Chapitre 25
Hana
La misogynie.
Ce sentiment de mépris qu'éprouvent certains hommes envers le sexe opposé.
Un sentiment qui ne surgit pas subitement un beau matin, mais qui tient souvent son origine d'un traumatisme enfantin.
Je repose mon cours de psychologie du développement tout en soupirant. Tout s'explique, maintenant. Ce manque de considération que Naïm manifestait constamment envers les femmes en se désengageant, en les collectionnant les unes après les autres comme des trophées et en les jetant ensuite comme si de rien n'était. Tous ces agissements n'étaient pas pensés sans raison, mais à cause d'un abandon. Celui de sa propre mère. Et l'idée de dominer la gent féminine après avoir été délaissé lui procurait probablement un sentiment de satisfaction.
À l'inverse, être subitement confronté à un rejet par une personne qu'il estimait pouvoir acheter lui a certainement fait revivre indirectement cet abandon. Pas étonnant qu'il l'ait aussi mal toléré...
- Hana, tu es là ?
La voix de ma mère m'arrache soudain de mes pensées.
Je me redresse alors sur ma chaise avant de lui intimer d'entrer.
- Désolé de te déranger dans ton travail, murmure-t-elle, je voulais t'apporter ça...
Elle me tend une assiette encombrée de mets divers : fruits frais, tranches de viande et petits biscuits, ainsi qu'une tasse de café à la vanille. Un de mes préférés.
- Oh maman, tu n'aurais pas dû... je m'émeus.
- Tu sais bien que ça me fait plaisir ! me rassure-t-elle alors.
Ma mère a toujours été comme ça.
Elle n'a jamais pu s'empêcher de vouloir me choyer en me voyant réviser.
Probablement un moyen pour elle de m'encourager à ne rien lâcher.
Oh, comme je l'aime tellement pour tout ce qu'elle fait pour moi au quotidien.
- Merci beaucoup, maman... je murmure en croquant un des biscuits.
- De rien, ma fille.
Elle dépose les serviettes qu'elle avait conservées dans la poche de son tablier avant d'en profiter pour m'inspecter.
- Toi, ça va ? me demande-t-elle alors, ses doigts entremêlant mes cheveux.
Une question qui peut paraître anodine, mais qui ne l'est pas.
Ma mère ne me demande pas si je vais bien pour converser, mais parce qu'elle sait que j'ai été agressée.
Certes, j'étais censée garder le secret. C'est ce dont on avait convenu avec Yanis, pour ne pas l'inquiéter. Et pour être honnête, au début, cet accord m'allait car il me correspondait. Avant même que mon aîné ne l'évoque, me murer dans le silence avait été mon premier réflexe pour encaisser cet événement traumatique.
Mais après avoir passé mes vacances de Noël à ruminer, je n'ai pas pu m'y résigner. Parce que je ressentais le besoin d'en parler. Je ressentais le besoin d'évacuer. Mais surtout, j'avais besoin d'une épaule sur laquelle me reposer.
Bien évidemment, je lui ai épargné les détails liés au prêt de mon frère. Je lui ai également fait promettre de ne rien dévoiler à mon père pour l'instant. Si Yanis l'a seulement roué de coups, mon père serait capable d'assassiner Naïm sur le champ pour me venger.
- Al Hamdullilah, ça va, je réponds finalement.
- Tu es certaine que tu ne veux pas que je contacte Linda ?
Linda.
L'amie d'enfance de ma mère et une avocate hors pair.
Avec tous les éléments de mon agression, nul doute qu'elle pourrait emmener Naïm jusqu'au procès. Cependant, pour une raison que j'ignore, je ne me sens pas encore prête à m'embarquer dans un tel sentier.
- D'accord, acquiesce-t-elle en me voyant méditer.
Je la remercie intérieurement de ne pas insister.
Je crois qu'en ce moment, je veux juste arrêter d'y penser.
J'attrape ma tasse de café que je me mets à déguster, lorsque ma mère revient à la charge.
- Et à part ça, comment va ton prince ?
- Quel prince ? je demande, incrédule.
- L'ami de Yanis ! Celui qui t'a sauvée !
Sur cette remarque, je recrache ma gorgée avant de m'étouffer.
- Maman, ce n'est pas mon prince !
- Oh benti, arrête ! Tu vas me faire croire qu'il n'y a rien entre vous ?
- Rien du tout ! je réplique spontanément. C'est juste un ami !
Ma mère continue de me toiser, les bras croisés.
- L'amitié fille garçon n'existe pas, benti...
Oui, je n'y crois pas non plus.
Mais ça, je ne vais sûrement pas le lui dire.
- Il est beau, gentil et fait de bonnes études... surenchérit-elle. Moi, je serai contente que tu te maries avec lui !
- Comment est-ce que tu sais tout ça ?
Elle m'adresse alors un clin d'œil.
- Les mamans se renseignent, tu sais..
Les yeux ronds, je l'observe, stupéfaite.
Je n'arrive pas à croire qu'elle soit allée jusque-là.
- Désolée de te décevoir maman, j'essaie de tempérer, mais il n'y a vraiment rien...
- Hana, tu es ma fille... me susurre-t-elle alors. Je suis capable de détecter tes mensonges...
Quoi ?
- Tu peux continuer de me mentir si ça t'aide à te sentir mieux, mais sache qu'en vérité, la seule personne à laquelle tu mens, c'est toi-même.
Ma gorge se serre.
Je suis incapable de nier cette affirmation parce qu'au fond, je sais pertinemment que ma mère a raison. Mais admettre que je possède des sentiments envers Reda, c'est une chose. Les révéler à quelqu'un, c'en est une autre.
* * *
- Mais pourquoi est-ce que tu ne m’as rien dit ?
Lucy me pose cette question tout en serrant fermement ma main dans la sienne.
Après avoir passé mes vacances de Noël à ruminer sur mon agression, j’ai décidé de contacter ma meilleure amie. Notre dernière conversation au téléphone s’était plutôt mal déroulée, et après avoir écouté les conseils de l’imam de la mosquée, j’étais prête à rectifier le coup. Cependant, lorsque Naïm m’a contactée pour me donner rendez-vous à Rosewood, je me suis dégonflée. J’étais persuadée que cette rencontre allait me permettre de définitivement mettre un terme à cette situation, et que Lucy n’aurait donc pas eu à s’inquiéter une fois que je lui aurais tout raconté, étant donné que tout aurait été réglé…
Mais malheureusement, ça n’a pas du tout été le cas. Je savais que Naïm était un homme perfide pour mon frère, étant donné ses consommations plus que douteuses et ses menaces, mais je n’aurais jamais imaginé qu’il puisse être aussi ignoble avec moi. Je n’aurais jamais imaginé pouvoir incarner l’objet de ses fantasmes, et je ne l’aurais jamais cru capable de lever la main sur moi pour arriver à ses fins.
Un frisson me parcourt l’échine en repensant à la gifle qu’il m’a asséné sans aucun scrupule. Je crois que ma main se crispe inconsciemment aussi, parce que Lucy s’empresse de la caresser pour me rassurer.
- Ça va aller, Hana… Je suis là, maintenant. Et si on arrêtait d’en parler, pour l’instant ?
J’opine du chef instinctivement.
Pour être honnête, j’ai mis pas mal de temps avant de me décider à appeler ma meilleure amie. Premièrement parce qu’après cet événement traumatique, mon premier réflexe a été de me murer dans le silence, – et ce durant la totalité des vacances. Et deuxièmement parce que je me sentais honteuse de demander de l’aide à Lucy après l’avoir lâchement plantée au café.
Mais je n’avais personne d’autre à qui me confier, – et je ne me voyais absolument pas évoquer ce sujet avec Yanis qui devait déjà digérer la trahison de son ami – , alors j’ai fini par me résoudre à lui laisser un message dans sa boîte vocale. Un long message lui décrivant tout ce qui s’était passé dans les moindres détails, depuis mon altercation à la pharmacie, en passant par notre rencontre au city stade, jusqu’à aujourd’hui.
Pour être franche, je n’espérais pas grand-chose de la part de Lucy, si ce n’était qu’elle accepte mes excuses, et que je puisse extérioriser mes sentiments par la même occasion. Mais contre toute attente, elle ne s’est pas contentée de m’écouter et de me pardonner. Elle m’a instantanément informée de son intention de débarquer à Paris au plus vite pour me revoir. J’ai évidemment tenté de décliner son offre à plusieurs reprises, lui assurant que je me portais bien et que je n’avais pas besoin qu’elle se dérange autant, mais elle n’a rien voulu écouter, têtue comme elle est.
Alors nous voilà aujourd'hui, en cette belle matinée de janvier, au même café dans lequel nous étions supposées nous retrouver quelques mois avant, à discuter comme si de rien n’était. Comme si nous ne nous étions jamais querellées. Comme deux meilleures amies séparées depuis bien trop longtemps pour s’attarder sur des choses aussi futiles.
- Au fait, tu comptes rester longtemps à Paris ? je lui demande, intriguée.
- Quatre jours, normalement. J'ai profité du début de semestre assez calme pour m'organiser.
- Et tu as réservé un hôtel ? Parce que si c'est le cas, tu peux l'annuler. Je vais t'héberger.
L'espace d'un instant, la blonde me fixe, incrédule, avant de me décocher un sourire.
- Est-ce que tu as déjà oublié que j'avais un copain, Hana ?
- Oh, c'est vrai.
Clay habite dans la région aussi. Si mes souvenirs sont bons, il est étudiant dans une école de commerce du quinzième arrondissement. Alors il loge dans un petit studio, financé en partie par ses parents. J’imagine qu’il a quand même suffisamment d’espace pour accueillir sa petite amie, même si son appartement ne doit probablement pas dépasser la taille de mon salon.
- Et toi ? me questionne alors Lucy.
J'arque un sourcil, sceptique.
- Quoi, moi ?
- Tu n'as toujours pas de petit copain ?
Je roule des yeux face à sa remarque.
- Non, Lucy... Je te l'ai déjà dit, ça ne m'intéresse pas.
Elle me considère alors, de ses prunelles turquoise.
Je profite de ce moment de répit pour prendre une gorgée de ce jus d'orange pressé que je viens de commander, mais mon amie revient spontanément à la charge :
- Et Reda ?
Sur ces mots, je recrache instantanément le contenu de mon verre avant de manquer de m'étouffer. Une quinte de toux me secoue et Lucy ne peut s'empêcher d'éclater de rire face à ma réaction.
- Bingo ! déclare-t-elle, tout en continuant de ricaner.
- Bingo de rien du tout... je murmure tant bien que mal, entre deux accès de toux.
Je prends alors une profonde inspiration pour me calmer, avant de la toiser.
- Je ne sais pas ce qui a pu te faire penser ça, mais...
- Non, me coupe-t-elle. Tu ne me la feras pas à moi, Hana.
- Quoi ?
Elle passe alors sa main dans ses boucles d'or, avant de se redresser :
- Premièrement, c'est un garçon plutôt charmant. Vous avez les mêmes valeurs spirituelles et les mêmes centres d'intérêts...
- Ce n'est pas...
- Attends, laisse-moi finir. Vous vous entendez plutôt bien, et il t'a même sauvée. Deux fois.
Je continue de fixer mon amie en silence, déconcertée.
- Je suppose que tu vas me rétorquer que ce ne sont pas des arguments suffisants pour développer de l'intérêt pour quelqu'un, n'est-ce pas ?
- Exactement.
- Tu as raison. Et pour être franche, dans un autre contexte, je t'aurais rejoint.
- Quoi ?
Lucy se met alors à esquisser un sourire discret, avant de me désigner du doigt ses prunelles.
- Mais tes yeux, Hana. Ils ne mentent pas, eux.
- Qu'est-ce que tu racontes, encore ?
- Ils se sont mis à briller à chaque fois que tu l'as évoqué.
- Quoi ?
Sur cette remarque, mes joues prennent feu et je ne peux m'empêcher de détourner mon regard. Parce que même si ça m'ennuie de l'admettre, je sais au fond de moi que Lucy a raison. Reda me plaît. Et je fais entièrement confiance à ma meilleure amie pour préserver ce secret.
Alors pourquoi ?
Pourquoi est-ce que je suis incapable de le lui avouer sans qu'elle ne me tire les vers du nez ?
Pourquoi est-ce aussi difficile pour moi de le verbaliser ? Est-ce de la honte que je ressens, ou simplement de la pudeur à l'égard de mes sentiments que je peine à accepter ?
Je secoue vivement la tête. Non, ce n'est pas ça. Ce n'est pas une question d'acceptation de mes sentiments envers Reda. Après tout, je les ai déjà admis, l'autre soir, après l'incident. Je crois qu'en fait, c'est plutôt une crainte. La crainte de laisser mes pensées franchir le seuil de mes lèvres, de les évoquer, de les échanger avec quelqu'un, pour qu'au final, mes sentiments ne soient pas partagés et qu'ils n'aboutissent à rien. Oui, c'est une question de peur. Une peur bien plus honteuse que des sentiments inattendus. Parce que la peur se maîtrise, contrairement aux sentiments qui restent incontrôlables.
- Tu as perdu ta langue ou quoi ? rajoute Lucy en me ramenant à la réalité.
Je relève alors la tête en direction de la concernée, avant de m'éclaircir la gorge et de répliquer :
- D'accord, tu as gagné... Je ressens de l'intérêt pour Reda...
- Bingo ! Je le savais ! s'exclame-t-elle, visiblement ravie par ma confession.
- Mais...
Je marque alors un arrêt net, laissant Lucy me scruter d'un air surpris, avant de me pincer la lèvre inférieure d'un air penaud et d'ajouter :
- Je crois qu'il vaut mieux que je laisse tomber.
- Quoi ? s'écrie alors mon amie, en se relevant de sa chaise.
- Après tout, je ne pense pas que ce soit réciproque...
- Mais n'importe quoi, Hana ! Tu n'en sais absolument rien !
L'agitation excessive de mon amie suscite quelques messes basses dans la pièce. Je lui intime de se rasseoir, pour éviter d'attirer davantage l'attention sur nous, avant de reprendre :
- Il ne me voit pas comme une femme.
- Parce que tu lis dans son esprit, peut-être ?
Je hausse les épaules nonchalamment.
- Son esprit non, mais sa gestuelle oui.
- Et qu'est-ce qui t'indique dans ses gestes qu'il ne te voit pas comme une femme ?
- Il est toujours serein, en ma présence...
Lucy s'apprête à répliquer, les sourcils froncés, mais je ne lui en laisse pas l'opportunité et je poursuis :
- Il me parle avec une facilité déconcertante, me complimente sans jamais ressentir aucune gêne...
- Hana...
- Pourtant, Yanis se trouve quasi toujours dans les parages, et ça n'a pas l'air de le déstabiliser le moins du monde... Un homme vraiment intéressé par une femme ne se comporte pas aussi calmement en sa présence, et encore moins en présence de son grand frère, non ?
- Ma parole, tu dis vraiment n'importe quoi !
Quoi ?
- J'en ai entendu des bêtises, au cours de ma vie... mais alors là on atteint un niveau !
- Hé ! Ce n'est pas sympa !
Je m'empresse de jeter un regard noir à Lucy, qui ne cille pas du tout.
- Pardon, mais j'étais obligée...
Elle se met alors à croiser les bras sur sa poitrine, avant d'ajouter :
- Tu ne t'es jamais dit qu'il pouvait simplement se sentir à l'aise avec toi ?
- Quoi ?
- C'était le cas avec Clay, à nos débuts. Tu te souviens de notre première rencontre, en Martinique ?
J'acquiesce d'un hochement de tête.
- Quand on s'est parlé la première fois, il n'a eu aucun mal à mener la discussion.
- Ah bon ?
- Oui. Il n'arrêtait pas de me poser des questions inutiles, et il me complimentait sans relâche sur la tenue d'été que je venais de me dégoter pour la soirée.
- Mais dans ce cas, c'est différent ! Au contraire, il avait l'air intéressé par toi !
Lucy lève alors sa main en l'air, comme pour m'intimer de la laisser achever ses explications.
- Le problème, c'est que dès qu'une fille pointait le bout de son nez juste à côté, il se stoppait. Comme s'il était nerveux, ou qu'il voulait éviter de faire mauvaise impression devant elle...
- Oh.
- Surtout que les filles de la soirée étaient vraiment bien gaulées, dans leurs bikinis fleuris. Franchement, j'étais presque jalouse !
Je ne peux m'empêcher de laisser échapper un gloussement face à son aveu. D'autant plus que je suis persuadée qu'avec son corps incroyable, Lucy n'a probablement rien à envier à ces filles.
- Il se stoppe devant des filles incroyablement belles, et moi, banale comme je suis, il n'a aucun mal à m'adresser la parole. Comment est-ce que je me suis sentie, à ton avis ?
- Tu n'es pas banale, Lucy, je rectifie. Mais j'imagine que tu t'es sentie mal.
- Bien sûr. J'avais l'impression de ne pas être attirante du tout à ses yeux...
La blonde prend le temps d'ingérer une bouchée de son pain au chocolat, comme pour marquer une pause, avant de poursuivre :
- Enfin ça, c'était ce que je croyais.
- Quoi ?
Sur ces mots, le visage de Lucy laisse place à une toute autre expression. Elle se met à esquisser un sourire, et de la douceur et de l'apaisement semblent se dégager de tout son être.
- La soirée était super ennuyante, et j'étais vexée de la réaction de Clay. Alors je suis partie.
- Oh.
- Pour être franche, j'étais persuadée de lui rendre service. Maintenant que je l'avais laissé tranquille, il n'avait plus d'autre choix que de prendre son courage à deux mains pour engager la conversation avec ces bimbos.
Je lui prête l'oreille, très attentive.
- Mais Clay m'a rattrapée. Il avait l'air complètement paniqué par mon départ précipité.
Je continue de fixer minutieusement mon amie, dont les pupilles se dilatent au fur et à mesure de ses propos. Je n'arrive pas à croire que la simple évocation de son petit ami puisse générer de telles opérations en elle.
Est-ce que c'est ce à quoi elle faisait référence, lorsqu'elle a évoqué le soi-disant étincellement de mes yeux, avec Reda ? Non... Ça me paraît tellement invraisemblable...
- Il m'a alors suppliée de rester. Et quand je lui ai demandé la raison de son insistance, il m'a avoué que je lui plaisais...
- Oh.
Je ne peux m'empêcher de sourire à mon tour face à la réaction de Lucy. Leur relation respire vraiment l'innocence et la sincérité.
- Ce n'est pas parce qu'il était intéressé par les filles de la soirée, qu'il s'arrêtait de parler en leur présence, mais justement parce qu'il s'en fichait. Il ne voulait pas perdre son temps ni son énergie à entamer une discussion avec des personnes pour qui il ne ressentait aucun intérêt.
- Clay est vraiment trop mignon !
- Oui !
Elle laisse échapper un gloussement qu'elle couvre de sa main :
- Il se sentait à l'aise avec moi. Seulement avec moi. C'est pour cette raison qu'il avait tant de facilité à me parler.
- Je comprends mieux ta réaction, maintenant.
- J'espère bien !
Lucy se met alors à froncer les sourcils, avant de déclarer d'un ton ferme :
- Alors écoute-moi bien. Tant que tu n'entendras pas fermement de la bouche de Reda lui-même que tu ne lui plais pas, je t'interdis de baisser les bras.
- Quoi ?
- Compris, Hana ? Je ne plaisante pas.
- D'accord, d'accord...
Je lève les mains en l'air en signe de reddition.
- C'est quand, votre prochaine rencontre ?
- Euh...
Sa question me prend de court.
Je me pince l'arête du nez, pour réfléchir.
- On est censé s'organiser un restau prochainement, avec Yanis.
- Vraiment ?
- Oui, tu sais par rapport à l'agression.. pour mettre en commun toutes nos infos...
- Mais c'est génial ! Où ça ? À Okinawa, je suppose ? C'est ton restau préféré...
Je laisse échapper un rire nerveux malgré moi.
- Euh non, sûrement autre part...
Pour être honnête, depuis la dernière fois, je n'ai plus jamais remis un pied à ce restaurant. Non pas que la qualité exceptionnelle des plats ne me manque pas, mais je préfère éviter d'avoir à supporter le regard pesant de la serveuse rousse, et je crois surtout qu'au fond, je culpabilise encore un peu de mon attitude. Alors tant pis.
Et tandis que Lucy continue de me délivrer ses conseils pour mieux appréhender les garçons, je ne l'écoute plus qu'à moitié, trop occupée à réaliser que je venais d'admettre ouvertement que j'étais prête à me lancer.
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