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Une minute de lecture

Diable, comme ton esprit les submerge, ces traits. Chacune de tes émotions y est subtilement retranscrite, aussi fidèle qu’un bouquin. Mais tu le sais, n’est-ce pas, tu en joues. Avec brio, dois-je dire, tes interventions sont de véritables spectacles. Cette bouche que tu tords exagérément, à laquelle tu imposes des moues cabotines frisant l’arrogance, y tient le haut de l’affiche. Elle se convulse sous tes rires, s’assouplit langoureusement quand elle se sait regardée, se froisse parfois d’ennui. Il faut y démêler le vrai du faux, le cri viscéral des voiles d’apparat. Qu’à cela ne tienne, tes voiles sont un ravissement à contempler. Tu es une hyperbole, une icône de démesure ; l’exubérance de tes expressions s’accorde si bien à tes manières. Je n’en reviens pas de tes manières, elles n’appartiennent à aucun principe, comme si tu avais inventé seul une nouvelle façon de se mouvoir dans l’espace. Une grâce féline, féminine à l’outrance, fondue dans l’amplitude conquérante du geste virtuose. Ta chair n’est jamais au repos, elle bavarde, s’expose, mais ne se livre pas. Sa vivacité animale est trop maîtrisée, trop joueuse pour être naturelle. Tu ne bouges pas ; tu danses, tu poses, tu sculptes tes mouvements pour en amplifier l’affectation. Je vois bien, moi, que c’est un piège. Piège érotique d’abord, puis piège à perception. La précision excessive de tes pantomimes masque leur authenticité, tu ne fais que renchérir sur tes instincts, gonfler la sensibilité qui fuse sous ta peau. On te prendrait pour un comédien quand, finalement, tu es bien plus humain que nous et peines à restreindre ton essence volatile. T’en as un peu bavé, pas vrai ? Une telle domestication du corps déguise souvent l’amertume primale ; tes simagrées ne forment même plus une armure, mais des appels éperdus. J’y lis des vestiges de mélancolie ; de celle qui palpite, qui s’embrase devant la morosité convenue, devant la tiédeur mesquine de l’insipide.

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