Chapitre 11

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  Owen fixa l’écran de son téléphone pendant de longue seconde. Ces images étaient terrifiantes, et une chose en ressortait clairement : survivre à deux face à cette horde était impossible. Il leva les yeux vers toutes les affaires rassemblées sur la table, il n’avait désormais plus le choix. Zoey et lui devaient partir, immédiatement.

Owen monta à l’étage et frappa doucement à la porte de Zoey avant de l’entrouvrir. Elle dormait encore, recroquevillée sur elle-même. Il hésita un instant, mais le temps pressait.

— Zoey, debout, dit-il d’une voix ferme mais calme.

Zoey ouvrit les yeux, l’air groggy.

— Quoi ?

— On doit partir, prépare un sac avec quelques vêtements et tes affaires utiles. Je t’attends en bas dans dix minutes, dit-il avant de sortir.

— Mais qu’est-ce que tu racontes ? grogna-t-elle. Owen ?!

Sans réponse, elle se leva pour retrouver Owen, la tête dans le dressing, jetant quelques affaires dans son sac à dos.

— Tu peux me dire ce qui se passe ?

— On n’est plus en sécurité ici. Ils sont revenus et sont en train de tout piller sur leur passage, expliqua-t-il en bouclant son sac. Va récupérer tes affaires, on doit partir.

— Mais tu as dit qu’on n’abandonnerait pas ! Comment on va retrouver maman si on part ?

— Pour la retrouver il faut rester en vie, Zoey.

Il ne lui laissa pas le temps de répliquer, il descendit les escaliers pour commencer à charger le pick-up.

— On part dans cinq minutes, dépêche-toi.

Zoey soupira avant de s’accélérer. Elle se changea, attrapa son sac à dos d’école qu’elle vida brusquement sur son lit et analysa très rapidement le contenu de sa chambre. Vêtements, téléphone, chargeur, écouteurs, carnet de notes, doudou et la photo de Kathleen la serrant dans ses bras, posée sur la table de chevet. Elle oubliait très certainement quelque chose mais la voix de Owen la pressa. Elle jeta son sac sur son épaule, attrapa son arc et carquois puis descendit.

Quant à Owen, une fois en bas, il récupéra un grand sac de voyage pour y fourrer son kit de survie et un peu de nourriture. Il essaya de penser à tout, de ne rien oublier, mais ses idées se bousculaient dans sa tête. Prenait-il la bonne décision ? Est-ce qu’ils auraient assez de chose pour survivre assez longtemps ? Où devaient-ils aller ? Quel chemin prendre pour quitter la ville ? Est-ce que ce n’était pas encore plus dangereux ailleurs ? Est-ce qu’il finirait par retrouver Kathleen quelque part ? Le sac à l’arrière du pick-up, il s’arrêta une seconde pour prendre une grande respiration. Dehors, le calme planait, seul le chant des oiseaux raisonnait. Est-ce que c’était vrai ? Est-ce que les robots étaient vraiment de retour ? Le bruit d’une voiture roulant a toute vitesse le fit revenir à lui. Il la suivit de regard, passant devant lui, jusqu’à la perdre de vue. Une seconde suivit l’instant d’après : c’était bien réel.

— Zoey, on décolle !

Il retourna à l’intérieur pour récupérer son arc, son carquois plein et le reste de son stock de flèches. Il ferma la porte à clé derrière Zoey et monta dans son pick-up. Il démarra le véhicule et prit la route à l’opposé du centre-ville.

— Tu es sûr qu’ils sont revenus ? Tout à l’air si calme…

Owen n’eut pas le temps de répondre. Au détour d’un carrefour, ils tombèrent nez à nez avec une horde de cyborgs. Ils étaient des dizaines, peut-être une centaine, avançant en formation serrée. Certains étaient inactifs, marchant juste droit devant. D’autres entraient et sortaient des bâtiments et habitations. Owen pila net, la gorge sèche.

— Oh mon Dieu... murmura Zoey, les yeux écarquillés.

— J’en suis certain, répondit finalement Owen.

Il enclencha la marche arrière, espérant reculer sans attirer leur attention. Mais c’était sans voir que quelques cyborgs étaient plus proches d’eux que la horde. D’un coup, leurs têtes métalliques pivotèrent en direction du pick-up.

— Ils nous ont vus, dit Zoey, paniquée.

— Accroche-toi.

Owen appuya sur l’accélérateur, manœuvrant à toute vitesse pour semer leurs poursuivants, les robots faits entièrement de métal, qui se mirent à courir à une vitesse effrayante. Les cyborgs humains, eux, continuaient à fouiller pas à pas les alentours sans se préoccuper de leur présence.

— Owen, ils sont partout ! cria Zoey.

En effet, l’horizon devenait de plus en plus métallique. Certains couraient sur les toits, d’autres bondissaient d’un véhicule abandonné à un autre. Leur coordination et leur agilité donnaient des frissons à Owen.

— On ne va jamais s’en sortir…

— Fais-moi confiance, répondit Owen, les mains crispées sur le volant.

Le pick-up bondissait sur les pavés défoncés, zigzaguant pour éviter les obstacles. Owen savait qu’ils devaient quitter la ville à tout prix. Une fois sortis, ils auraient une chance de trouver un endroit sûr.

Mais alors qu’ils semblaient distancer la horde, d’autres robots plus imposants apparurent au bout de la rue : un modèle qu’Owen n’avait jamais vu auparavant, armés d’armes à implant à chaque main.

— Qu’est-ce que c’est que ce truc ? murmura-t-il, abasourdi.

Owen n’avait pas d’autre choix que de les contourner en empruntant une rue déjà envahit de machines.

— Zoey, baisse-toi ! ordonna Owen alors que les cyborgs leur tiraient dessus.

Owen serra les dents en pivotant brusquement le volant pour changer de chemin. Le pick-up bondit sur les débris de la route, projetant des éclats de verre et de métal autour de lui. La tension dans la cabine était palpable, le souffle court de Zoey résonnant comme un métronome irrégulier.

— On ne va pas passer par là ! cria Zoey en voyant la rue se rétrécir, encombrée de voitures et de créatures métalliques.

— On n’a pas le choix, rétorqua Owen, concentré sur la route.

Autour d’eux, le grondement des cyborgs s’amplifiait. Le pick-up frôla un lampadaire effondré, les pneus crissant violemment sur le bitume.

— Écoute-moi, Zoey. Prends ton téléphone, j’ai besoin que tu me trouves une autre route.

Zoey hésita, tremblante.

— Maintenant ! insista Owen.

Elle s’exécuta et sortit son téléphone de sa poche, allumant aussi vite que possible sa maps.

— Où est-ce que tu veux aller ?

— Trouve-nous un chemin vers l’autoroute. Il doit y avoir une route qui contourne cette rue principale.

Zoey repérera l’autoroute la plus proche et le moyen le plus court pour y accéder.

— Si on prend à gauche au prochain carrefour, on peut rejoindre une ruelle qui mène vers l’autoroute. Mais …

— Mais quoi ?

— Je crois que c’est une rue piétonne, impossible de savoir si elle sera accessible.

Owen hocha la tête.

— Bien. Accroche-toi.

Il tourna brusquement à gauche, évitant de justesse une voiture renversée. Les cyborgs continuaient de les poursuivre, et les plus grands modèles qu’ils avaient contournés plus tôt avaient désormais rejoint le peloton, tirant toujours dans leur direction.

La ruelle était encore plus étroite que prévu, mais Owen ne ralentit pas. Le pick-up racla un mur, abimant un rétroviseur et écorchant la peinture, mais il continua d’avancer.

— Ils sont toujours là ! cria Zoey en regardant derrière elle.

Owen jeta un coup d’œil rapide. Plusieurs cyborgs se glissaient dans la ruelle, leurs membres métalliques claquant sur le sol comme des sabots. Les impacts des tirs d’implants claquaient et résonnait sur la carrosserie, faisant craindre à Owen qu’ils ne touchent les pneus, le réservoir d’essence ou d’autres pièces importantes.

— On va bien finir par les semer, grogna-t-il.

Mais au moment où il accélérait pour sortir de la ruelle, un robot atterrit sur le capot du pick-up. Zoey hurla de peur, et Owen, surprit, freina brutalement. Par chance, le coup de pédale fit voler le cyborg au sol. Le cœur d’Owen battait si vite qu’il pouvait le sentir dans son corps entier. Il avança de nouveau, écrasant la machine sous ses roues et sortit enfin de la ruelle. Ils débouchèrent finalement sur une avenue plus large menant vers l’autoroute. Owen accéléra à fond, le moteur du pick-up rugissant sous l’effort. Dans le rétroviseur, il vit les cyborgs s’arrêter, incapables de les rattraper sur un terrain aussi dégagé.

Zoey s’effondra contre le siège, les mains tremblantes. Owen, lui, s’autorisa à respirer de nouveau.

— Ça va ? Tu n’es pas blessé ?

La jeune fille releva la tête et observa les alentours avant de poser son regard sur Owen. Contre toute attente, elle se mit à rire. Un rire laissant transparaitre la peur, le stress et l’adrénaline qu’elle venait de ressentir.

— J’y crois pas, c’était dingue !

Owen se surprit à rire à son tour, troublé par la situation mais à la fois soulagé d’en être sorti sain et sauf.

— Complètement dingue, ajouta-t-il.

— Je pensais vraiment qu’on allait y rester, c’était… je…

Elle s’arrêta alors de rire, laissant sa peur prendre le dessus. Owen posa une main sur celle de Zoey, voulant être rassurant.

— Je vais m’arrêter une minute, je pense qu’on a besoin de souffler un instant avant de reprendre la route.

Owen stoppa la voiture sur la bande d’arrêt d’urgence, ne voulant pas gêner les quelques voitures qu’ils commençaient à croiser, de personnes comme eux fuyant Londres également. Ils descendirent tous les deux, et soufflèrent. Le soleil dégageait déjà une douce chaleur pour une matinée du mois de mai, une météo que Owen adorait et qui, par temps de chaos, le rassurait. Il ferma les yeux et se laissa un temps pour réaliser ce qu’il venait de se passer et pour calmer son rythme cardiaque.

Zoey, les jambes encore tremblantes, se mit à faire les cents pas.

— Où est-ce qu’on va maintenant ?

Owen hésita, il se laissa quelques secondes pour réfléchir, encore, et trancha avec lui-même.

— On va prendre la route vers Edimbourg.

— Quoi ? s’étonna Zoey. Edimbourg ? Pour aller chez ta sœur ? Non merci, ce n’est pas là-bas qu’on va retrouver maman.

— Mais c’est là-bas qu’on sera en sécurité le temps que tout ça se calme.

Il ne croyait pas en ses paroles. Il savait qu’ils ne seraient en totale sécurité nulle part mais à Edimbourg, ils ne seraient plus seuls.

— Si ça se calme un jour…

Zoey tourna le dos à Owen, les mains sur les hanches. Il comprenait son mécontentement mais il avait dû faire un choix et il en assumerait toutes les conséquences.

— Allez, on va reprendre la route. Je ne voudrais pas qu’ils nous rattrapent.

— Est-ce que j’ai le choix ?

— On va devoir se faire mutuellement confiance, affirma Owen. On n’a plus la maison ou notre quartier sympa pour se rassurer. Je n’avais pas envie de partir non plus mais tu as bien vu ce qui nous attendait et ce qui nous attend encore si on reste ici.

— Mais Edimbourg, c’est obligé ?

— Pour l’instant c’est l’objectif, oui.

Zoey soupira et remonta dans le pick-up. Avant de l’imiter, Owen vérifia que les impacts de tir n’avaient rien endommagés puis ils reprirent leur chemin. Chaque kilomètre les éloignait de Londres et de Kathleen, mais il savait désormais que c’était la bonne chose à faire. Leur priorité était de survivre, ensemble.

La tranquillité sur l’autoroute toucha malheureusement vite à sa fin. De nouveaux véhicules abandonnés, certains accidentés ou pillés les empêchaient d’avancer. Owen dut faire demi-tour pour emprunter les petites routes de villages et campagnes, les villes étant pratiquement toutes envahies par les cyborgs.

Silencieuse, Zoey fixait les différents paysages qui défilaient sous ses yeux, guidant Owen de temps à autre, grâce à son téléphone, quand il en faisait la demande.

Le trajet vers Edimbourg s’annonçait beaucoup plus long que prévu…

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