“Marc rentra chez lui, flottant toujours dans ce brouillard étrange. La porte se referma derrière lui, étouffant le bruit du monde extérieur. Il ne voyait plus les détails de l'appartement, tout semblait se dissoudre dans le vague. Sans un mot, il se dirigea vers la chambre et ferma la porte à clé derrière lui. L’obscurité de la pièce l’enveloppa.

Dehors, Sophie lui parla calmement pour une fois depuis bien longtemps

— Marc, je sais que tu es là ! Sors de la chambre ! on va parler.

Elle avait reçu un appel de l’hôpital quelques minutes avant son retour, lui annonçant que Marc était parti sans être autorisé et qu’il pouvait être dangereux. La panique l'avait saisie.“

Les souvenirs douloureux remontaient à la surface. Nicolas pouvait encore sentir la brûlure de ses propres larmes ce jour-là, la rage qui s’était accumulée dans sa poitrine comme une marée noire. Son esprit se brouillait à chaque fois qu’il se rappelait la peur qu’elle avait suscitée en lui, l'impression d'être piégé. C’était comme si elle l’avait verrouillé dans une cellule mentale dont il ne pourrait jamais s’échapper.

“Marc entendait la voix de Sophie qui se voulait rassurante, masquant au mieux l’ordre qu’elle avait eu de l’hôpital. S’il revenait, tout faire pour l’empêcher de repartir.

Mais Marc devait trouver une issue. Il regarda autour de lui dans la chambre, la seule lumière provenant des fentes des stores de la porte fenêtre de la chambre. L'idée folle lui traversa l’esprit.

Le balcon.

Mais ouvrir les volets de la chambre l’alerterait. Il fallait qu’il sorte de cette chambre, il fallait qu’il passe par le salon. Il affronta le reste de l’appartement, décidé à ne pas rester là. Le temps comptait dans son esprit, il s’imaginait vivre un film. Il la regarda, se tourna vers sa sortie de secours sans que Sophie puisse réagir.

Il ouvrit la fenêtre, s’approcha de la séparation du balcon qui communiquait avec l’appartement du couloir d’en face, et enjamba la rambarde. Son cœur battait fort dans sa poitrine. En dessous, trois étages de vide. Il pouvait tout aussi bien tomber. Mais il passa sur le balcon d’à côté. Puis, sans réfléchir davantage, il frappa au carreau de la porte-fenêtre du voisin.

Surpris, ce dernier le regarda, interloqué, avant de lui ouvrir.

— Désolé, je dois partir, mais elle ne veut pas me laisser sortir, expliqua Marc d’une voix tremblante, sans vraiment s’attarder.

Le voisin, sans un mot, le laissa traverser son appartement. Tout se passa si vite que Marc ne comprit même pas comment il se retrouvait déjà dans l’escalier.“

Nicolas se souvenait de cette scène avec une clarté terrifiante. Ils habitaient au troisième étage, et à cet instant, il réalisa ce qui aurait pu arriver. Si les médicaments avaient eu un effet plus puissant, il aurait pu basculer dans le vide, et tout aurait pris fin. Ce simple fait lui fit serrer les poings, une goutte de sueur perlant sur son front.

“Marc descendait les escaliers. Chaque pas semblait l’amener plus près de la délivrance. Mais en arrivant au rez-de-chaussée, il se figea. Les forces de l'ordre étaient là, juste devant la porte d’entrée. Un sas étroit séparait Marc de l’extérieur, avec deux portes : celle menant à la rue, et celle de l'immeuble.

Il hésita. S’il sortait par la porte arrière, ils comprendraient immédiatement qu’il cherchait à fuir, et cela prouverait qu’il avait quelque chose à se reprocher. Mais s'il les affrontait, l'air de rien, en leur ouvrant la porte principale, peut-être que ça passerait. Ou peut-être que tout allait s’effondrer. Il prit une profonde respiration, son esprit oscillant entre le courage et la panique. Tout se jouerait en quelques secondes.“