JOURNAL D'ALBA, SA VOIX ME BOULEVERSE
Difficile de décrire le bien-être que je ressens après ces semaines passées dans l'agonie de ma ville qui s'enfonçait chaque jour un peu plus dans le chaos. En comparaison, la Covid était presque une période tranquille.
L'homme s'est endormi après que j'ai soigné ses blessures. Son souffle paisible emplit la pièce. Son visage aux traits énergiques et réguliers estompés par une barbe renaissante, est détendu.
Il m'a dit s'appeler Llordat de Montalba, mais je ne crois pas que ce soit son vrai nom. Ce qui est surprenant, c'est que mon prénom est Alba...
Mon patient se débat dans des cauchemars fiévreux. Il est 22h, il fait nuit, je vais dormir aussi.
Quand je me suis allongée sur le lit, hier soir, (Il n'y a qu'un lit car mon frère a récupéré le reste du mobilier pour sa maison du bord de mer), il a ouvert les yeux et m'a souri en s'excusant :
— Désolé d'envahir votre vie...
— Ne vous inquiétez pas pour ça. Je me couche, avec vous, car je n'ai pas envie de dormir par terre, mais n'y voyez aucune arrière-pensée de ma part.
Ça l'a fait rire un peu, en se tenant les côtes. (J'ai diagnostiqué deux fractures). J'ai remonté la couverture et il a ajouté :
— Excusez-moi, j'aurais bien besoin d'une douche...
Il est touchant. Sa voix me bouleverse étrangement.
— Je vous promets que je vais vous aider pour la douche, mais demain matin, je suis épuisée...
— Merci.
— De toute façon, je trouve votre odeur d'homme plutôt agréable...
Sa main s'est posée sur la mienne et il s'est endormi instantanément.
Il n'a pas pu se lever ce matin, terrassé par la fièvre. Je lui ai fait la toilette au lit, ça m'a rappelé mes années d'études à l’hôpital...
Ensuite, j'ai vidé le 4/4 puis je l'ai recouvert avec une housse de camouflage, une idée de mon frère, Jérémy. Il a aussi installé un filtre à la cheminée, pour cacher la fumée et un petit poêle avec un serpentin pour faire un peu d'eau chaude. Jérémy est un super bricoleur. On s'entendait bien.
J'espère qu'on se reverra.
Annotations