Chapitre 3 : le bad trip
— Oh ! Mec, je vois vert et au ralenti. Dis-je avec du Bob Marley dans les oreilles.
Puis, d’un seul coup. Ma vision a commencé à bouger dans tous les sens, je voyais comme de la pluie, une pluie torrentielle ! Je tremblais, je tremblais comme la première fois où j’avais fumé. J’étais paniqué, parano, je ne sentais même plus mon propre corps. Le soleil me brûlait, mais seulement à certains endroits de mon corps que je peinais à sentir. J’étais paniqué, j’avais treize ans, en pleine crise psychotique, j’étais coincé. Coincé dans un monde réel qui me paraissait irréel. Comme une sorte de vitre qui me séparait du reste du monde. J’étais coincé.
Lubin, pas inquiet du tout, me demanda d’aller le raccompagner chez lui. De mon côté, moi qui étais confus et perdu dans les rues de ma ville, j'ai dû retrouver mon chemin, seul. Les gens me regardaient comme le pire des criminels, le toxico, celui qui méritait d’être dans cet état.
J’avais treize ans, et étais sur le chemin qui menait droit vers l’effondrement de ma vie. Malheureusement, à ce moment-là, il était déjà trop tard. Ce simple petit événement aura eut de grandes conséquences.
Les harceleuses qui ne se gênaient même plus pour m’humilier en classe se prenaient désormais des flots d’insultes en tout genre. Encore aujourd’hui, j’admire le courage que j’ai eu. De tenir tête à ces pestes, ce fût l'une des choses les plus audacieuses que j’ai faite. Moi, celui que tout le monde écrasait constamment était désormais celui qui tenait tête aux harceleurs. La haine et la rage que j’avais en moi ont fini par sortir. La vengeance était ici et était violente. C’était tout à fait mérité. Je ne regrette rien.
Les points négatifs de ce bad trip, parce qu’évidemment — une crise psychotique n’est jamais anodine ; étaient cette désinhibition et cette envie de revanche constante. J’étais souvent euphorique, mais angoissé. Très angoissé. J’étais extrêmement agité, tendu. Ma vie me semblait constamment irréelle, j’avais même l’impression d’être dans un dessin animé. Je n’avais pas touché un seul joint depuis celui qui libéra la bête féroce. J’étais devenu insupportable, irrespectueux, violent, et ce, envers tout le monde.
Un jour pour ma mère, ce fut la goutte de trop.
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