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Le lendemain, une douleur inattendue le réveilla. Une pierre tombale de honte l’écrasa en se souvenant de ce qu’il avait fait, souillé à jamais, marqué au fer rouge de l’infamie. Puis le transport extraordinaire qu’il avait vécu revint. Deux fois ! Pourquoi cette pratique était-elle repoussée avec tant de mépris, alors qu’elle était si… il était incapable de mettre un mot positif. Il se leva pour soulager son ventre : c’était son heure ! La douleur, faible, lui rappela que c’était par là qu’il avait péché. Mais elle ravivait ce qui avait suivi. Comment peut-on associer l’endroit le plus sordide du corps et le plaisir ? Oui, c’était vraiment de la perversion. Mais il fallait l’avoir fait pour savoir ! Oui, c’était dégueulasse, mais c’était la seule voie pour ce déferlement qu’il avait hâte de retrouver, cet emportement qui vous faisait sentir exploser de vie.

En revenant dans la chambre, il avait le plus beau spectacle imaginable : Macodou dormait, les bras au-dessus de la tête, étendant encore sa finesse. Ce garçon, lui, uniquement lui, le rendait fou. Les petites tresses entouraient son visage apaisé, si féminin dans sa beauté. Aucune trace de barbe au matin, quel être étrange ! Même sa couleur ajoutait un plus. Dans la pénombre, cette couleur était plus sombre, plus mystérieuse, plus attirante. Hier, au soleil, c’était un marron chaud, un peu caramel. C’était une belle couleur ! Rien à voir avec le noir des Noirs !

Il s’était posé doucement auprès du « Beau au bois dormant », survolant son aisselle au parfum entêtant, sa bouche pour sentir son haleine soufflée doucement entre ses lèvres entrouvertes. Il survola ce visage, cette tête, d’une main pleine de respect, descendit sur la poitrine pour arriver à ce pubis et ce sexe net comme celui d’un enfant. Entre ses jambes écartées, parfaitement vertical, son phallus érigeait sa vigoureuse jeunesse. Contrairement au sien, il n’avait pas de prépuce, le transformant ainsi en un totem vénérable, souligné par un rai de lumière. Quelle perfection ! Avait-on le droit d’admirer ainsi le corps d’un autre ? De projeter de l’envie ? De vouloir le posséder, de se fondre en lui ?

Gilles ne voulait pas réveiller son « amant », il ricana quand ce mot se germa dans son esprit. Il en était donc là ! « Amant d’un homme », d’un enfant presque. Il secoua la tête pour ne garder que le beau. Il voulait juste rendre grâce à ce qu’ils avaient partagé par de petits baisers. Une main venue délicatement dans ses cheveux l’obligea à lever les yeux vers l’heureux propriétaire de ces attributs. Y lisant un encouragement, il approcha sa tête, puis sa bouche. Entre un dégout insurmontable et une envie irrépressible, il hésitait. La veille, il n’avait pas pu. Si leur relation devait s’arrêter là, et ce serait une bonne chose, autant avoir essayé ! Il le saisit à pleine bouche, stoppa. Étrange impression ! Il imita les mouvements de lèvres, redoutant une maladresse. Le petit gémissement lui fit comprendre qu’il était sur la bonne voie. Jouer de sa langue avec cet objet chaud et doux était amusant. Peu habitué, il ne sentit rien venir et accepta avec étonnement cette fontaine de jouvence, qu’il avala : un reste de son éducation qui interdisait de cracher et de recracher. Macodou lui prit la tête et lui posa un baiser, un sourire dans les yeux.

— Tu n’étais pas obligé…

— Je voulais savoir !

— Gilles, j’ai beaucoup aimé ce que tu m’as donné. Mais je devine que cela ne te plaît pas forcément.

— Toi aussi, tu m’as beaucoup donné.

— Tu as aimé ?

Pourquoi reposait-il cette question si gênante ? Il avait déjà répondu, forcé de dire « oui ».

— Je ne sais pas. C’est agréable, c’est très fort, mais c’est une perversion. On ne doit pas le faire !

— On ne doit pas avoir de plaisir ? Pourquoi ?

— Pas entre deux hommes !

— Tu as aimé ? Tu as eu du plaisir ?

Pourquoi lui embrouillait-il la tête ?

— Oui. Mais je ne recommencerai pas !

— Je comprends ! Nous allons donc nous quitter (le ventre de Gilles se serra). Avant, tu viens me dire au revoir ?

Le sourire était irrésistible. Trop de gentillesse et de douceur. Pour ne pas le blesser, Gilles se remit contre lui, la tête à nouveau sur sa poitrine. Il aimait ce contact. Il aima le bras qui le serra. Il se sentit gonfler. Peu importait ! C’était fini.

— On peut se dire adieu. Si tu veux, bien sûr !

— Comment ça ?

— Une toute dernière fois ?

Il s’affola. Ses sens criaient OUI, sa raison n’était plus là. Une dernière fois ! Il n’y aurait plus jamais une occasion. Il l’avait déjà fait. Le refaire avant de se séparer ne changerait rien. Mais dire oui, c’était reconnaitre qu’il aimait ça.

— Que veux-tu dire ?

— Tu as entendu, l’autre jour, quand je t’ai dit que j’étais Macodou ou Codou. Des fois, je me dis que je suis Codou, une fille.

— Oui ?

— J’aimerais que tu me prennes, comme tu l’as fait cette nuit.

C’était très cru. Parler ainsi d’un désir sexuel le choqua. Sa réaction n’en tenait pas compte. Macodou le flatta, le revêtit, se mit en position. Ils étaient prêts. Gilles trouvait cela trop brutal, trop bestial, de réduire cette dernière union à un rapport sexuel. Il commença des caresses, aussi stimulantes pour l’un que pour l’autre, suivies de longs baisers. Ces préliminaires auraient pu durer, tellement ils étaient en communion. Macodou l’invita. Il se concentra pour durer le plus longtemps possible et son relâchement arracha un soupir de joie à Macodou.

— Merci, Gilles. C’était très bon.

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