Chapitre 12

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Le bar était encore plus bondé que lorsqu’ils l’avaient quitté pour fumer leur joint dehors. Clara, visiblement en terrain conquis, fendit la foule avec l’aisance d’une habituée. Nicolas la suivit, légèrement en retrait, son regard glissant sur les groupes de personnes agitées. Une atmosphère de chaleur, presque étouffante, baignait la pièce, renforcée par la musique qui résonnait fort, mais sans agressivité.

Clara rejoignit ses amis près du comptoir. Elle les accueillit avec son sourire éclatant, presque magnétique. Sans perdre une seconde, elle présenta Nicolas, d’une voix haute pour couvrir le bruit ambiant.

— Et voici Nicolas ! Un écrivain en devenir, même s’il ne l’admettra jamais, dit-elle en riant.

— Salut, répondit Nicolas en hochant la tête, peu à l’aise avec les regards curieux qui se posaient sur lui.

Un des amis de Clara, un type au look grunge avec une vieille veste en jean usée et une barbe mal taillée, lui tendit une bière.

— Alors, écrivain ? Qu’est-ce que t’écris ? demanda-t-il d’un ton décontracté, visiblement intéressé.

— Je ne sais pas encore, probablement des souvenirs qui finiront à la poubelle, répondit Nicolas avec un sourire ironique.

Le ton était donné. Il sentit qu’il devait jouer le jeu. Clara, quant à elle, sirotait son verre tout en suivant la conversation d’un air amusé.

— Si tu cherches un titre, ‘Nobody Knows’ pourrait faire l’affaire, lança un autre ami, faisant référence au morceau de Queens of the Stone Age qui venait de passer dans le bar.

— Pas mal, mais je pensais plutôt à ‘Nothing Else Matters’, enchaîna Nicolas avec un sourire en coin, détournant la célèbre chanson de Metallica pour en faire une blague sur sa propre indécision.

Clara rit, frappant gentiment l’épaule de Nicolas. La complicité entre eux se renforçait, créant un pont invisible entre lui et ce groupe qu’il ne connaissait pas encore bien. Les amis de Clara semblaient apprécier son humour sec et distancié, ce qui le mit un peu plus à l’aise.

— T’as un bon sens de la répartie, dit l’ami à la veste en jean en levant son verre. À la tienne !

— À la tienne, répondit Nicolas en trinquant sans trop y croire.

Les discussions fusaient autour de la table. Clara parlait de ses dernières idées pour des projets artistiques, ses amis partageaient des anecdotes, et Nicolas, entre deux gorgées de bière, laissait tomber des remarques sarcastiques qui faisaient rire tout le monde. Le décalage entre son cynisme et l’énergie positive de Clara semblait captiver le groupe.

— T’étais un peu timide tout à l’heure, mais je vois que t’as du répondant, lui glissa Clara à l’oreille pendant que les autres étaient plongés dans une autre conversation.

— Ouais, c’est peut-être l’effet de la bière, ou bien de ton enthousiasme communicatif, répondit Nicolas avec un sourire plus franc.

Clara se tourna à nouveau vers lui, le fixant un instant avec un éclat malicieux dans les yeux.

— T’as pas besoin de la bière pour être marrant, tu sais ? Je crois que t’es juste trop modeste, ou que tu te planques derrière ton cynisme.

Nicolas haussa les épaules. Il savait qu’elle avait raison, mais il n’était pas encore prêt à l’admettre. La soirée continua ainsi, faite de rires, de partages anodins et de sous-entendus que Clara et Nicolas échangeaient en silence.

Lorsqu’il était enfin temps de partir, Clara attrapa son manteau et se tourna vers lui.

— Prêt à t’enfuir d’ici ? J’ai une autre idée pour continuer la soirée, murmura-t-elle, un sourire en coin.

Nicolas haussa les sourcils, curieux mais aussi résigné à la suivre, sachant qu’avec elle, il ne pouvait que se laisser porter.

Plus tard, lorsqu’ils quittèrent le bar, Nicolas et Clara marchèrent côte à côte dans les rues désertes de Forbach. Les lumières des lampadaires projetaient des ombres allongées sur le sol pavé, et la ville semblait étrangement calme après l’effervescence du bar. Clara, silencieuse pendant un moment, finit par briser la quiétude.

— Tu sais, je crois que tu devrais vraiment écrire ton livre, Nicolas.

— Pourquoi ça te tient tant à cœur ? demanda-t-il.

Clara haussa les épaules.

— Parce que je pense que t’as des choses à dire. Et parce que t’as l’air de te perdre dans ta propre vie. Peut-être que ça t’aiderait à y voir plus clair.

Nicolas soupira, réfléchissant à ses paroles.

— Peut-être que t’as raison. Mais j’sais pas par où commencer. Tout ça me paraît tellement flou.

— Tu n’as pas besoin de tout comprendre pour commencer. Parfois, il suffit juste de se lancer. Et puis… t’as déjà l’inspiration. Regarde autour de toi.

Elle fit un geste vague, désignant la ville endormie, les rues vides, les immeubles délabrés.

— Forbach, c’est ta toile de fond, mec. Cette ville a des histoires à raconter. À toi de les écrire.

Nicolas sourit, touché par la simplicité de ses mots. Peut-être que Clara avait raison, après tout. Peut-être qu’il suffisait de se lancer, sans chercher à tout comprendre, sans attendre que les choses soient parfaites.

Ils continuèrent à marcher en silence, profitant de la quiétude de la nuit. Pour la première fois depuis longtemps, Nicolas sentait qu’il pouvait enfin se libérer de ses doutes et de ses incertitudes. Peut-être que cette ville morne, ces nuits sans fin et ses conversations avec Clara étaient exactement ce dont il avait besoin pour enfin reprendre le contrôle de sa vie.

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