Chapitre 4

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   Le lendemain, après une première journée de week-end bien animé comme Owen les chérissait, il était rentré plus tôt du club de tir à l'arc pour profiter un peu de la maison et se poser au calme pour finir quelques paperasses liées aux compétitions à venir. Assis à son bureau installé dans le séjour, il feuilletait les plannings, vérifiant les listes des participants et ajustant quelques détails. La maison était calme, juste ce qu'il lui fallait après une semaine plutôt conflictuelle.

Kathleen, de son côté, était installée à table, concentrée sur ses préparations pour la semaine prochaine. Enseignante passionnée, elle passait ses week-ends à imaginer des activités pour sa classe, ses cahiers et son ordinateur éparpillés autour d'elle. Owen pouvait l'entendre de temps en temps murmurer pour elle-même, ses idées prenant forme sur papier.

Zoey, quant à elle, venait tout juste de rentrer d'une après-midi passée avec sa meilleure amie. À peine avait-elle franchi le seuil de la porte qu'elle était montée dans sa chambre, un léger sourire aux lèvres, ses baskets traînant encore dans le couloir. Comme à son habitude, elle semblait distante mais tranquille, le genre d'adolescente qui appréciait de retrouver son propre espace après avoir passé du temps dehors. Tout paraissait si ordinaire, si prévisible.

Owen étira son dos endolori par sa mauvaise posture, éteignant son ordinateur avec satisfaction. Il ne manquait plus qu'un dîner en famille tranquille pour bien clôturer la journée. Mais juste au moment où il commençait à ranger ses papiers, un bruit de pas précipités descendit l'escalier. Zoey surgit dans la salle à manger, son téléphone à la main, l'air préoccupé. Ses sourcils froncés trahissaient une angoisse qu'Owen perçut instantanément

  - Maman ! Tu as vu ce qui se passe en Irlande ?

  - Laisse-moi deviner, ça concerne l'équipe international de basket ou Justin Timberlake ? demanda Kathleen sans lever les yeux de ses cahiers.

La question fit sourire Owen, habitué à entendre Zoey s'enthousiasmer sur ces sujets. Mais, au vu de son regard, il comprit que Kathleen faisait fausse route. L'adolescente, visiblement assez inquiète pour ne pas réagir aux paroles de sa mère, s'approcha de la table et posa son téléphone avec une vidéo en pause sur l'écran.

  - Regarde, c'est partout !

Son doigt tremblant appuya sur 'play'. Intrigué, Owen se pencha au-dessus de Kathleen pour regarder l'écran. La vidéo, filmée à la hâte, montrait une rue irlandaise en pleine panique. Des cris se mêlaient au bruit de machines étranges. Au milieu de la confusion, des silhouettes à moitié humaines, à moitié métalliques, avançaient d'un pas mécanique, horrifiant. Des gens tentaient de fuir, mais certains, déjà attrapés par ces créatures, étaient transformés en quelque chose de... différent. Leurs corps se raidissaient, et des lueurs rouges clignotaient sous leur peau.

  - Qu'est-ce que c'est que ce bordel... ? murmura discrètement Owen, perplexe tandis qu'il fixait l'écran.

  - On voit vraiment tout et n'importe quoi sur les réseaux, Zoey. Tu-

  - Mais maman ! la coupa-t-elle. C'est la réalité, regarde il y a des dizaines de vidéos !

Zoey fit défiler le fil d'actualité sur l'écran de son téléphone, montrant plusieurs images de panique et de ces personnes mi humaine, mi robot. Kathleen refusait d'y croire, pensant voir une scène de film catastrophe. Owen se permit d'approcher le téléphone vers lui, intrigué par les propos de Zoey.

  - C'est impossible, tu es certaine que ce n'est pas un montage, un extrait de film ? Ou même un tournage peut-être ?

Owen était a moitié convaincu par ses propres mots mais ne pouvait croire qu'une telle chose arrivait en réalité. Les cyborgs n'existaient pas.

Zoey fronça les sourcils, son agacement montant en flèche.

  - Oui je suis sure ! Ce n'est pas juste un truc inventé, c'est réel, Owen. Pourquoi tu ne veux jamais me croire ?

Elle reprit sèchement son téléphone et Kathleen tenta d'intervenir avant que la situation ne s'empire, une nouvelle fois

  - Zoey, calme-toi, dit-elle doucement. Ce n'est pas qu'on ne te croit pas, mais on doit être prudents avec ce qu'on lit en ligne. Les réseaux sociaux ne sont pas toujours une source fiable, tu le sais bien.

Mais l'adolescente n'était pas prête à lâcher prise.

  - C'est toujours la même chose avec vous deux ! répliqua-t-elle, la colère et la frustration se mêlant à sa voix. Je ne suis pas stupide, je sais faire la différence entre une rumeur et quelque chose de sérieux.

Owen se redressa, sentant la tension monter.

  - On ne dit pas que tu es stupide, répondit-il avec une certaine fermeté. Avant de sauter aux conclusions, on devrait attendre de voir des informations plus fiables. Si ça arrive vraiment, on ne devrait pas tarder à le savoir.

Zoey serra les poings, ressentant une colère sourde bouillonner en elle. Elle fit demi-tour et se précipita dans sa chambre, laissant Kathleen et Owen échanger un regard inquiet.

  - Je pensais que les choses allaient mieux, murmura Owen, se frottant le front comme pour chasser une migraine naissante. Mais on dirait que non...

L'heure qui suivit se déroula dans un silence tendu. Zoey resta enfermée dans sa chambre, écoutant de la musique à plein volume pour noyer ses pensées. Kathleen et Owen, quant à eux, essayèrent de se concentrer sur leurs tâches habituelles, mais une inquiétude persistante planait dans l'air.

Ce n'est que lorsqu'il déposa le dîner sur la table et que Kathleen appela Zoey à venir manger, qu'un flash spécial interrompit leur routine. La télévision, allumée en fond, diffusait un bulletin d'information urgente. L'attention d'Owen et de Kathleen fut immédiatement captée par l'écran.

« Mesdames et messieurs, nous venons de recevoir des informations confirmant une attaque de grande envergure à Dublin. Selon les premiers rapports, des dispositifs implantables auraient été utilisés pour contrôler des citoyens, causant une panique généralisée dans la ville. Les autorités locales n'ont pas encore identifié l'origine de ces attaques, mais elles recommandent de rester à l'abri et de suivre les consignes de sécurité. »

Ils échangèrent un regard stupéfait, leurs visages se couvrant d'une inquiétude grandissante. Zoey, tout juste descendue de sa chambre, se figea en voyant les images à l'écran.

  - J'avais raison, dit-elle d'une voix tremblante. Vous voyez que c'est vrai...

Kathleen se tourna vers sa fille, la douleur et la culpabilité se mêlant sur son visage.

  - Chérie, c'était tellement...

  - Improbable, compléta Owen, sous le choc. Je ne voulais pas te mettre en colère en disant ça, Zoey

Elle secoua la tête, son regard vacillant entre la télévision et Owen.

  - C'est toujours comme ça. Tu ne crois jamais ce que je dis. Tu n'as jamais confiance en moi

Owen soupira tristement et Kathleen se rapprocha de sa fille, déterminée à clôturer ce combat de coq pour la soirée.

  - Stop Zoey. Arrête de t'en prendre à lui comme ça, j'y croyais encore moins que lui à cette histoire. J'en ai assez de toutes ses disputes et crois moi que si tout ça est bien réelle, dit-elle en montrant du doigt la télévision, nous allons tous les trois avoir autre chose à faire que de se prendre la tête !

Owen ne pouvait que confirmer les paroles de sa conjointe, dont il remerciait silencieusement pour ses mots. Il n'aimait pas que Kathleen s'interpose, au risque de se mettre sa fille à dos, mais ce soir il n'avait plus la force de répondre. Quant à Zoey, elle essuya une larme qui avait échappé à son contrôle.

  - J'ai juste besoin que vous me croyiez parfois... que vous me fassiez confiance.

Ses mots étaient lourds de sens, non seulement pour cette situation, mais pour tout ce qu'elle avait accumulé depuis longtemps. Owen s'approcha et posa les mains sur ses épaules, pensant qu'une étreinte allait être de trop. Il était aussi persuadé que cette larme n'était autre que de la peur et essaya de l'apaiser.

  - Ça va aller, on va tout arranger. D'accord ?

Ayant compris le message, Kathleen prit Zoey dans ses bras, lui offrant une étreinte aimante et rassurante. Owen aperçut enfin une lueur d'espoir, un premier pas vers une réconciliation par la discussion. Il fallait dire qu'un rien pouvait lui donner cet espoir, et s'en accrochait de toute ses forces.

Ce moment d'apaisement fut très vite interrompu par les cris et le son des gyrophares provenant des vidéos aux informations. Tout ça était bien réel et Owen avait encore du mal à le croire. Des cyborgs ? en Irlande ? ces mots sonnaient aussi faux qu'effrayant.

Les images étaient similaires à celles que Zoey leur avait montrer : des rues dévastées, des gens terrifiés, et ces créatures... des êtres mi-humains, mi-machines, avançant sans relâche. Le présentateur parlait d'une voix tendue, lisant des informations qui semblaient à peine croire elles-mêmes ce qu'elles rapportaient.

« ... ces attaques, que certains qualifient déjà de "cyborgs", se multiplient à travers Dublin et ses alentours. Les autorités irlandaises ont instauré la loi martiale et appellent à l'aide internationale. Des dizaines de vidéos amateur affluent, montrant des implantations forcées sur des civils... »

Owen sentit un frisson glacial courir le long de son dos. Il regarda Kathleen qui elle avait pâli. Elle resta silencieuse, les yeux fixés sur l'écran comme si elle espérait que tout cela disparaisse d'un coup. Mais les images continuaient de défiler : des familles séparées, des gens se battant pour échapper à ces monstres mécaniques, et cette menace invisible, cet implant mystérieux, transformant les êtres humains en machines obéissantes.

C'est alors que Kathleen prit la décision d'éteindre la télé, malgré la désapprobation de Zoey, curieuse et inquiète de connaitre les moindres détails des évènements.

  - On oublie ça pour ce soir. C'est à des centaines de kilomètre d'ici, nous sommes en sécurité, essaya-t-elle de se convaincre. Le repas va refroidir, on va manger tranquillement, comme d'habitude et tout ira bien.

Le temps de réaliser, ils finirent par s'installer tous les trois autour de la table, dans un silence pesant et angoissant, les images ne pouvant quitter leur esprit. Et si cette attaque se propageait à Londres ? 

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