Chapitre 23 : Plan
La scène que trouve Geraint au rez de chaussé est pour le moins surprenante. Deux camps s’affrontent. D’un côté, Siarl, rouge de colère, fièrement armé de son balai, semble tout droit sorti d’un des romans de chevaleries qu’il a pris pour l’habitude de dévorer religieusement maintenant. Il est prêt à en découdre , bien décidé à défendre son royaume - le bar - et ses habitants. Derrière lui se tient Tesni, qui visiblement a fait demi tour. Elle reste en retrait mais la main qu’elle cache dans son sac indique qu’elle peut à tout moment dégainer en cas de besoin. En face d’eux se tient l’inconnu, un homme, le milieu de la vingtaine, des boucles brunes en pagaille et des yeux dépareillés qui marque presque autant que l’uniforme qu’il porte, celui, effectivement, d’un agent de grade median. Il a placé ses mains devant lui en signe d’appaisement. Un milicien seul, ce n’est pas banal. Surtout en uniforme. Encore plus hors des quartiers réservés au gens de sa classe. Certains diraient même que c’est dangereux et complètement suicidaire.
Siarl s’entête , répète furieux
« Puisque je vous dis qu’on est fermé. On ne sert actuellement de l’alcool à personne, même pas à vous contre tous les intimidations et toutes les menaces du monde. Allez ailleurs !
- Encore une fois, monsieur , je ne viens pas pour ça. Je suis là pour la visite de contrôle, elle doit être faite tous les ans . C’est dans ce but que je dois m’entretenir avec le propriétaire. »
Cela ne calme pas du tout Siarl qui se sentirait presque pousser des ailes. C’est presque inespéré de trouver un de ses ennemis « naturels » , dirons nous, seul et sans défense. Geraint soupire. C’est presque de l’inconscience, il n’a pas du tout penser, que, potentiellement, ce cher militaire avait une peletée de collègue qui attendait son retour dehors ou au coin du pâté de maison.
« On a payé nos impots, reprend un Siarl vociférant , et on est en règle. C’est bon, pas besoin de vérifier.
-J’en suis absolument certain mais je vérifier quand même. C’est mon travail, vous savez, de vérifier. Vous ne voulez vraiment pas aller chercher votre patron ?
- Vous mentez, vous venez forcément pour autres choses, j’ai jamais entendu parler de milicien qui vérifiait comme ça sans raison les bars. A tous les coups, vous avez reçu une fausse dénonciation sur nous et vous venez arreter quelqu’un. C’est ça, votre métier, arrêter les gens.
-Je vous promets, je vous jure, sur la dévotion que je porte à l’Architecte des Astres que je ne viens arrêter personne. Regardez, je n’ai même pas d’arme
- Siarl , calme toi , je prend le relais . »
Geraint décide que la mascarade, quoi que très drôle grace aux caractères supposé pour l’un, connus pour l’autres, des protagonistes, a assez duré. Siarl grogne un peu. Le type d’en face aurait montrer un tant soit peu plus d’autorité ou de véhémence, il aurait battu en retraite sans demander son reste. Il ne fait pas bon d’avoir un milicien contrarié à proximité. L’intervention du Patron a aussi calmé Tesni qui a sorti la main de son sac , signe que la situation est devenu moins tendue. C’est à elle qu’il s’adresse le premier.
« Tesni. Prend un billet dans la caisse et va à l’office postale du coin de la rue. Ton article n’arrivera jamais à temps si tu l’ammêne toi-même. Télégraphie-le et revient. »
La jeune femme hoche la tête et obeit , s’éloignant non sans avoir tapoter l’épaule gauche de son accolyte en signe de trêve. Geraint reporte son attention sur le milicien.
« Donc. Vous. Une visite de contrôle. Vraiment.
- En tout cas, c’est la raison officielle de ma venue ici et ce que je mettrais dans le rapport à mes supérieurs.
- Et la raison officieuse ?
- Ca dépend . Vous êtes Geraint ?
- Peut être. Pourquoi vouloir voir Geraint ?
- Si ce n’est pas vous, ça ne vous regarde pas. On m’a appris qu’un message devait être toujours remis à son propriétaire légitime. Et puis, j’aurai été menacé par un homme avec un balai et une femme avec une arme dans son sac à main pour rien. »
Geraint lève un sourcil , surpris qu’il ait remarqué la manoeuvre de Tesni
« Ce n’est probablement pas la première fois qu’on vous menace, surtout si vous faites vos rondes et missions seuls.
- Effectivement . J’en suis à 6 tentatives d’agression cette semaine. La dernière fois , c’était avec un couteau de cuisine . Êtes vous Geraint ? On m’a dit de demander Zuben de Librae aussi. Je viens de la part de Deneb. Je crois que c’était ça le code convenu entre vous. Que je demande Zuben de Librae.
-Bien ! S’exclame Geraint satisfait . Les pièces de l’engrenages s’enclenchent à deux semaines de l’échéance, c’est une bonne chose. Je suis Geraint, tu l’as bien compris. Je suis aussi Zuben. Mais cela fait deux ans que personne ne m’avait appelé ainsi. Je ne fais plus usage de ce surnom.
-Patron ? » Siarl écarquille les yeux tandis que Geraint fait demi-tour vers l’escalier pour remonter.
« Dans le bureau. Tous les deux. Ce sera plu simple. Et pose ton balai. Il serait malvenu que tu blesses ton futur partenaire de mission.
- … Quoi ? »
Le milicien soupire, visiblement autant ravi que Siarl par la nouvelle. Siarl d’ailleurs s’empresse de monter à sa suite.
« Mais c’est impossible !
-Quoi donc ? « Répond calmement Geraint
- Ce ne peut pas être mon partenaire , il est de la quatrième caste!
-Tesni aussi et ça ne t’a jamais posé aucun problème pour travailler avec elle.
-Mais c’est un milicien ! Si ça se trouve, il m’a déjà arrêté …
- Impossible, je n’ai jamais fait parti des brigades d’intervention, retorque l’officier qui leur emboite le pas.
- Qu’est ce que ça peut faire ? Grogne Siarl
-Ce sont les brigades d’interventions qui appréhendent les suspects.
-Mais je ne suis pas suspect !
- Si on vous a arrêté un jour, ce que vous l’avez été. »
Geraint lève les yeux au ciel et ouvre la porte du bureau. Il échange quelques mots avec Seren avant que celle ci ne quitte la pièce accompagnée d’Edern, laissant les trois hommes seuls
« Commençons. » Geraint s’appuie contre son bureau, pose sa canne à côté de lui. « Avant que Tesni ne revienne, je vais vous expliquer votre futur rôle. Siarl, quels ont été tes exercices dernièrement ?
-Déchiffrer les panneaux publicitaire. » Marmonne Siarl, pas ravi du tout.
- L’autre exercice, Siarl.
- … Ah ! Enfoncer les petits trucs qu’à rapporté Edern dans le trou carré de la sorcière qui compte! »
Le militaire penche la tête et roule des yeux. Geraint ignore et continu à son adresse.
« Toi, tu sais te servir d’un écran tactile, n’est ce pas ? C’est l’une des compétences que j’avais demander à Deneb.
-Oui, j’en utilisais à mon précédent poste.
- A vous deux, vous allez pouvoir obtenir les données que nous recherchons. Je vais vous offrir une heure et trente minutes très précisément d’intrusion en toute sécurité dans la salle des commandes de la milice, soit l’endroit le plus sécurisé de cette planete. »
Un long silence s’installe, glacial et lourd. La salle des commandes, c’est le saint des saints de la milicie. Pour Siarl, ça relève même de la légende urbaine. On dit que tous les secrets de l’Agora y sont consignés. Siarl lève lentement la main .
« Qu’est ce qu’il y a ? Une question ?
- Oui. C’est dangereux ?
- Oui. Mais je suis en train de tout faire pour anticiper les moindres risques. Si jamais j’ai un seul doute, la mission sera annulée. C’est moi qui décide.
- Qu’est ce qui dit qu’il est fiable , lui. Siarl désigne avec force son futur compagnon de route. Son métier, c’est de mettre les gens en taule !
-Pour la vingtième fois , je n’arrete personne. Je suis à la brigade sanitaire ! Tout ce que je peux faire, c’est mettre des contraventions.
-Et avant ? Tu as dit que tu faisais autre chose avant .
- Avant, j’étais aux douanes. Je contrôlai les manifestes de vol!
- Sacré mise au placard, intervient Geraint surpris. Passer du corps le prestigieux aux « brigades sanitaires.
-Les brigades sanitaires , c’est pas gens qui vérifient que les prostituées sont en règle et ne refile des trucs aux clients » demande innocement Tesni qui reparait enfin derrière.
- Non ! Ca, c’est la brigades des moeurs ! Vous le fait exprêt ! Je contrôle la qualité des denrées alimentaires D’ailleurs, pour que mon alibi tienne, il faut que j’inspecte au moins votre cave ! «
Geraint retient un rire , se forçant tant bien que mal à conserver un semblant de sérieux.
« Très rapidement. Le rôle de Tesni dans le mission sera d’être votre ange gardien. Elle surveillera l'extérieur et déclenchera le plan d’extraction en cas de soucis. D’autres questions ? »
Il eut pour réponse un silence.
« Personne ? Siarl, tu emmènes notre invité à la cave s’il te plait ? Qu’il puisse faire ce qu’il a à faire . »
Nouvelle protestation du jeune homme qui obtempère difficilement et à contre coeur, suivi du milicien tout aussi retors. Tesni analyse la scène avec attention .
« Patron, ils vraiment travailler ensemble ? Attentive au début de dispute qui se fait entendre dans l’escalier.
- Oui
- Eh beh … Que la dame du Destin nous favorise. J’irai prier et mettre de l’encens. Peut être un ex-voto aussi. On va en avoir besoin.
-Tesni ?
- Oui ?
- Dès qu’il sort d’ici, file le. »
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