Chapitre 26 : Lapin chasseur
- Rosa, Robert... sniif... ça y est...
- Calme-toi Lydia, tu m'angoisses là.
Elle souffla dans le combiné pour retrouver son souffle. L'émotion la submergeait. Elle avait su rester forte jusque là, les nerfs lâchaient de soulagement.
- Robert vient de se réveiller !
Les épaules de Rosa s'abaissèrent, elle libéra l'air contenu dans ses poumons. Enfin, une bonne nouvelle.
- Comment se sent-il ?
- Je n'ai pas pu lui parler, les médecins sont avec lui. J'attends.
- Tu veux que je vienne ?
- Comme tu veux Rosa. Si c'est important pour toi, viens.
- Oui, merci. J'arrive alors.
Jordan lui proposa un taxi pour y aller plus vite. Il la déposa devant les portes de l'hôpital et repartit. Rosa en fut étrangement soulagée. Elle avait apprécié la parenthèse que lui avait offerte le jeune américain, mais elle devait affronter le présent, faire face aux épreuves que la vie mettait sur sa route. Elle demanda son chemin et trouva les enfants de Lydia et Robert dans la salle d'attente. Ils s'empressèrent de la prendre dans leurs bras comme pour se rassurer les uns les autres.
- Comment va-t-il ?
- Les médecins disent qu'il devrait récupérer rapidement. Maman est allé le voir. Pour l'instant il ne faut pas plus d'une personne. Il lui faut beaucoup de repos.
Finalement, Rosa patienta dans la salle d'attente mais n'alla pas voir Robert. Sa famille était évidemment prioritaire. Elle attendit et proposa d'aller chercher des cafés. Quand Lydia sortit, les yeux rougis, elle arborait cependant un sourire.
- Merci d'être là Rosa. Ne restons pas ici, Robert s'est endormi. Nous serons mieux à la maison pour parler.
Lydia passa son bras sous celui de Rosa et ils quittèrent tous les quatre l'établissement.
Les jeunes reprirent le cour de leur vie, ayant des cours à travailler. Rosa se retrouva au comptoir de la cuisine, une tasse fumante de thé devant elle, une autre devant son hôte.
- Comment tu te sens ? commença la jeune femme.
- Je viens bien, je suis rassurée maintenant.
- Merci Lydia.
- De quoi ma belle ?
- D'avoir partagé ta force avec moi. Je crois que je n'aurais jamais tenu le choc si tu ne m'avais pas soutenu. Je bénis chaque jour d'avoir fait votre rencontre à tous les deux. Vous avez fait plus pour moi en quelques jours que ma propre mère.
Lydia lui prit la main et exerça une pression plus importante afin de lui montrer son soutien. Elles passèrent la soirée tranquillement, allant se coucher tôt, fatiguées par la précédente nuit et par l'angoisse de la journée. Rosa avait pris soin de prévenir le restaurant qu'elle reprenait le travail dès le lendemain. Elle ne voulait pas laisser tomber la brigade et elle avait besoin de s'occuper aussi. La cuisine était autant un échappatoire qu'une thérapie.
Elle allait s'assoupir lorsque son téléphone sonna. Marc.
- Hmm Allô ?
- Oh je te réveille désolé ! Je n'arriverais pas à me faire à ce décalage horaire.
- Salut Marc.
- Salut Rosa, comment vas-tu ?
- Mieux, Robert s'est réveillé, je suis soulagée.
Marc laissa échappé un soupir de soulagement.
- Tant mieux, je suis soulagé moi aussi. Tu l'as vu ?
- Non, j'ai laissé la place à sa famille. Il est fatigué, il a besoin de repos. Mais il devrait s'en sortir sans trop de dommage, enfin cela aurait pu être pire.
- Je comprends. Tu as réfléchi à ma proposition ?
- Je ne sais pas Marc. Je me suis rendue compte aujourd'hui que cela ne me ressemblait pas de tout quitter, d'abandonner le navire, de laisser les ennuis derrière moi. Je veux régler cette histoire une bonne fois pour toute.
- Que s'est-il passé aujourd'hui pour que tu penses ainsi ?
- J'ai passé la journée à faire visiter la ville à Jordan, le fils du chef. C'était super, cela m'a permis d'oublier quelques heures tous mes ennuis. Mais quand Lydia a appelé pour me dire que Robert était réveillé, ça a été comme une claque.
Savoir que Jordan avait passé la journée avec Rosa réveilla la jalousie du chef. Sanders lui avait bien dit que son fils avait apprécié sa cheffe. Il espérait qu'elle n'avait pas changé de sentiments à son égard. Il déglutit et prit sur lui. Ce n'était pas le moment pour se montrer jaloux. Il ferait son possible pour aider Rosa et si en plus il pouvait faire en sorte qu'elle le rejoigne vite, ce serait parfait.
- D'accord ma belle, je comprends mais comment vas-tu t'y prendre ? La police est sur l'affaire depuis un sacré moment et pour l'instant sans résultat.
Rosa soupira :
- C'est bien ça le problème, il faudrait que je lui tende un piège. C'est moi qu'il veut, hé bien donnons-lui ce qu'il veut, cela le fera sortir de son trou !
- Je ne suis pas fan de l'idée que tu sois l'appât, mais je conviens que ce serait certainement la solution la plus efficace.
- Tu veux bien m'aider ? Je ne crois pas que Lydia le fera. Et puis moins il y aura de personne dans la confidence moins il y aura de potentielles fuites.
- Qu'est-ce que je peux faire ? Je suis de l'autre côté de l'océan !
- C'est parfait ! Je t'envoie les coordonnées du flic qui me suit depuis le début.
- Tu as confiance en lui ?
- Oui, il s'est démené pour m'aider à l'époque.
- Entendu, je suis l'intermédiaire. Que dois-je lui dire ?
- Explique-lui mon idée. Que je vais faire croire que l'agression a été la goutte d'eau de trop et que je ne veux pas que mes amis subissent.
- Hum oui ça se tient. Je l'appellerai demain lorsqu'il fera jour en France et je t'informe de ce qu'il a dit ensuite. Tu veux que ça ait lieu quand ?
- Le plus tôt possible. Je ne supporte plus cette situation, il mérite d'être emprisonné. Dès qu'il sera sous les verrous, je te rejoindrai.
Marc reçut cette phrase en plein cœur. Si elle voulait agir vite, c'était pour le retrouver. Elle était donc aussi impatiente que lui de le retrouver. Il avait encore rêvé d'elle, de cette nuit où il n'était pas allé plus loin qu'un flirt poussé. Dans son rêve, ils ne s'étaient pas arrêtés, il l'avait faite sienne.
- J'ai hâte de pouvoir te prendre dans mes bras.
- Tu me manques aussi, je n'ai plus autant l'envie de créer de nouvelles recettes. Tu as sûrement des tas de choses à me faire découvrir.
- Pas tant que ça, mais oui, je voudrais partager ça avec toi.
Rosa sentit que Marc n'était pas si heureux de son aventure américaine, elle en fut peinée et étrangement rassurée, elle avait tellement peur qu'il préfère Los Angeles à la France, une américaine contre elle, la petite française.
- Je vais te laisser, il doit être tard et tu as besoin de repos, ajouta-t-il.
- Merci d'avoir appelé et de faire tout ça pour moi.
- Ce n'est rien, je suis heureux de pouvoir t'aider. Dors bien Rosa.
- Bonne journée à toi.
Voilà, elle avait enclenché les choses. Maintenant, elle devait être forte. Elle refusait d'être encore une fois la victime de cet homme. Elle ne serait plus le lapin dans la lunette du chasseur.
Le lendemain, quand elle reçut des nouvelles de Marc qui avait contacté à la première heure le policier, elle avait ressenti une chaleur au cœur. Son courage n'avait pas disparu, bien au contraire, elle était dorénavant déterminée.
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