Je me rappelle du parfum sucré des frangipaniers,

Des bracelets de zinc enlaçant les cocotiers,

Du ponton défraîchi de la maison, les pieds dans le lagon,

Des navires de croisière loin derrière le récif.

Je me rappelle de l'eau huileuse échappée du catamaran,

Des patates de corail entre lesquelles il louvoyait,

Des bernard-l'hermite grouillant sur les motus,

Du bleu cristallin de leurs eaux tropicales.

Je me rappelle les fêtes de l'école sous le préau,

Des colliers de tiare et des couronnes de cordyline,

Des tenues fleuries et des chants traditionnels,

De la messe ennuyeuse à l'église le vendredi midi.

Je me rappelle du vent avant la tempête,

De la boue et des inondations,

Des maisons effondrées et troncs cassés,

De l'eau sombre qui s'écoulait du robinet.

Je me souviens de la sieste forcée entre midi et deux,

Des congolios dans les toilettes de l'école,

Des urus, corossols et caramboles,

Du mont Temehani et de ses cochons sauvages.

Parfois je rêve de cette autre face de la terre,

De l'île sacrée où j'ai grandi.

Sache que malgré mon mutisme,

Je pense à toi, toujours.