Chapitre 5

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Salva attrapa une bière que le serveur venait de lui poser et commença à expliquer son projet avec un enthousiasme démesuré. Il parlait avec les mains, mimant des scènes imaginaires, ponctuant ses phrases d’exclamations théâtrales.

— Tu vois, on fait des vidéos qui déchirent, mais pas juste des conneries. Non, mec, un truc qui raconte notre vie. Un peu à la Californication, mais version Forbach ! On met en scène nos galères, mais avec humour, tu vois le délire ?

Salva leva sa bière comme pour porter un toast à cette idée révolutionnaire.

Nicolas, assis en face de lui, souriait discrètement, ses doigts jouant machinalement avec le bord de son verre. Il écoutait son ami déverser un flot d’idées, à la fois sceptique et amusé. Salva avait toujours des projets. Des grands, des fous, souvent trop ambitieux pour vraiment voir le jour. Pourtant, derrière ce flux continu de rêves inachevés, Nicolas voyait autre chose. Il voyait un homme, tout comme lui, qui cherchait une échappatoire, un moyen de donner un sens à sa vie dans un quotidien qui, parfois, semblait désespérément médiocre.

Salva s'arrêta un instant pour boire une longue gorgée de sa bière, puis posa son verre avec fracas.

— Tu te rends compte, Nico ? On est faits pour ça. Les gens adoreraient voir des mecs comme nous, des gars qui galèrent mais qui ne lâchent rien. On devient des putains de stars, et je te parle même pas des sponsors, les marques vont se battre pour nous avoir.

Nicolas hocha la tête, laissant Salva poursuivre son monologue.

— Mec, toi, tu joues ton rôle de gars blasé, mais tellement attachant. Et moi, je suis le type hyperactif avec des plans farfelus. On se complète parfaitement, c’est ça le truc !

Un sourire en coin apparut sur les lèvres de Nicolas. Salva avait cette manière de rendre n'importe quelle idée incroyable, même si elle était complètement insensée. Il savait que cette énergie venait du même endroit que la sienne, de ce besoin de s’évader, de se réinventer.

— Et pourquoi pas ? finit par dire Nicolas, d’une voix posée. Ça ne coûte rien d’essayer.

Salva hocha la tête, un grand sourire satisfait aux lèvres.

— Exactement ! Voilà le Nico que je connais. On va cartonner, mec, je te le dis.

Ils restèrent là un moment, à parler de ce projet qui semblait prendre forme dans l’esprit bouillonnant de Salva. Nicolas, malgré ses doutes, se laissait peu à peu embarquer par l’enthousiasme contagieux de son ami.

Au fond, il savait que cette folie était exactement ce dont il avait besoin. Ce projet, aussi improbable soit-il, était peut-être la première étincelle d’une nouvelle aventure, un chemin vers autre chose. Et même si cela ne menait nulle part, au moins ils auraient essayé, et c'était déjà mieux que de rester coincé dans le quotidien.

Salva, lui, débordait toujours d’énergie. « Mec, je te jure, dès demain, on commence à tourner. J’ai déjà quelques idées pour les premiers épisodes. T’inquiète, on va gérer ça comme des pros. »

Nicolas sourit une nouvelle fois, levant son verre pour trinquer à cette nouvelle folie. « À nous deux, alors. »

Ils burent ensemble, le poids du quotidien semblant s’alléger, ne serait-ce qu’un instant.

Salva attrapa sa bière, prêt à poursuivre sa tirade, mais quelque chose dans le regard de Nicolas l’arrêta. Son ami semblait hésiter, comme s’il cherchait à révéler un secret lourd.

— Sinon... J'ai appris un truc sur Astride... par hasard, commença Nicolas, le regard fuyant.

Salva haussa un sourcil.

— Encore un truc ? Elle t'en a déjà fait voir des vertes et des pas mûres. Qu’est-ce qu'il y a cette fois ?

Nicolas soupira profondément.

— Elle est enceinte. De son nouveau gars.

La surprise éclata sur le visage de Salva.

— Attends, quoi ?! Ça fait même pas trois mois que vous êtes séparés !

Nicolas acquiesça, le sourire amer.

— Ouais, je sais... c’est ça le problème. Je doute même d’être complètement hors course dans cette histoire.

Salva fronça les sourcils, visiblement confus.

— Comment ça ?

— Avant que je me barre de la maison... on a couché ensemble. Moins d’une semaine avant que je découvre qu'elle me trompait. Tu te rappelles qu’elle le voyait déjà quelques semaines avant qu'on se sépare ? Eh ben, entre tout ça, on a eu cette... dernière nuit.

Salva laissa échapper un sifflement.
— Putain, tu crois que c’est possible ? Que ça soit toi le père ?
Nicolas baissa la tête, fixant son verre comme si la réponse s’y trouvait.

— J'en sais rien. Et c’est ça qui me ronge. Elle ne m'a jamais rien dit directement, je l'ai appris comme ça... par un hasard. Et depuis, je n’arrête pas de me demander... si cet enfant pourrait être le mien.

Salva posa sa bière doucement, réalisant l’ampleur de ce que Nicolas venait de dire.

— T’as le droit de savoir, mec. Si c’est ton gamin, ça change tout. T'as pensé à lui en parler, à Astride ?

Nicolas éclata d’un rire amer.

— Lui en parler ? Après sept ans de mensonges ? Elle m’a caché qu’elle allait voir son ex pendant tout ce temps. Tu crois vraiment qu’elle va être honnête maintenant ?

Salva hocha la tête, comprenant l’ampleur du dilemme.

— Ouais, c’est pas simple. Mais t’es coincé, là. Soit tu fais rien, soit tu creuses pour en avoir le cœur net... même si ça fait mal.

Nicolas se perdit dans ses pensées, la possibilité de cet enfant lui pesant sur les épaules comme un fardeau qu’il ne savait pas comment porter.

Salva posa son verre, prêt à réagir, mais Nicolas reprit avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit.

— Tu sais comment je l’ai découvert ? On est toujours sur la même mutuelle. Celle de mon ancien patron.

Salva fronça les sourcils, visiblement perplexe.
— Attends, qu’est-ce que tu veux dire par là ?
Nicolas hocha la tête, comme pour souligner l’absurdité de la situation.
— Je vérifiais si elle avait enfin été résiliée, et là, je tombe sur des relevés. Des actes de gynécologie... avec des dates récentes. C’est là que j’ai compris. Elle est enceinte.

Salva écarquilla les yeux.

— Putain, mec, t’es tombé dessus comme ça ? Sur un relevé de mutuelle ? C'est dingue.

Nicolas sourit, un sourire amer et désabusé.

— Ouais, voilà. C’est comme ça que je l’ai su. Elle n’a même pas pris la peine de me le dire. Et maintenant, je ne peux m’empêcher de me demander... est- ce que c’est moi le père ?

Salva hocha la tête, impressionné par la tournure des événements.

— C’est glauque, mec. Mais tu dois savoir. T’as le droit de demander des explications, de savoir si c’est ton gamin ou pas.

Nicolas soupira.

— En vrai, je ne sais pas si je veux savoir ou pas, juste que... si c'est le cas... la trahison est profonde... je ne sais déjà pas comment communiquer avec elle convenablement par rapport à notre enfant commun, mais là...

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