L'insouciance

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Que je me rappelle au plus profond de mes souvenirs, je n'en ai que très peu de ma tendre enfance et les rares images de ce je prends pour souvenirs à la maternel sont certainement issues des photos que mes parents ont prises et que j'ai vu bien plus tard.

Je me souviens juste de la grande cour dans laquelle nous jouions avec des pneus de voiture, les chevaux de bois et les tricycles trop peu nombreux pour satisfaire tous les prétendants laissant ainsi bon nombre d'enfants sur la touche à mes côtés.

Jeune je n'ai jamais vraiment été bagarreur tout au contraire, je préférais les jeux solitaires plus que les chamailleries de mes camarades, même si parfois j'avais plaisir à me défouler un peu. C'était une époque simple, rythmée par les heures d'école et de goûter avec la grand-mère en attendant que maman rentre du travail.

Je ne sus que bien plus tard pourquoi j'étais beaucoup plus proche de ma mère que de mon père.

Je pense que ces souvenirs ont perdurés grâce aux élections qui m'ont fait revenir dans ce passé après ma majorité pour passer devant l'urne. Lors de ces moments je sentais la mélancolie m'envahir comme si les fantômes de mon enfance se précipitaient pour m'encercler et m'enlacer de leurs petits bras, heureux de me voir revenir.

La maternelle était collée à l'école primaire qui elle-même était divisée en deux, héritage des générations précédentes. Je me retrouvai donc dans cette primaire "l'école des filles" tandis que mon frère ainé de trois ans était, lui, dans "l'école des garçons". Le fait de ne pas être dans la même école n'avait pas trop d'importance car nous n’aurions passé qu’une seule année ensemble. J'étais juste content car on chuchotait que l'école des garçons était beaucoup plus stricte.

Ce qui est étrange c'est que j'en garde un sentiment de bien-être, d'une époque bienheureuse ou j'ai eu plaisir à grandir et pourtant, ces souvenirs bien précis ne sont en fait que des blessures qui m'ont accompagnées toute ma vie telles des cicatrices.

La perte des plus grosses parties de billes dans la cour, les bons points distribués aux autres et moi qui pensais en avoir mérité, les punitions injustifiées et les photos de classe ratées, car toujours mal habillé ou mal coiffé. Il parait que c'était la mode de la coupe au bol et des vêtements aux couleurs criardes, et pour ça, je n'ai aucun regret. Autre fait de cette époque, j'apparaissais très souvent sur les photos de groupe avec les yeux fermés, à croire que le photographe prenait un malin plaisir à toujours sélectionner cette photo.

Habitué à n'avoir que des maitresses d'école, je me souviens de l'angoisse à l'entrée du CE1 lorsque nous avions appris que nous aurions un maître en remplacement pour l'année entière. Une crainte vite dissipée par la gentillesse de ce professeur, l'un des très rare enseignant à m'avoir le plus appris en une année sur la vie que ce que la vie elle-même n'arrivera à égaler, l'éveille. Tant de merveilleux souvenirs grâce à lui, imaginez-vous un professeur remplaçant emmener sa classe entière pendant 3 semaines en classe de neige ? C'est, aujourd'hui encore, l'un de mes plus beau souvenirs.

Je grandissais parmi les "balèses" de l'école toujours en train de chercher querelle, les "normaux" qui étaient entourés de nombreux camarades et les "timides" n'ayant que quelques proches dans leur entourage dont je faisais partie. Je n'étais pas le centre de l'attention, plutôt discret j'essayais de passer à travers les conflis de cour de récréation, attendant de grandir.

Un jour dans cette cour, les deux plus belles filles de ma classe, Sophie aux longs cheveux d'or et Isabelle les cheveux châtain ondulant comme s'ils étaient toujours dans le vent, arrivèrent en courant sur moi, toutes deux l'air complice, elles m'embrassa sur les joues, chacune d'un côté pour me souhaiter mon anniversaire. Transis de timidité, ne sachant que dire, je me trouvai une excuse inventant que ce n'était pas encore l'heure de ma naissance. Je suis incapable de me souvenir de la suite à pars la vision de les voir repartir comme si j'avais lâcher mon ballon à la fête foraine et que je le voyais s'envoler dans le ciel, impuissant. Le souvenir de cet instant de joie, de fierté, resta dans mon cœur comme une écharde dans la main.

Les garçons ne murissent pas aussi vite que les filles.

Je ne réalisai même pas que j'existais pour elles au point de connaitre ma date d'anniversaire. Je n'étais pas si invisible que cela et il me faudra bien des années pour comprendre que je ne leur étais peut-être pas si indifférent finalement, sinon quel plaisir de leur souhaiter à mon tour leurs anniversaires.

C'est l'une des toute premières fois que je manquais de répartie, d'audace, de cran devant ces jolies filles qui m'intimidaient tant. Quel fût été la suite si j'avais eu le courage de leur demander d'être "mon amoureuse" comme on se le disait à ce moment-là ? Le cœur balan, même si je l'avais eu, je n'aurais jamais pu choisir car je les aimais toutes les deux et termina ma primaire seul.

Pas si seul que ça tout de même, depuis la maternelle nous nous suivions de classe en classe et une amitié très forte était née avec Stéphane mon meilleurs copain d'école. L'entrée au collège fût la première expérience ou l'on se rend compte que les chemins de la vie s'écartent et que nos routes se sépares. Pas de téléphone portable, pas d'internet et pour seul moyen de recherche le gros et lourd annuaire téléphonique en papier. Je n'ai pas su dans quel collège il était allé ou s'ils avaient déménagés avec sa sœur jumelle, je ne les ait jamais revus. Ce n'est pas faute d'avoir essayé de les retrouver bien plus tard, mais ne trouvant aucune trace, résigné je devais me rendre à l'évidence que je ne saurais peut-être jamais ce qu'ils sont devenus. Le temps passe et les bouteilles jetées dans la mer internet n'ont pas eu de réponse non plus.

La mémoire commence à me jouer des tours et je n'arrive plus à me rappeler le nom de ce professeur et de tant de camarades qui ont partagés ces années avec moi. Qui sait si j'arriverai à récupérer mes photos d'enfances, j'aimerais tant pouvoir remettre des noms sur tous ces visages anonymes. J'aimerais tant leur dire à quel point ils ont compté pour moi.

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