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Je crois d'ailleurs que le meilleur moyen de s’en rendre compte est d’entrer dans sa chambre. 

On y trouve tout d’abord, sur une longue étagère à l’entrée, une bonne centaine de petites figurines de grimpeurs peintes à la main. En s’y intéressant de plus prêt, il est amusant de voir que chaque alpiniste est équipé d’un matériel complet: piolets, cordes, crampons, mêmes les mousquetons ne sont pas oubliés. C’est assez bien fait. 

L’une d’entre elles est assez troublante: debout sur un petit rocher, un alpiniste tente d’en sauver un autre pendu dans le vide au bout d’une corde. Le modèle est trop petit pour représenter les expressions faciales, mais on lit incroyablement bien dans les positions des corps le drame et l’urgence que ces deux malheureux vivent. A côté, les autres modèles semblent finalement assez niais et sans histoire. 

Contre le mur de droite se trouve le lit de Jean: un sac de couchage Decathlon posé à même le matelas. Le soir, il n’est pas question de se servir de sa lampe de chevet, il lit à la frontale.

Le plus beau, enfin, est sur les murs. De l’entrée jusqu’au fond de la chambre, ils sont entièrement recouverts de grands posters National Geographic en couleur représentant les plus hauts sommets mondiaux. Tous dans l’Himalaya. L'Himalaya, disons que c’était pour Jean une sorte d’Atlantide des sommets. Un pays légendaire et mystérieux bloqué dans les nuages qui exerçait sur lui une fascination sans borne. 

Comme si l’on se promenait dans un musée, on pouvait apprécier dans le détail les formes et singularités de l'Annapurna, du Nanga Parbat, du Manaslu, du Dhaulagiri, du Cho Oyu, Makalu, Lhotse, Kangchenjunga, K2 et enfin, sur poster un peu plus grand que les autres, seul et bien en évidence sur le grand mur du fond, de L’Everest. Sur celui-ci, on pouvait voir en s’approchant que Jean avait tracé au feutre plusieurs itinéraires d’ascension. Certains étaient barrés, légèrement rectifiés. Sur d’autres, il était passé plusieurs fois, comme pour les valider. Il avait visiblement bien étudié la chose. 

Je veille toujours à ce que Jean ne soit pas là avant de visiter sa chambre car s’il me voit rien que prêter une seconde d’attention aux posters, il a le don de m’embarquer dans des récits d’expéditions sans fin: de macabres ascensions catastrophes dont personne n’est revenu, le fameux débat sur l’utilisation d’oxygène à partir de 8000 mètres, et j’en passe. C'est interminable. 

Au fond, Jean n’a qu’un seul rêve, les gravir toutes. 

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