Scène 1. Prologue

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Les rideaux s’ouvrent sur un homme pieds nus aux habits de ville, il n'a pas l'air dans son élément. Il est secoué par le vent, mais sa voix reste paisible. Chaussures à la main, il fait face au publique.

VICTOR. Ça fait longtemps que j'aurai dû revenir ici. Pardonne-moi, mère. J'ai été mauvais. Et par-dessus tout égoïste. Même maintenant. Si je viens, c'est pour moi même. Si je suis revenu ici, c'est parce que j'en ai besoin. Enfin, peut-être. Enfin, sûrement.

Je me suis permis de faire une pause, que c'est idiot, une pause maintenant et pas avant. J'aurai du être là pour toi. Quand tu en avais le plus besoin. Les médecins m'avaient affirmé que ce n'était pas très grave et que tu vivrais encore bien dix ou vingt ans.

Temps.

Me voilà encore à me justifier. Je suis ridicule n'est-ce pas ? Je sais très bien que j'ai eu tord, mais, même dans les derniers instants, je continuais de me persuader que je n'avais rien fait de mal. Effectivement, je n'étais pas la cause de ta maladie. Pour ton moral, en revanche, j'aurais pu être là, j'aurais pu t'aider. Tu aurais été heureuse.

Enfin, peut-être. Enfin, je ne sais pas. Je ne suis pas la source de tous tes malheurs. Je ne dis pas non plus que sans moi tu ne pouvais pas être heureuse. Ca serait prétentieux. J'aurai seulement pu améliorer, un peu, ton quotidien. Réduire, un peu, tes peurs et tes peines.

Oui, j'aurais dû revenir. Et le vent me le rappelle aujourd'hui. Il se venge. Je le comprends. C'est pour ça que je vais rester encore un petit peu. Encore quelques temps, debout. Les pieds nus sur le sable gelé. Je lui donne la possibilité de se venger un peu plus. J'aurai au moins mérité ça. Seulement ça.

Temps.

J'ai retrouvé le vélo chez le voisin. Tu as sûrement dû le donner à sa petite fille. Tu as toujours été généreuse. Trop généreuse. Oui, tu donnais trop. À des gens qui n'avaient pas demandé. Et à des gens qui demandait toujours plus. J'étais témoin, je ne voulais pas faire pareil. Je suis devenu l'inverse, tu vois, égoïste. Je ne donne plus rien. Plus rien d'autre à part des mots. Des mots qui ne me concernent même pas, qui ne m'appartiennent même pas. Je ne me rappelle plus de la dernière fois où j'ai été tendre, puisqu'à la moindre attente, la moindre chose qu'on voulait de moi, je n'étais déjà plus là. Déjà parti, et très loin.

Peut-être que quand j'étais petit, vraiment petit, j'étais ce qu'on appelle gentil. Peut-être que j'étais comme toi. Peut-être que j'étais ce que je déteste aujourd'hui. Rien donner ou trop donner. Je n'ai pas eu d'autres exemples. Je sais que tu as souffert. Papa, il vait l'air heureux, mais moi je crois que, finalement, je ne le suis pas.

Et vous ? N'auriez vous pas une réponse ? Vous l’avez vu grandir, vous m'avez vu grandir, alors dites-moi. Dites-moi ce qui a fait nos différences. Dites-moi ce que j'aurais dû faire, ce que j'ai fais, tout ce que je dois réparer désormais. En moi-même et chez les autres que j'ai blessés.

J'ai besoin de savoir, quelque chose, n'importe quoi. Mer Aidez-moi.

Les rideaux se ferment.

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