Chapitre 13
Hana
Reda est appuyé sur le comptoir, un sourire au coin. Il échange quelques messes basses dont le contenu m’échappe avec la tenancière de l’épicerie. Pour être honnête, je ne m’attendais pas à ce que la propriétaire soit une femme. Plutôt jeune, en plus.
Assise sur un tabouret en bois qu’on m’a soigneusement apporté après que Reda ait expliqué la situation à l’équipe, je les scrute tous les deux d’un œil discret. Elle possède de longs cheveux blond platine lisses, des yeux en forme d’amande et à la couleur marron du fruit, ainsi qu’un rouge à lèvres carmin contrastant avec la pâleur de sa peau. Impossible de le nier, c'est une très belle femme.
Le visage de Reda, lui, est ouvert. Il discute avec son interlocutrice tout en esquissant de longs mouvements de bras, comme pour lui expliquer quelque chose. Je n’en suis pas sûre, mais j’ai l’impression qu’il est en train de lui raconter ses derniers exploits sportifs, au city stade. Ce qui est plutôt déroutant. Parce qu’à ma connaissance, il n’est pas spécialement bavard, et encore moins véhément. Ils doivent vraiment bien s’entendre…
Je me redresse légèrement de ma chaise et je croise les bras. Avant d’arriver à l’épicerie, nous sommes retournés vers le terrain où s’entraînaient les camarades de Reda. Il tenait absolument à les réprimander pour leur attitude négligente et il a insisté pour que je l’accompagne, – pour les mettre devant le fait accompli, selon ses mots –, alors j’ai fini par le suivre. C’est à ce moment là que j’ai compris que c'était lui qui dirigeait l'équipe aujourd'hui. En tant que leader, il s’est déplacé jusqu’à moi, lorsque le ballon m’a percutée, pour prendre la responsabilité de l’acte sur ses épaules. Même s’il n’était pas à l’origine du lancer. Parce qu’en tant que leader, il aurait dû être capable d’éviter une telle situation, selon ses mots encore une fois.
Pour autant, les garçons se sont davantage focalisés sur la présence féminine que je représentais, à ses côtés, plutôt qu’aux sermons que ce dernier leur adressait. Entre les regards en coin et les messes basses, certains membres n'ont pas fait l'effort de masquer leur curiosité. L'un d'entre eux, Osman je crois, ne s'est d'ailleurs pas gêné de m'assaillir de questions, toutes plus douteuses les unes que les autres, pour tenter de percer mon identité. Et même si j'ai tenté de nier leurs suspicions avec des explications solides, chaque interrogation résolue s'est soldée par une autre question. Si seulement Harûn avait été là, lui aurait pu appuyer tous mes propos !
Lassée, j'ai donc fini par me résigner à me taire, laissant Reda régler le souci à sa manière. Ce qui a été tout sauf concluant. Parce que de son côté, il n’a réfuté aucune des suspicions, s'amusant officieusement de la situation. Et ça n'a pas manqué de me faire fulminer intérieurement.
C'est vrai. Je ne veux pas que ces garçons pensent que je suis en couple. Encore moins avec un tel énergumène. Et je ne veux pas non plus risquer qu’une telle information parvienne aux oreilles de mon ainé !
Néanmoins, cette petite altercation a eu le mérite de me certifier que Reda n’était pas en couple. Et la culpabilité de mon attitude envers la serveuse d’Okinawa s’est automatiquement dissipée, accompagnée d’un sentiment de soulagement dans mon cœur dont je ne saurais expliquer l’origine.
- À quoi est-ce que tu penses ?
La voix du brun me ramène instantanément à la réalité.
Je relève le regard pour lui faire face. Il me tend alors un paquet de glace emballé dans un torchon humide que je m’empresse d’attraper, avant d’ajouter :
- Pas à toi, en tout cas.
Oh non.
Bon sang.
Mais pourquoi est-ce que je lâche toujours de telles absurdités ?
Il me toise un instant, avant de glousser.
- Euh, merci… je bredouille pour tenter de me rattraper. Pour la poche de glace.
- C’est elle qu’il faut remercier.
Il me désigne du doigt la propriétaire de l’épicerie, qui me décoche un clin d’œil au moment même où mes prunelles croisent les siennes. Je la gratifie d’un sourire, en retour. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais cette femme m’intimide et je n’ose pas lui parler. Alors je me contente de mon sourire, en espérant qu’elle ne me prenne pas pour une ingrate.
- Laisse poser la poche pendant au moins un quart d’heure, ajoute-t-il.
- D’accord.
J'obtempère et un silence s'ensuit dans la salle.
Je ne sais pas quoi dire, ni quoi faire pour le rompre, alors je me contente de fixer le sol, tout en me pinçant la lèvre inférieure d'un air penaud.
- Hana ? Est-ce que tu as très mal ?
Reda me pose cette question en me considérant pendant un long moment.
Il s'est agenouillé pour se mettre à ma hauteur, un air inquiet sur le visage, et je réprime un cri de surprise en constatant la distance quasi inexistante nous séparant à cet instant. Mais vu l'expression neutre qu'il arbore, je dois probablement être la seule à en être déboussolée.
- Non ! je m'exclame alors. Je vais bien, je vais très bien !
Il est proche.
Vraiment proche.
Les effluves de son parfum, – des notes de pomme, de vanille et de noix de muscade, entrelaçées d'une pointe boisée et ambrée apportant de la virilité au mélange –, viennent effleurer mes narines. L'odeur est singulière, mais elle n'en reste pas moins agréable. Je dirais même qu'elle est attrayante.
- Tu es sûre ? On peut faire un tour à l'hôpital, dans le doute. Ce n'est pas très loin d'ici.
- Non. Je t'assure que ça va.
Je me racle la gorge, timidement.
- Je crois qu'il me faudrait seulement un peu d'eau.
Le brun me sonde un instant, sceptique, avant de se relever et de se diriger de nouveau vers le comptoir. Il s'adresse alors à son amie qui me lance instantanément un regard curieux, avant de sourire et de disparaître à l'arrière de la boutique. Je ne sais pas vraiment comment interpréter sa réaction, mais je commence à me sentir embarrassée de la déranger autant.
Au bout d'une minute, elle réapparait, une bouteille d'eau en plastique à la main. Elle me la tend alors et je m'empresse de la dérober, avant d'ajouter d'une voix chevrotante :
- Merci beaucoup, Madame...
Elle grimace alors, avant de froncer les sourcils et de poser les mains sur ses hanches, comme pour se préparer à me faire un reproche.
- Véronika. Pas de Madame avec moi.
J'arque un sourcil, l'air surpris.
- D'accord... euh, Véronika... Je suis désolée pour le dérangement.
- Un dérangement ? s'indigne-t-elle alors. Mais de quel dérangement est-ce que tu parles ?
Je continue de la fixer, stupéfaite par sa réaction.
- Tu es l'amie de Reda, non ? Et les amis de Reda sont mes amis !
Je ne suis pas certaine que le terme "amis" soit le plus approprié pour définir notre relation.
- Alors sache que tu es la bienvenue ici, jeune fille ! Dobro, comme on dit chez nous !
Dobro.
Cette femme est donc russe.
Je comprends soudainement mieux l'origine de sa beauté à couper le souffle.
Je m'apprête alors à la remercier de nouveau, lorsqu'elle m'interrompt dans mon élan :
- Mon amour, je compte sur toi pour la mettre à l'aise !
Quoi ?
Mon amour ?
- Vé ! Tu recommences avec ça !
- Quoi ? Tu as honte ? Alors que je t'ai déjà vu nu ?
Oh mon dieu.
- Vé, bordel !
Sur ces mots, mes joues prennent feu.
Je crois que je m'attendais à tout sauf à ce que Reda ait un penchant pour les femmes un peu plus âgées. Peut-être que c'est pour cette raison qu'il n'a pas cherché à réfuter les suspicions des garçons, au city stade. Pour masquer ses véritables penchants.
- Hana ! Ne l'écoute pas !
Reda me fixe, les sourcils froncés.
Mon expression hallucinée doit probablement l'avoir alerté.
- Tu... tu fais ce que tu veux, tu sais... je murmure alors, déroutée.
Sur cette remarque, il écarquille les yeux de stupeur et Véronika s'empresse de s'esclaffer.
- Quoi ? Tu crois vraiment que j'ai envie de me taper cette vieille peau ?
Vieille peau ?
Il y va un peu fort, là !
Surtout que Véronika est loin de paraître âgée.
- C'est mon ex-nourrice, Hana !
- Quoi ?
Sur ces mots, mes membres crispées se relâchent.
Je me contente de les fixer, complètement choquée par cette révélation, mais également honteuse. Véronika m'adresse alors un sourire avant de rajouter :
- Pardon Hana, je n'ai pas pu m'en empêcher... C'est ma blague préférée !
- Tu parles d'une blague ! s'offusque Reda en la toisant.
- Toi par contre... murmure-t-elle en se retournant vers le brun, la prochaine fois que tu m'appelles vieille peau... je te garantis que...
Elle n'a pas le temps d'achever sa phrase que la sonnerie de la boutique retentit, indiquant l'arrivée de nouveaux clients.
- Sauvé par le gong.
Tout en relâchant son interlocuteur, Véronika rebrousse alors chemin vers son comptoir pour prendre les commandes, me laissant seule avec Reda.
* * *
- Depuis quand est-ce que tu traînes avec Naïm ?
Reda me pose cette question tout en plantant son regard perçant dans le mien.
- Depuis quand est-ce que tu t’intéresses à mes fréquentations ?
Il se met à pouffer de rire.
Adossé contre le mur, les mains dans les poches, il a insisté pour rester auprès de moi le temps que ma blessure dégonfle un peu.
- Il faut bien surveiller les arrières d’un soldat infirme, non ?
Je le toise avec âpreté.
Il ne veut décidément pas lâcher prise, avec cette métaphore. Non pas qu’elle m’atteigne, – je sais qu’il prend simplement un malin plaisir à me châtier –, mais ce n’est pas comme si je n’avais fait aucun effort, aujourd’hui. Ce matin, j’ai pris le temps d’effectuer un nettoyage en profondeur, un gommage ainsi qu’un bain d’huile pour hydrater ma peau. Finis les cernes pourpres et le teint cadavérique, je me suis assurée de donner de l’éclat et de la luminosité à la peau de mon visage. Alors le fait qu’il persiste avec ce surnom, c’est un peu frustrant.
- Quoi ? Tu es vexée ?
Cette fois, je me retourne complètement vers lui pour lui faire face.
- Vexée ? Pourquoi est-ce que je serais vexée ?
Il hausse les épaules nonchalamment, avant de me pointer du doigt avec son index :
- C'est l'expression que tu donnais, là.
Quoi ?
La remarque du brun ne me laisse pas de marbre. Je n'arrive pas à croire que j'ai pu le laisser entrevoir ne serait-ce qu'une onde de frustration émanant de mon corps. En fait, je n'arrive tout simplement pas à comprendre pourquoi je ressens de telles émotions. Ce n'est pas comme si je tenais compte des propos des garçons, d'habitude.
- N'importe quoi. Tu crois vraiment que tes remarques dignes d'un élève de primaire m'offensent ?
Un rictus incurve le coin de sa lèvre.
- C'est typiquement ce qu'une personne offensée lâcherait, pour sa défense.
Je lâche alors un rire incrédule.
- Excuse-moi, je ne savais pas que tu étais étudiant en psychologie, toi aussi ! Désolée de te décevoir, mais non. Tes remarques ne m'atteignent pas. Elles n'effleurent même pas ma cheville, si tu veux tout savoir.
Il se met à ricaner face à mes propos, prêt à répliquer, mais je poursuis dans mon élan :
- Je n'ai pas besoin de recevoir des éloges pour avoir confiance en mon physique.
Ça ne me ressemble pas, de me justifier autant.
Non.
Je ne me reconnais pas.
Je ne suis pas du genre à perdre mon sang froid pour de telles broutilles. Et encore moins du genre à tenter de convaincre une personne que j'ai suffisamment confiance en moi pour ne pas mal prendre ses blagues. Enfin, si on peut vraiment appeler ça des blagues.
Je me redresse de nouveau sur mon tabouret et j'ouvre ma bouteille pour en prendre une gorgée.
- Oui, c'est vrai que tu es plutôt mignonne.
Sur ces mots, je recrache instantanément l'eau de la bouteille avant de m'étouffer avec. Une quinte de toux me secoue alors et j'ai du mal à reprendre ma respiration.
Oh mon dieu.
Dîtes-moi que j'ai rêvé.
Est-ce qu'il vient vraiment de déclarer qu'il me trouvait mignonne, comme si c'était la chose la plus naturelle à dire, dans le plus grand des calmes ? Déicdément, ce garçon n'est pas croyable !
Je repose ma bouteille sur le sol avant de me tourner de nouveau vers lui :
- Tu... tu viens de dire quoi, là ?
- Tu n'as toujours pas répondu à ma question.
- Quoi ?
Je soutiens ses prunelles d'un air interrogateur.
Il hausse les épaules, nonchalamment, avant de croiser les bras.
- Naïm.
- Oh.
Honnêtement, ça m'arrange qu'il change de sujet de conversation.
Je me pince l'arête du nez, hésitante, avant de reprendre d'un ton ferme :
- Je ne traîne pas avec lui. On avait simplement quelque chose à régler.
- Quelque chose à régler ? Avec Naïm ?
Il me sonde du regard, sceptique, à la recherche de cohérence dans mon discours.
- Oui. Quelque chose de privé, juste entre nous deux. Je ne peux pas trop en parler.
J'observe de nouveau mon interlocuteur. Le sourcil arqué, il ne semble pas comprendre grand chose dans ce que je lui raconte. Et je crois qu'au lieu d'apaiser sa curiosité, je n'ai fait que l'éveiller davantage.
- Enfin, ce n'est pas ce que tu crois !
- Ce que je crois ?
Oups.
Je crois que je me suis emportée un peu trop vite à mon goût.
- Euh... Je n'ai pas envie que tu interprètes mal notre relation. Je ne suis pas amie avec lui.
- Je sais.
- Et encore moins... enfin, tu sais quoi. Je tenais juste à le préciser au cas où.
Reda me fixe, les yeux écarquillés, avant d'éclater de rire.
Il s'approche alors d'un pas.
- Sa copine ? finit-il en m'ôtant les mots de la bouche.
Le rouge me monte aux joues.
Je ne sais pas pourquoi, mais l'entendre de ses lèvres me déconcerte.
- Oui, voilà... sa copine.
- Ce n'est pas un mot tabou, tu sais.
- Ce n'est pas vraiment le sujet. Est-ce que j'ai répondu à ta question ?
Il passe sa main dans ses bouclettes châtain. Je remarque alors le bandeau vert, – la même couleur que celle de son maillot –, qu'il porte sur son front pour éviter à la sueur d'entrer en contact avec ses yeux. C'est la première fois que je vois un garçon en porter un pour s'entraîner. Et je dois avouer qu'au-delà de l'aspect pratique, ce bandeau lui va plutôt bien.
- Oui, je crois que tu as répondu.
Je laisse échapper un soupir de soulagement, en espérant qu'il m'accorde enfin un moment de répit.
Mais il revient encore à la charge :
- En même temps, je trouvais ça étrange.
- De quoi est-ce que tu parles ?
- Te voir avec Naïm. Alors que tu ne le portes pas spécialement dans ton cœur.
Je tressaille instantanément.
- Quoi ? Qu'est-ce que tu viens de dire ?
Le brun s'immobilise, net.
Il se frotte la nuque, comme pour réfléchir à ce qu'il s'apprête à déclarer, avant de rétorquer :
- Non, rien.
Je lui jette alors un regard noir.
- Non, c'est trop facile. Tu as commencé, alors tu dois finir. Qu'est-ce qui te fait croire que je n'apprécie pas Naïm ?
De l'angoisse s'instille dans chaque parcelle de mon corps. J'appréhende la réponse de mon interlocuteur. Est-ce qu'il est au courant de quelque chose ? Naïm lui a parlé ? Ou bien, peut-être que c'est Yanis qui se serait confié à lui, lui racontant au passage mes appréhensions vis-à-vis de ses fréquentations et mes insécurités ?
Je me tortille dans tous les sens, impatiente, mais surtout inquiète.
Lorsqu'il finit par sortir de son mutisme :
- Je t'ai entendue, ce jour-là.
Quoi ?
- La première fois que je suis venu chez Yanis. J'étais sur le perron, derrière la porte. Lorsque j'ai entendu des cris.
- Des cris ?
Il opine du chef.
- Oui. Tu étais en train de te disputer avec ton frère. Jusque-là, rien d'anormal pour une fratrie.
C'est clair.
Surtout quand on sait que la fréquence de mes disputes avec Yanis frôle le quotidien.
- J'allais entrer. Mais au moment où je me suis approché de la porte, tu as déclaré quelque chose.
Je déglutis ma salive.
Je crois que je commence à comprendre où il veut en venir.
- Quelque chose du style : tu ne sais pas choisir tes amis. Et après, tu as même insulté tous ses potes d'abrutis sans avenir.
Non.
J'ai plutôt affirmé que mon ainé finirait sans avenir s'il s'entêtait à traîner avec des abrutis.
Mais le résultat est le même, finalement.
- Sur le coup, j'étais plutôt choqué. Et surtout très en colère. Je me demandais quel genre de fille superficielle tu pouvais être, pour te permettre de juger des personnes sans même les rencontrer.
Je continue de fixer Reda, les yeux écarquillés. Tout prend soudainement sens dans mon esprit. Les regards en coin, le manque de politesse, l'attitude insupportable... Il ne faisait que me rendre la monnaie de ma pièce. Et je me sens extrêmement idiote de ne pas l'avoir remarqué plus tôt.
- Mais à force de te côtoyer, j'ai fini par comprendre que ce n'était pas le cas. Alors en plus avec ton attitude, au city stade, j'en ai déduit que ce n'étaient pas les amis de Yanis qui te posaient problème. C'était seulement Naïm.
Je reste bouche-bée face à la perspicacité dont il fait preuve.
Chaque scène avec Reda se met à tourner en boucle dans mon esprit. Je ressasse la moindre interaction, le moindre indice qui aurait pu me mettre la puce à l'oreille tandis que je me situais à côté de la plaque.
Quelques secondes de silence s'ensuivent. Quelques secondes durant lesquelles je prends progressivement conscience de l'ampleur des mots, et du pouvoir destructeur qu'ils peuvent parfois entraîner.
Je finis par chasser ces images avant d'ajouter :
- Alors c'est pour cette raison que tu m'as fait croire que tu avais une allergie aux poivrons ? Pour te venger, en m'obligeant à cuisiner un second plat ?
Cette fois, c'est lui qui me fixe d'un air surpris.
Il se pince l'arête du nez, perplexe, avant de balbutier :
- Tu... tu le savais ?
Je lui décoche un sourire et mon ton se fait plus doux :
- Pour être honnête, je ne l'ai pas su tout de suite. C'est une amie qui m'a expliqué que l'allergie aux poivrons était une allergie orale, et que par conséquent elle ne pouvait pas déclencher de dégâts tant qu'on n'ingérait pas le produit en question.
- Wow.
Il laisse échapper un cri de surprise, tout en me soutenant de ses prunelles écarquillées.
- Je suis désolé. C'était vraiment immature de ma part, de réagir comme ça.
- Non. C'est moi qui te dois des excuses.
Je me lève du tabouret pour m'adosser au même mur que lui.
- Tu as raison. Je n'avais pas le droit de te juger sans te connaître. Et encore moins de t'insulter gratuitement. J'ai amplement mérité ce traitement.
Il bascule sa tête en arrière, fixant le plafond de l'épicerie d'un air songeur :
- Alors on peut dire qu'on est quitte.
- On peut dire qu'on est quitte.
Je finis par l'imiter et je bascule également ma tête en arrière, le tissu de mon foulard noir frottant le mur. Et nous nous mettons à rire ensemble de l'absurdité de la situation, un sentiment étrange naissant en moi.
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