chapitre 2
Savoir observait les nuages sous le soleil ardant de cette fin d’été. La chaleur glissait sur son corps, faisait perler des gouttes sur sa nuque. Bientôt, il reprendrait avec sa sœur, Cécilia, la route de l’école, et pas n’importe laquelle. Féral, le lycée le plus prisé au monde. Où seul l’élite intellectuelle pouvait trouver sa place, peu importait son rang ou son royaume. C’était une expérience à ne pas minimiser. Savoir demeurait inquiet quant à son entrée. Sa sœur, elle, en était tout excitée. Elle ne cessait de parler à tort et à travers. Parfois, il lui arrivait de rire de joie au beau milieu du silence.
— Lycéen ? marmonna Savoir, entre ses larges et épaisses lèvres.
Une sensation bizarre naissait sous sa peau à cette idée. Il lui sembla grandir trop vite. D’ici trois ans, il serait considéré comme adulte. On ne lui pardonnerait plus aussi essaiment son comportement lointain. Il devrait apprendre à se mélanger à la masse humaine, paraître aux yeux des autres comme un homme équilibré. Le serait-il ?
Le changement avait tendance à l’intimider et les échanges sociaux l’oppressaient quelque peu. Savoir n’aimait pas qu’on chamboule ses habitudes. Il préférait suivre sa routine habituelle, ce que lui avait programmé pour sa journée.
Redressé du sable où il était allongé, il plissa ses yeux en amande d’un rouge vif et les déposa sur les ondulations de la mer. Une musique claquante s’envolait des rouleaux écumeux. Ils se formaient, s’écrasaient, se noyaient. Savoir y chercha l’inspiration pour un prochain poème qu’il pourrait intégrer dans son recueil qu’il dédierait à sa mère. Bientôt la mer se calma. Il la fixait inlassablement prêt à entendre une voix venue d’ailleurs. Une voix qui parlerait avec lui d’un monde étrange. Un monde qu’il pourrait retranscrire en mots.
Son regard fureta sur les vagues presque inexistantes. L’eau était désormais comme de l’huile, plate.
Savoir se leva de toute sa hauteur, et c’était peu dire. Il frôlait lui et sa sœur le mètre quatre-vingts, quant à sa mère, Raison, elle devait avoisiner les deux mètres de haut, facile. Une famille de géant dont seul le grand-père était aussi petit qu’une table basse.
Marchant sur le sable, Savoir soupira, il détailla les passants qui longeait l’eau, puis il tourna la tête vers la maison familiale d’un bleu aussi pastel que l’éther. Son grand-père, Confidence, faisait une petite sieste sur la terrasse. Quand ils étaient petits avec sa sœur, ils aimaient compter les rides sur le visage du petit homme. Avec le temps, ils ne lui prêtaient qu’une œillade pour constater s’il respirait toujours. Quoi de plus normal, quand ce dernier avait failli s’étouffer avec sa langue une année auparavant, pendant une sieste. Cette frayeur qu’ils avaient eue !
Raison, leur mère avait secoué Confidence comme s’il s’était agi d’un petit enfant. Elle l’avait soulevé comme un rien et avait fourré ses doigts pour récupérer la langue.
Savoir restait souvent impressionné par la force de sa mère. Force que sa sœur possédait aussi…
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