Allongée dans mon bain à bulles, je me questionne sur le choix de mes tenues pour la représentation de demain. Je suis attendue avec bon nombre de mes copines dans le Nord de la France pour un show qui sera retransmis à la télé. Comme tous les hivers depuis cinq ans, je fais partie de la gent féminine vivement recommandée au salon de l’érotisme d’Arras et comme chaque fois, je stresse, mais je suis certaine d’une chose : l’ambiance sera au rendez-vous !

Dès que je me sens assez détendue et prête à relever le défi, je sors de la baignoire et enroule mon corps dans une serviette chaude avant de me diriger vers mon dressing. Là, je n’ai plus le choix : il faut que je prépare mes bagages, car le taxi passe me prendre en début de soirée.

Il est déjà quatorze heures, et trois de mes valises attendent, gentiment posées sur mon lit, mais vides. J’ai encore un masque de beauté à faire, je dois lisser mes cheveux et aussi me maquiller. Le temps presse, et j’ai encore un tas de choses à faire ! Hélas, c’est comme ça à chaque fois que je me rends à cet événement important.

Si je suis anxieuse, c’est parce que mes collègues, Aline et Cindy, m’ont harcelée de messages et de photos de lingerie durant ces trois dernières journées. Et pour tout dire, elles n’y sont pas allées de mains mortes pour tout organiser ! Dans ce milieu, nous sommes toutes soudées, mais tous les étés, dans le Pas-de-Calais, nous sommes en compétition, c’est indéniable ! Que quelqu’un ose me dire que ce n’est pas vrai ! Pour ce genre de show, il faut vraiment penser à tout et surtout, assurer !

Comme nous toutes, j’aurais mon propre stand et je devrais user de mes charmes pour donner envie aux invités de dépenser leur argent. De plus, celle qui aura récolté un maximum se verra offrir montagne de compliments et d’interviews pour les journaux divers et émissions télés. Et ça, ce n’est pas négligeable pour faire tourner les affaires à bon rythme. Il faut toujours entretenir correctement sa célébrité et son corps qui plus est…

Quoi qu’il en soit, après une demi-heure a regardé ma penderie sans rien choisir, j’abandonne et prépare juste mes habits pour le reste de la journée. Pour le coup, je me décide assez rapidement et opte pour un slim en jean et un pull blanc. Les chichis vestimentaires ne sont pas nécessaires pour mon arrivée dans le complexe qui abrite le spectacle. De plus, ma tenue doit aussi être agréable à porter pour les trois heures de trajet en voiture que je vais me taper !

Tandis que je retourne à la salle de bain avec l’idée de me coiffer, mon portable sonne. Je me précipite dans le salon et l’attrape de justesse avant la dernière note de « Shape of you ». Sans prendre le temps de regarder qui m’appelle, je décroche :

— Ouais…

— Alicia, c’est moi. Maman m’a dit que tu partais ce soir ?

Ah… C’est ma sœur… Alizée… Comment dire ? Elle est moi, ce n’est pas une grande histoire d’amour. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle est jalouse de mon statut. Jalouse de voir que je suis heureuse avec la vie que je mène. En fait, elle est complètement jalouse de mon existence, mais Madame est bien trop fière pour se l’avouer !

— C’est exact…

— Tu rentres quand ?

— Bah… Quand j’aurai envie. Et toi, tu vas me lâcher la grappe quand ?

— Alicia, c’est bon, arrête… Je voulais te voir avant ton départ, tu es libre là ?

— Je suis occupée et je suppose que tu ne veux pas venir « en amie »…

— Ne fais pas comme si j’étais toujours mauvaise ! Tu connais mes opinions à propos de ton travail, je ne reviendrais pas là-dessus. Mais j’ai des choses à te dire et une faveur à te demander. Je peux être chez toi dans dix minutes, c’est ok ?

— Ok… dis-je avant de raccrocher.

Ma sœur, âgée de six ans de plus que moi a un service à me demander ?! Tiens donc, je suis curieuse de l’entendre, c’est une première !

Pendant que je fais couler un café, parce que oui, je suis bien élevée et même si je ne suis pas très heureuse de la voir débarquer chez moi, j’accueille mes invités comme il se doit, j’envoie un texto à ma mère pour essayer d’en savoir plus, mais elle me dit qu’elle n’est au courant de rien. Je la crois sur parole, elle qui connait les moindres potins sur son entourage…

La sonnette de mon appartement retentit et je vais ouvrir aussitôt. Alizée entre et me claque deux baisers sur les joues avant de prendre le chemin de la cuisine en disant :

— Merci d’avoir accepté. J’irais droit au but, je ne t’embêterais pas très longtemps…

Je lui sers une tasse et nous nous installons sur les tabourets de l’îlot central. Je porte la boisson fumante à mes lèvres, ma sœur en fait de même et, comme je déteste le suspense, je demande de but en blanc :

— Que voulais-tu me demander ?

Alizée gigote sur son siège, mal à l’aise. Elle lisse sa jupe crayon, réajuste sa chemise et n’ose même pas me regarder dans les yeux en m’expliquant :

— Tu te souviens de Cédric ?

— Ton collègue au barreau ?

— C’est ça… Et bien… Comment dire…

— Tu as dit que tu ne tournerais pas autour du pot, alors crache le morceau ! dis-je en lui coupant la parole.

Je suis curieuse de nature, je n’y peux rien !

— C’est pas si facile Alicia ! Punaise, je ne sais même pas par où commencer !

Ma sœur prend une grande inspiration et se lève pour faire les cent pas. C’est alors qu’elle reprend, en bégayant…

— Je… J’ai…

— Accouche Alizée !

— J’ai besoin de ton aide pour libérer ma confiance en moi. Tu vois, je voudrais faire des choses plus coquines avec Cédric… dit-elle en devenant plus rouge encore que les talons qu’elle porte.

Quoi ? Ma sœur sort avec un mec ?! Surtout, avec un mec aussi bien gaulé que lui ?! Je n’en reviens pas !

— Toi, Alizée, la fille la plus coincée que je connaisse, tu me demandes de te dévergonder ?

Ma sœur pique un second fard, mais dans son regard pétillant, je peux y lire toute l’affection et le désir d’un plus qu’elle attend dans sa relation. Une chose est sûre, elle doit être gravement désespérée, ou amoureuse, si elle en vient à me demander ce genre de chose !

Tout en souriant, je me lève de mon siège et m’approche d’elle en lui tendant une main.

— Tu acceptes ? me demande-t-elle.

— Oui, mais tu me dois un service en retour.

Ses yeux s’arrondissent et elle réplique :

— Ne me demande rien d’extravagant, s’il te plait.

— Non, juste que tu m’aides à préparer des tenues pour mes shows. Tu sais, ça te sera utile pour pimenter ta relation.

— Je marche ! commence-t-elle avant de reprendre plus sérieusement. Dis-moi, est-ce que je peux venir avec toi là-bas ? Tu vois, pour apprendre quelques petites astuces en te regardant. Tu sais que j’apprends vite et je pense que ce serait bénéfique plutôt que tu me donnes des cours de sexe, fait-elle en rigolant franchement.

Je me marre à mon tour, car je n’avais surtout pas l’intention de lui donner des leçons, juste des conseils, mais son idée me semble vraiment très bonne.

Que pourrais-je faire de mieux pour qu’elle se lâche un peu, si ce n’est de la mettre directement dans une ambiance bien plus que coquine ?