. La porte de sa chambre. Il faut que je la voie. Pour la dernière fois. Méline.
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