Hors des sentiers battus 29/

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Car il pouvait aussi poursuivre ainsi. Son notariat se portait bien, après tout. Ses liens avec sa famille se renforçaient. Les Fêlés... l'ombre de Bernard planait. Adelin décida de les faire signer au cours de la semaine suivante, que cette partie au moins puisse avancer.

Quelque part, sa vie diurne se portait bien. Lui restait à évaluer comment poursuivre son existence nocturne, qu'il menait depuis dix ans déjà.

Quoique même sa vie diurne n'allait pas si bien. Albin lui-même le prenait pour un hérétique. Et Bathilde, dans tout cela ? Il ne la verrait pas l'après-midi, sa seule certitude la concernant se résumait à cela. Il devait d'abord savoir comment il la considérait.

Entonant le dernier chant de la prière, Adelin se laissa porter par un fugace sentiment d'appartenance. Sa voix venait se fondre en un tout, avant que ne vienne le silence, terrible et sentencieux du dernier recueillement des fidèles.

Adelin suivit sa famille jusqu'au dehors, où il s'esquiva en direction de la maison de l'apothicaire. Voilà bien trois mois déjà, qu'il ne prenait plus cette direction. Depuis Bathilde... De là, il rejoignit les bois et entreprit une marche jusque la clairière de l'Ail aux Ours.

Ses pensées, au lieu de s'apaiser s'éparpillaient. Ses différentes affaires en cours s'imposaient, il ne parvenait pas à trancher sur son avenir avec sa première copine. Quelque part, il ne voulait pas prendre de décision. Simplement, que la vie suive son cours...

Oui, il espérait encore que la normalité fraîchement arrivée dans son existence perdure. Une copine, un travail, un avenir commun, la famille qui s'agrandit, la réputation qui s'accroît et amène toujours plus de richesse ainsi que de pouvoir, la foi guidant leur existence et, pourquoi pas, une extension territoriale initiée par le foyer qu'il fonderait avec Bathilde près de la Forêt Rouge...

Adelin soupira, agacé. Trop de confusion dans son esprit. Les projets des siens s'imposaient aux siens, les occultaient. Il en revenait encore à la même question : que voulait-il ?

La paix. Une existence simple. Le tumulte du notariat l'amusait, cette voie demeurait une option. Les Fêlés... il aviserait en s'adaptant. Ce qui l'empêchait de choisir quelle solution choisir. Bathilde lui apportait surtout du chaos.

Fronçant les sourcils, Adelin s'empressa de lui trouver des excuses. Comme ses sœurs lorsque leur copain du moment montrait sa part sombre... Bon sang, comment pouvait-il excuser la femme qui finançait sciemment ses assassins ? Sans rien lui dire, sans lui demander d'aide pour s'en sortir... Après ce qu'elle avait traversé, comment osait-elle se venger sur lui de la sorte ?

Mais il devait manquer d'informations. Enfin, il était aberrant d'œuvrer à la mort de la personne que l'on aime...

Pétrifié, Adelin en perdit le fil de ses pensées. Ses paroles, la semaine précédente, jaillies sous le coup de la colère portaient leur lot de vérité. De nouveau, son cœur se brisa. Quel imbécile. Les Fêlés l'avaient prévenus. Elle n'aimait que son statut et ses finances.

Mais, quand elle le regardait... à quand remontait son dernier regard admiratif et plein d'estime ? Adelin s'assit au bord de la fissure déchirant la clairière, désespéré. Sa raison, sa logique sommaient à ses émotions de saisir l'évidence. Les larmes lui montèrent aux yeux. Non, non il ne voulait pas. Mais l'illusion n'était pas douce. Pas assez pour qu'il s'y emmitouffle et puisse tout nier en bloc.

Un bruit le fit sursauter. De son mauvais côté, évidemment. L'Allumé mit ses doigts en triangle, et se contorsionna pour savoir qui approchait. D'après la disposition des métaux, un homme maigre et désargenté, sans arme autre qu'un poignard de piètre qualité. À la silhouette et à la démarche...

L'Allumé le salua à la manière des Fêlés, Souffreux s'installa à son côté.

  • Toi aussi, t'vas là quand ça va pas ?
  • ... C'est la première fois.
  • Trop d'trucs en même temps ?
  • Ouais.
  • Tu veux en causer ?

Adelin prit le temps de réfléchir.

  • Trop le bordel dans ma tête.
  • Pour ça que t'as une plus sale gueule que d'habitude !

François avait vraiment un don pour le dérider. Cela lui permit de se rendre compte que ses épaules souffraient des tensions continues. Un joint surgit dans son champ de vision, déjà roulé et prêt à fumer.

Avec un léger soupir, Adelin accepta et leur alluma d'une flamme du pouce leur première consommation du jour.

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