Chapitre 54: Maria
- Les enfants ! À table !
Alors que l’orage se déchaînait au dehors, une douce chaleur imprégnait le salon. Une chaleur si agréable que Maria n’avait qu’une seule envie: dormir. Mais elle n’était pas venue jusqu’ici pour se reposer sur ses lauriers. Le problème c’est qu’à force d’utiliser ses aptitudes à tout bout de champ, son corps pesait lourd et ses paupières avaient du mal à rester ouvertes.
Ces gosses qui piaillaient tout autour n’arrangeaient rien. Il ne lui aurait suffi que d’un seul geste, un seul regard pour qu’ils aillent tous prendre un couteau dans la cuisine et se coupent la gorge…
Ce ne serait pas très courtois, pensa-t-elle.
Et puis son rôle était de trouver une de ces fameuses clés. Pas de faire une boucherie. Il ne faudrait pas qu’elle la tue par accident.
Une énergie impressionnante émanait de la pièce où elle se trouvait. Maintenant c’était le jeu des devinettes. Qui cela pouvait-il bien être ? La mère ? Ha ! Cette stupide petite effrontée ? Le père alors ? Hmm… Non. Et ces gamins qui ne savaient rien faire d’autre que lui taper sur les nerfs ? Si seulement elle pouvait tous les massacrer. Un par un…
Mais alors d’où pouvait bien venir cette puissance effroyable dans ce cas ?
Pfff… Maintenant elle devait se farcir un dîner de famille. Elle n’avait pas signé pour ça. En plus, elle devait récupérer l’autre abruti au passage. Forcément, il avait encore oublié qui il était et s’était enfui. Comme si elle n’avait que ça à faire. Pour l’heure, elle se contentait de sourire comme une imbécile parce que c’est ce qu’on lui avait ordonné de faire. Quelle blague…
- Au menu ce soir : soupe aux poireaux !
Maria détestait les poireaux. Encore plus inutiles que les humains. Ce monde n’avait déjà aucun sens, mais les poireaux étaient une aberration. Ils ne tenaient d’aliment que le nom.
La femme posa une assiette creuse pleine à ras bord juste devant elle.
”Oh ! Ça fait beaucoup dis donc ! Je ne suis pas sûre de tout finir ! s’exclama Maria.
- Moi, je pense que vous allez finir votre assiette. Et même que vous en redemanderez !
- Faites attention à ne pas vous brûler la langue, les enfants ! prévint le père.”
Je me demande ce que ça fait d’ébouillanter quelqu’un, se demanda Maria.
Elle leva une première cuillère à sa bouche et goûta. Atroce.
”Dommage que Fabien ne soit pas encore là, il rate quelque chose !”
De toutes façons, il risque de rater pas mal de choses.
”Je vous l’avais dit ! Vous ne pouvez pas ne pas aimer ! Qui n’aime pas les poireaux après tout ?”
Haha, oui. On se demande bien qui.
”Mais au fait Maria, qu’est-ce que tu fais dans la vie ? commença Amir.
- Eh bien… rien de véritablement transcendant. Mon travail n’a pas de réel intérêt. En tant que secrétaire je m’occupe de toute la paperasse inintéressante et je passe mes journées à noter les dates importantes, les réunions, les meetings, les repas d’entreprise… Pour être honnête, j’aurais voulu faire quelque chose de totalement différent. Mais bon, ça paye bien et je ne refuse pas l’argent qui rentre. De temps en temps, je me permet même des folies.
- Des folies ? C’est-à-dire ? demanda Aurélie.
- J’achète des vêtements, beaucoup de vêtements. Je n’en ai pas besoin d’autant mais je me lasse vite. Il me faut du changement. Ça me permet d’oublier quelques instants que ma vie est monotone.
- Madame, c’est quoi votre dentifrice ?
- Timéo ! C’est quoi cette question ? s’exclama Amir.
- Haha, non c’est bon. Ça me fait rire.”
Oui, énormément rire.
”On me le demande souvent. Mais mes dents sont comme ça au naturel.
- C’est vrai qu’elles sont très blanches quand même ! s’étonna Aurélie.
- On dirait une star de la télévision ! renchérit Amir.”
Ce repas commençait sérieusement à fatiguer Maria encore plus qu’elle ne l’était déjà. Ces amas de chair sans intellect lui tapaient sur le système avec leurs questions stupides. Elle prendrait un malin plaisir à les exécuter une fois tout cela terminé.
C’était cette seule perspective qui lui donnait assez de patience pour ne pas céder.
- Merci, c’est gentil.
Elle esquissa un sourire.
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