Chapitre 10 : trouble de la personnalité borderline 

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Avant d’écrire comme je le fais depuis le début, j’aimerais vous décrire comment je vis exactement le trouble de la personnalité borderline/ état-limite. 

Imaginez qu’on vous a arraché une sorte de peau émotionnelle, celle qui vous protège des agressions, de tout ce qui pourrait atteindre votre cœur émotionnel. 

Une simple remarque, un simple regard vous atteint, il pourra vous atteindre en bien, ce qui — dans mon cas ; pourra se traduire par le développement extrêmement rapide d’affects envers la ou les personnes en question. Mais dans le cas contraire, une remarque, un mauvais regard, juste un mot ou une absence de mot, et tout part en vrille dans ma tête. 

« Et si elle ne m’aimait plus ? »

« Elle va m’abandonner… » 

« Lui, il me déteste ! » 

« Si elle part, je me tue ! » 

« Si elle me trompait ? » 

« Je vais me tuer » 

« Il faut que je me scarifie » 

« Il faut que je me brûle » 

Toutes ces phrases qui se répètent dans ma tête en fonction de mon état relationnel font que je peux être très joyeux, et d’un coup, passer à un état d’angoisse, de colère ou de vide. 

Ce que j’appelle le vide, c’est un creux. Un gouffre au milieu du ventre qui vous transperce. Il vous fait mal. Il vous tue à petit feu. Il n’y a rien. Plus rien. Les seules pensées sont « je veux que ça s’arrête ! » 

« J’en ai marre… » 

« Je n’en peux plus… » 

Quand on vous dit que les personnes atteintes de trouble de la personnalité borderline sont des « pervers narcissique », des méchants manipulateurs vicieux et en cruel manque d’attention, vous savez maintenant la réalité de ce qui se passe à l'intérieur, dans la tête d’une personne atteinte. (Ce n’est vraiment pas une généralité, chaque personne atteinte peut avoir des symptômes totalement différents. Chaque personne est unique, surtout avec les troubles de la personnalité.) 

*** 

 Le jour de la Pentecôte, ma cigarette électronique était tombée en panne. Moi qui étais très accro à cette petite machine parti immédiatement au bureau de tabac que je pensais ouvert. Déçu de la réponse en direct, je rentrai chez moi, sans nicotine. Sur le chemin du retour, je croisai une jeune femme au visage familier. 

— Mat ? Demandais-je en me retournant pour en être sûr. 

 Et c’est ainsi que nous nous sommes mis à parler. Enfin, c’était surtout elle qui parlait en l’occurrence. Après une longue discussion en plein milieu du trottoir, Mat me proposa d’aller se poser dans un parc. 

 Mat parla encore et encore, mais je me rappelais à quel point j’étais fou d’elle ! Le soir même, je décidai de l’inviter à manger dans le restaurant le plus branché de ma ville. Elle accepta. Cette soirée était magique. Nous répartîmes chacun de notre côté. 

 Le lendemain soir, Mat était perturbée. Elle était tourmentée, car, dans sa tête, elle ne voulait qu’une chose : coucher avec moi. 

Moi qui avais déjà envie d’entretenir une relation sérieuse avec quelqu’un, je le vivais mal. Pour moi, il fallait une attache et un engagement sérieux. Elle ne voulait visiblement pas de cela, mais je préférais croire le contraire. J’acceptai avec réticence. 

 Toute la nuit, nous l’avions passé à faire l’amour passionnément. C’était une nuit extraordinaire. Mais toutes les bonnes choses ont une fin. 

 Le lendemain matin, Mat décida, après la découverte d’un bouton d’herpès sur le coin de ma lèvre inférieure, de me dire quelque chose qui lui semblait important. 

— Je ne veux pas d’une relation sérieuse. Je ne veux pas que tu t’accroches. Je suis désolée… 

 À ce moment-là, je me suis effondré en larmes. J’ai fait deux crises d’angoisses. Dont une où je suis resté figé, bloqué. Ce qu’on appelle une crise de tétanie. J’étais paralysé par la peur, la peur de l’abandon… 

 Après cela, ce fut un enchaînement de « je t’aime, moi non plus ! ». Jusqu’au moment où j’ai compris. Où j’ai compris qu’elle ne voulait plus de moi, du moins, qu’elle m’a utilisé comme un jouet sexuel, en disant qu’elle ne savait pas si elle voulait quelque chose de sérieux etc…  

 Tout cela a duré jusqu’au moment de trop. Un mot de trop qui a déclenché la crise de trop. 

Ce message m’a fait jeter mon téléphone contre le mur, j’avais réellement envie de me suicider. Réellement ! J’ai appelé le Samu puis j’ai été hospitalisé chez les adultes. 

 Entre-temps, je n’ai pas eu d’autres grosses crises, mais la dernière en date, la deuxième, date d’il y a seulement deux mois, au moment où j’écris ces lignes. 

Je suis resté une semaine et quelques jours à l’hôpital. Cette crise était due à une dispute, un conflit de rien du tout avec mon meilleur ami. Tout ça pour ça. 

En septembre 2023, j’ai appris que j’étais atteint d’un trouble de la personnalité état-limite. Je suis traité en conséquence, avec des antidépresseurs, stabilisateur de l’humeur, antipsychotique et anxiolytique. 

Aujourd’hui, je suis en couple depuis un peu plus d’un mois avec une personne formidable. Ce n’est pas simple, mais je l’aime, fort, et je veux me battre encore plus pour elle. Cela fait un peu plus de deux semaines que je ne me suis pas scarifié. J’ai beaucoup appris, beaucoup lu, et je suis déterminé à donner le meilleur de moi-même, pour mener la folle vie dont je rêve… 

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