Chapitre 11 - Toi et moi, c'est NON !
Je me réveille avec un mal de crâne intense. Je peine à respirer, je suffoque presque et mon corps et couvert d’une pellicule de sueur déplaisante. J’ouvre un œil, puis l’autre et constate que je ne suis pas seule dans ce grand lit. Un bras musclé entoure ma poitrine nue, certainement la raison pour laquelle j’ai le souffle court. Une jambe lourde et bouillante est posée sur les miennes, encore une des raisons qui fait que je meurs de chaud !
Tant bien que mal, je repousse le corps inerte de mon inconnu masqué qui dort à poings fermés. Des bribes de la nuit passée me reviennent en mémoire, je frissonne en sortant de sous la couette. Le masque qu’il portait gît par terre, à mes pieds. Je le ramasse et vais aux toilettes en jetant un œil sur l’heure qu’il est.
Lorsque je reviens dans la chambre, je fourre le masque souvenir dans ma valise et contacte le service d’étage pour nous commander un petit déjeuner. En quatrième vitesse, je me lave et m’habille puis je réveille le bellâtre aux cheveux bruns.
— Hey, la belle au bois dormant, il est l’heure !
Lentement, ses paupières se soulèvent et me dévoilent son doux regard gris. J’aime toujours autant cette couleur, mais il n’est pas question que je m’éternise là-dessus, nous avons des choses à nous dire. Sans précipiter ce beau mal endormi, je le laisse prendre consciente du lieu où il se trouve et de ce que nous avons fait au crépuscule de la nuit. Lorsqu’il semble en assez bonne condition, je demande :
— Tu as faim ? Le petit-déjeuner arrive et j’aimerai qu’on parle, toi et moi…
Ses yeux s’agrandissent, je me demande ce qui lui passe par la tête, mais peu importe, le service d’étage frappe à ma porte. Nous nous installons l’un en face de l’autre, à chaque extrémité de la petite table et commençons à picorer les délices sucrés autour d’un café, silencieux.
— De quoi voulais-tu qu’on parle ? me demande-t-il après son deuxième croissant.
J’avale une gorgée de café afin de rincer ma bouche des miettes qu’il me reste puis lui annonce :
— Je suis très pointilleuse sur le sujet, je ne veux pas d’homme dans ma vie. Ce qui s’est passé hier soir, cette nuit, ne se reproduira pas. Nous devons nous oublier et reprendre nos vies comme si nous ne nous étions jamais vus, tu comprends ? j’insiste en espérant avoir été assez clair.
L’homme masqué qui n’a toujours pas de prénom à mes yeux me regarde comme si j’étais devenue totalement folle. Une lueur étrange voile son regard intense, mais il ne pipe mot. Il prend à son tour une gorgée du doux breuvage puis se lève et part à la recherche de ses habits. Je ne sais pas ce qu’il pense, je ne sais rien de lui. Pourtant, je dois bien avouer qu’il me fait un peu pitié, là, tout de suite. Mais mon avis sur le sujet est bel et bien définitif. Je ne laisserai personne me briser le cœur, désormais, c’est moi qui les déchire…
— Il faut que tu saches que je n’avais pas l’intention de t’épouser, vois-tu… commence-t-il en enfilant son jean. Mais je pensais qu’on pourrait être des « amis de baise » genre, se revoir, mais juste comme plan cul, poursuit-il en mettant son t-shirt blanc immaculé puis sa chemise qu’il laisse ouverte.
Je m’étrangle en avalant la dernière goutte de ma boisson. N’empêche, ce n’est pas une si mauvaise idée ! Il faut bien dire que c’est un bon coup, il a su me faire grimper au dix-huitième ciel alors, pourquoi ne pas lui donner sa chance ?
— Très bien, j’accepte, mais à une condition…
— Laquelle, fait-il en se tournant dans ma direction.
— Dépose-moi dans un club de danse.
Ses yeux s’arrondissent avant qu’il ne réplique :
— Que veux-tu faire dans un club de danse ? Tu es experte, tu n’as pas besoin de cours !
— Ttt-ttt-ttt… Ne pose pas de question et juste fais-le.
Il sourit à mon agacement et sort des clés de la poche de son blouson qu’il enfile.
— Alors, on y va.
Une vingtaine de minutes plus tard, il stoppe sa Clio devant les portes vitrées d’une grande bâtisse. Il coupe le contact et défait sa ceinture. J’en fais de même tout en scrutant autour de moi, mais dans cette rue, je ne saurais dire où se trouve le club. Je le questionne donc à ce sujet, mais il me répond simplement :
— Suis-moi, je t’y emmène.
Sans perdre une minute de plus, je le suis à travers les rues pavées et je ne fais pas attention quand il s’arrête. Mon corps s’écrase contre le sien et mon sac s’étale par terre, faisant valdinguer mon portable et tous mes effets personnels. Mes tampons écolos volent à ses pieds, je me sens rougir. Je m’excuse, gênée d’être sur la lune et ramasse mes affaires sans le regarder. C’est alors qu’en me redressant, sur ma droite, je discerne un local un peu vieux, mais qui m’a l’air plutôt grand. La chose qui m’interpelle le plus, ce sont ces mots inscrits sur la devanture : « A.S Girls & Amydansefun »
Sur le coup, la conversation que j’ai eue avec Amy Stanford me revient à l’esprit, mais je ne veux pas y penser tout de suite, j’ai autre chose en tête.
— Alors, c’est où ? je demande en voyant qu’il reste planter là. Et d’ailleurs, c’est quoi ton prénom ?
Il se tourne vers moi en rangeant son portable dans la poche arrière de son jean avant de répondre :
— Je sais pas, tu penses que je m’appelle comment ? fait-il, taquin.
Quoi ? Il me répond « je sais pas » ? Mais il est givré ce mec ou c’est moi qui ne comprends rien aujourd’hui ? J’avoue ne pas avoir très bien dormis cette nuit, mais quand même, je ne suis pas chèvre !
— Non vraiment, sans déconner… Si tu veux pas me dire comment tu t’appelles, c’est pas grave, mais dis-moi au moins ou se trouve la salle…
Ma main droite frotte mon front, un peu trop fort. Je crois que la migraine s’empare de moi, fais chier ! Je n’ai pas du tout envie de passer mes premiers jours de repos cloué au lit ! J’ai prévu tellement de visites et de choses à faire dans le Pas-de-Calais, alors ce n’est pas du tout le bon moment !
— C’était une blague pour te détendre un peu. Tu as l’air tellement coincé là !
— Oui bah disons que tu me stresses un peu, tu vois. J’ai pas que ça à faire, d’ac ?
— Je m’appelle Gabin, mais tout le monde m’appelle Gab. Et ta salle se trouve juste à ta droite, en plus, tu râles, mais c’est écrit juste dessus…
A ma droite ?! Attends, il veut dire que la salle de danse, c’est chez madame Standford ? Non… Je ne peux pas y croire ! C’est une blague, n’est-ce pas ? Je déglutis difficilement à cette annonce et demande :
— D’accord, donc, Gabin, je commence en me disant que son prénom et véritablement le plus moche de tout ceux que j’ai entendu jusque-là, de plus, cela fait trop jeune pour sa virilité éblouissante ! Mais passons, je poursuis, la salle de danse est ici, fais-je en désignant le bâtiment blanc, il n’y en aucun autre à proximité ?
— Bah, non… Sinon il faut que tu ailles à Lille et c’est quand même à environ 40 minutes de route…
Bon, eh bien on dirait que je n’ai pas vraiment le choix alors ! Il va falloir que j’affronte Amy, bien plus tôt que ce que j’avais imaginé. Mais si je suis là, c’est pour ma sœur alors, sans réfléchir plus longtemps, j’entre. J’y vais…
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