II
Réveil difficile ce matin pour Aleyna. C'est le jour J. Samedi 21 octobre. Le stresse, la peur, toutes ces émotions que connaissent les gens du voyage s'emparent d'elle depuis la veille déjà.
C'est le cœur battant fort dans sa poitrine qu'elle se lève du lit. Elle s'observe dans le miroir : son visage n'a rien an voir avec celui d'hier. Les cernes, les cheveux ébouriffés en bazar, le regard affaibli, on voit très bien que la nuit a été agitée.
Dans son long t-shirt rose qui lui sert de pyjama où figure Minnie Mouse, elle rejoint sa famille à la salle à manger avec sa mauvaise mine. Des regards à la fois apeurés et interrogateurs tombent sur elle à tel point qu'elle en est elle-même surprise et étonnée. Sans aucun regard pour personne, elle se dépêche de finir son chocolat et ses tartines et file à la douche. Pour aujourd'hui, pas de bain : elle doit optimiser le plus de temps possible. Douche rapide, puis elle passe se préparer dans sa chambre en choisissant la tenue prévue pour son voyage.
Après cela, pour la énième fois, elle revérifie ses affaires de voyage pour ses deux semaines de bonheur avec ses copines. Tout doit être parfait, quitte à rouvrir encore une fois sa valise pour être sûre qu'elle n'a rien oublié. La vérification terminée, elle s'assoit sur son lit, encore fatiguée, pour repenser à sa décision.
Partir, loin, deux semaines, avec elles, sans eux, pour Lui. Plus d'hésitation maintenant : elle en est sûre, elle veux partir.
Elle met ses chaussures et enfile sa veste en cuir, sa préférée. Elle jette un coup d'œil rapide pour la météo et elle prend en plus un parapluie : une averse devrait l'accueillir en sortant de la Gare de Lyon.
Armée de son parapluie, de sa valise et de son sac à main en plus d'un sac à dos, elle est devant la porte d'entrée, la main sur la poignée, prête à ouvrir et prête à partir. Elle ouvre enfin la porte, décidée, et se retrouve sur le trottoir sous un soleil timide d'automne.
« Attend ! » entend-elle en sortant. Elle lance un regard derrière elle, de là où venait la voix. Raphaël, dernier de la famille, la dévore du regard depuis le couloir, des larmes lui inondant les yeux.
« Tu m'a pas dit au revoir. Tu m'avais promis... » dit-il avant d'éclater en sanglot.
Aleyna reste immobile devant la porte, ne sachant que dire et que faire durant quelques secondes. Puis sa langue se délie enfin :
« Toi aussi tu m'avais promis quelque chose : de ne pas pleurer. Aller, sèche tes larmes et viens me faire un câlin. Et mouche-toi d'abord ! Je ne veux pas une seule goutte de ta morve sur ma belle veste que maman m'a offert pour mes 13 ans. »
D'abord impassible à cause de l'incompréhension, Raphaël cours ensuite chercher des mouchoirs en se débarbouillant le visage à l'aide de ses manche. Il revient, des dizaines de mouchoirs usés à la mains, des manches grouillant de morve et de larmes, et la qualité de son visage empirée. Sa grande-sœur lâche un petit rire en esquissant un sourire et viens lui faire un câlin « Tu l'a quand même mérité ». Les yeux toujours rougit par son sanglot, Raphaël sert fort sa sœur qui va le quitter d'un instant à l'autre.
« Deux semaines. C'est la première fois qu'on se sépare aussi longtemps. Promets-moi de rester sage le temps que je revienne, et surtout de ne pas pleurer.
— D'a- snif- d'accord Aleyna, je s'rai sage et je pleurerai p'us, promet-il en baissant la tête. En échange, je veux que... que tu revienne vite ! Très vite !
— Oui oui, t'en fait pas pour ça, je serai vite de retour. Mais je dois y aller maintenant. Aller va rejoindre maman, elle t'attend.
— Mais... je veux pas que tu partes, dit-il tout bas.
— Je sais, mais il le faut, Raf. Il y a quelqu'un qui m'attend là-bas.
— Mhh-hmm, soupire-t-il en se détournant de sa sœur et revenant sur ses pas. Tu vas me manquer.
— Toi aussi...»
C'est la dernière phrase qu'elle a pu prononcer avant que la porte ne se ferme. Elle doit y aller ou elle sera en retard. Alors ni une ni deux, elle prend ses sacs et sa valise et se met en marche vers la gare. Une pensée pour son petit frère l'interrompt. Deux semaines... ça va être long pour lui comme pour elle. Cette petite bouille toute mignonne va vraiment lui manquée. Mais elle s'est fait un engagement : elle n'enverra aucune lettre ou aucun message pour avoir des nouvelle. Elle sera coupée de sa famille, de ses proches, de sa vie le temps d'en vivre une autre pour deux semaines.
Et surtout d'en vivre une avec Lui, avec Mat.
Depuis la planification de ce voyage, ça la démange de le voir enfin. C'est ce qui l'a rendue la plus impatiente. La principale raison de ce voyage, c'est Lui ! Elle pourrait tout faire pour Lui. Son nom résonnant dans sa tête et son image infiltrant la moindre pensée qui circulent dans sa tête lui fait penser chaque fois encore plus à Lui, et à ce moment où ils se verront pour la première fois. Il a dit qu'il l'attendra sur le quai quand elle arriverai à Saint-Lazare durant le début de la deuxième semaine. Descendre du train, puis ces quelques seconde d'attente, d'excitation et d'effroi, et enfin le voir un peu plus loin, la tête scrutant chaque passager pour espérer de l'apercevoir : ce sera le plus beau moment de sa vie.
Mais avant ça, elle a une grosse semaine de vacances avec ses meilleures amies. Ces dernières l'attendaient sagement à la gare. Sur un banc à l'extérieur, Adriana et Laure papotaient en l'attendant. Aleyna arrive donc, les salue et s'assoit avec elles.
« Et Sophie ? Et Louise ?
— On a pas vu Sophie venir, je ne suis pas sûre qu'elle se soit libérer finalement, commença Adriana.
— Et pour Louise, je ne pense même pas qu'elle osera venir, continue Laure. Enfin, you know, quand on est venue là voir lundi pour lui annoncer le départ lundi, elle a tout de suite dit qu'elle était occupée et qu'elle ne pourrait point venir de ces vacances. As a nerd, you know her. Au moins, on sera juste assez pour prendre un taxi.
— Dit pas ça ! s'exclame Aleyna. Elle reste notre amie.
— En attendant, notre « amie » elle est pas là, rappelle Adriana.
— Qui est-ce n'est pas là ? »
Les trois jeunes femmes lèvent la tête et voient devant elle leurs deux amies, Sophie et Louise, toutes deux munies de leurs valise et sacs pour le voyage.
« Sophie ? Louise ? Vous êtes venue ? demande Aleyna en se levant dès qu'elle les vit.
— Évidemment ! On allait pas vous laisser partir comme ça sans nous voyons. On fait quand même partie du groupe, pas vrai ?
— Bien sûr que vous en faites parties ! »
Ainsi, enfin au complet (sans Céline malheureusement), le groupe de filles prend son train en direction de Lyon. Durant le voyage, c'est discussion et fou rire sans limite : un départ en vacances qui s'annonce bien. Jusqu'à ce qu'Adriana pose une question à Louise.
« Mais Louise, tu n'étais pas censée être vraiment occupée à travailler ces vacances ? Pourquoi tu es venue ? T'oublie ton travail ?
— Hum... oui et non, répond-elle. J'avais... j'avais juste besoin de prendre l'air. Aleyna devrait me comprendre...
— Oh, oui... fit-elle.
— Mais pourquoi ? insista Adriana. Tu veux souffler pour quoi ?
— Bah p-pour souffler c'est tout ! s'emporte-t-elle. Aleyna, elle vous a rien dit elle, alors pourquoi je devrai m'expliquer moi ? Je devais souffler, c'est tout ! finit-elle agacée.
— Wow, ok c'est bon, calme-toi, pas besoin de t'énerver, tente de la calmer Adriana. C'était juste une question... »
Un malaise s'installe dans le groupe, seul le son tu train qui roule à toute lenteur sur les voies régionales leur perturbe ce silence. Adriana par gêne, Louise par agacement, Aleyna par honte, les autres par malaise, aucune d'elles n'osent parler.
Arrivées à Lyon, elle délient enfin leur langue pour trouver le bon quai où leur train devait les prendre pour les emmener vers la capitale. Après maintes questions aux autres voyageurs, elles arrivent à trouver enfin le lieu de départ du TGV pour Paris.
Elles ont même rencontrée une compagne de voyage de leur âge : Chloé, 15 ans, voyage elle aussi pour Paris rejoindre ses parents pour les vacances. Étant donné qu'elle voyage seule, Aleyna l'a invité à voyager avec elles, et le petit groupe a accepté avec plaisir une sixième partenaire le temps d'une voyage.
Ainsi, elle sont six à papoter dans le long TGV pour quelques heures. Tandis que les autres s'endorment une par une, Aleyna est la seule de son groupe avec Chloé qui, décidément, ne s'arrête pas de parler. Elle apprend ainsi qu'elle a un chat, Moki, qu'elle n'a pas vu depuis les 3 ans qu'elle a fait à Lyon. En effet, elle a laissé ses parents en région parisienne en sortant du primaire et s'est installée à Lyon, chez son oncle, et ne l'a pas quitté depuis. À Paris, elle allait aussi revoir toutes ses anciennes amies et ennemies du primaire qui lui avait, selon elle, « pas du tout manqué ». Elle lui parle aussi de ses grands-parents, en Franche-Comté, qui lui envoient touts les mois des lettres du Jura, ainsi que de ses cousins partis au Canada avec sa tante Julie, sa préférée, qu'elle a parfois au téléphone. Aleyna su aussi les spécialités culinaires canadiennes et franche comtoises, ainsi que quelque coutumes et traditions que Chloé avait apprises à force de lettres et d'appels.
C'est emplie d'une nouvelle culture qu'elle pose les pieds sur le quai de la Gare de Lyon, à Paris, quand elles sont enfin arrivées à destination. Elle inspire un grand coup, puis expire.
« Vous sentez les filles, cette odeur ? C'est l'air de Paris ! »
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