1849 - 2
La venue d'Europe continentale du mildiou, un champignon appelé Phytophtora infestans, alliée à l'humidité du climat, provoqua une forte chute, de l'ordre de 40 %, de la production de pomme de terre en 1845 et entraîna une famine de grande ampleur. Contrairement à ce qui s'était passé pendant la famine de 1780, les ports irlandais restèrent ouverts sous la pression des négociants protestants et l'Irlande continua à exporter de la nourriture. Des régions de l'île où des familles entières mouraient de faim, des convois de nourriture appartenant aux landlords, escortés par l'armée, partaient vers l'Angleterre. Certains propriétaires expulsèrent même leurs paysans, y compris s'ils étaient en mesure de payer leur loyer comme lors du Ballin glass Incident. Pourtant, en 1845, la pénurie ne fut pas de plus grande ampleur que d'autres crises régionales précédentes qui ne sont pas restées dans les mémoires. Ce n'est que l'anéantissement de la récolte de pomme de terre au cours de trois des quatre années qui suivirent qui entraîna la famine et les épidémies auxquels les institutions de secours, qu'elles soient gouvernementales ou privées, s'avérèrent incapables de faire face.
Malgré tout, à ma demande, avec Olga nous rouvrîmes le dispensaire de Tunamore, tombé en « désuétude » ; près de cinq siècles s’étaient déjà écoulés ! Est-ce que ce bâtiment haut et sombre avait toujours été un hôpital ? N’était-ce pas un couvent ou une école religieuse ? En tout cas, les sœurs qui y aidaient Olga, colombes blanches et prestes y volaient toujours de salle en salle, dans un bruissement de cornettes, secourables aux plaintes sans fin qui retentissaient nuit et jour, impuissantes souvent, autoritaires quand il le fallait, disponibles toujours.
Hélas, nous n’étions plus dans le laché-prise. La peine venait toujours après la peine ; chaque jour, un tombereau de moribonds nous submergeait un peu plus ; chaque jour, le typhus et le choléra minaient nos espérances ; chaque jour, les larmes se faisaient plus amères ; nous ne pouvions plus faire face à cette pandémie.
La famine perdura jusqu'en 1851, mais eut des répercussions pendant encore plus longtemps, en particulier sur la démographie de l'Irlande. Aux morts de la famine, il faut en effet ajouter près de deux millions de réfugiés, et autant d'émigrants, essentiellement à destination de la Grande-Bretagne, des États-Unis, du Canada et de l'Australie. Alors nous avons laissé-filé, défaits et déchus, et sommes partis avec les vagues de migrants pour le nouveau monde.
Tout commence par la terre...
Notre terre...
Pas seulement notre planète, mais aussi et surtout notre terre, spirituelle, celle sur laquelle les graines semées donneront des arbres, fruitiers...
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