J'ai le mal de
J’ai le mal du pays
dans ma propre maison
oppressées mes idées
mes envies de liberté
je ne cesse de m’entendre
hurler
j’étouffe
dans ma propre maison
ma maison
sans maison
ma maison
sans être mienne
certains l’appellent chez-soi
moi, je ne l’appelle pas
J’ai le mal de mer
dans ma propre maison
navire rassurant
qu’offrent ma chambre et son lit
fermer ma porte
sur leur voix, leur cri, leur vie
rêver de naviguer
sur un autre chemin
que le leur
éviter les vagues
jouer à cache-cache dans le sable
pour fuir leurs mots
et mon agacement
mon cœur qui étouffe
d’être aussi près des leurs
J’ai le mal du pays
dans ma propre maison
ma fenêtre n’offre que
le vent, le gris et l’ennui
le verrou de ma porte
ne me retire pas mon malaise grandissant
comme si les murs étaient imprégnés
de tout ce qui fait
que je ne les supporte plus
ma chambre transpire le STOP
STOP
STOP
j’ai le cœur qui s’affole
les larmes qui s’endorment
et la colère qui s’agrandit
mal au corps dans cet endroit
qui ne m’offre que du réconfort
quand je suis seule à l’habiter
J’ai le mal de mer
dans ma propre maison
j’ai accepté
d’y noyer mon être
j’ai déposé ma patience
et tendu ma main
vers mon corps fatigué
d’avoir l’impression
d’être un enfant imparfait
raté
qui ne comprend pas cette hargne
qui vient l’habiter
quand l’instant se passe
aux côtés des personnes
de sa propre maison
je tends mes incompréhensions
à cet être adolescent
qui s’en veut de détester
de juger, de délaisser
la famille qui l’a élevé
Pourquoi les gens de ma maison
ne sont pas des biens-aimés ?
Pourquoi ma maison ne me semble
pas mienne ?
Pourquoi les personnes que j’ai choisies sont ma famille ?
Et non pas celles qu’on m’a imposé à vie ?
Pourquoi je ne me sens nulle part
chez-moi ?
J’ai le mal de moi
dans ma propre maison
je me quitte, je me romps
j’expie mes silences
que j’avais avalés
par cette soudaine lave
qui s’agite dans mes veines
il y a eu des rires
dans ces murs assiégés
assiégés de mes larmes
assiégés de cette lave
je suis comme un raz-de-marée
je pensais qu’ils étaient responsables
de toutes ces vagues qui m’agressaient
ce n’était que le pâle reflet
de mes sentiments dévorés
la vague est mienne
je suis la vague
et c’est sur eux que je me déploie
que j’emporte
je ne leur offre que mon mal de pays
mon mal de mer
mon mal de moi.
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