Autour d'un champ de betteraves.

Il fait nuit. Une musique de Max Richter me berce doucement tandis que je fais quelques mouvements de la main, une main soutenant un verre d’armagnac de 12 ans d’âge. Je m’allonge au sol, laissant délicatement tourner le crépitement du vinyle. Je réfléchis. Je songe. Mes pensées se meurent dans des louanges du passé, ou plutôt de ces affres horripilantes qui pilotent le destin de toute une vie. Mes yeux sont clos. Les bougies se meuvent sous l’effet de ma respiration, ou du vent qui pénètre par le berceau de ma porte. La naissance d’une mélancolie, d’une nostalgie. Mon coeur se vide, ce bijou hors de son écrin argenté. La danse flou de mon esprit macabre se fait insistante dans la pièce sinistre et ténébreuse dans laquelle je me situe. Ma couche, un simple tapis, se frotte à mon dos, je me sens en union avec cette terre bercée tout autour des champs de betteraves. Je me sens... bien... et à la fois mal. Souffreteux. D’une douleur inexplicable. Inextricable. Comme si ma vie prenait un tout autre sens. Un autre tournant.

Allo, fox trot tango charly.

Ici rien ne va plus. C’est comme un appel SOS pour un terrien en détresse. Houston, nous avons un problème, rien ne va plus. La vie effleure ma peau et s’évade de ma bouche en quelques expirations pieuses et saccadées. Mon ventre se gonfle et se dégonfle. J’ai l’impression d’être un ballon de baudruche. Ou comme un de ces champions olympiques qui perdent leur souffle à tenter des exploits qui n’intéressent qu’eux-mêmes. Être le meilleur, le champion, le plus doué en ce monde. Destin funeste, douce consolation sordide d’une capacité étrange, d’un autre point de vue que ce qui est réellement important en ce monde : l’amour. L’amour, n’est-ce pas cela qui devrait guider chaque être sur cette maudite terre? N’est-ce point là la passion qui devrait mouvoir chacun de nous, plutôt que d’aimer avec passion un sport, un art, ou tout autre chose... non. Non, c’est insipide. On ne peut rien faire seul, on ne peut vivre seul, on ne peut mourir seul. Tant de souvenirs et d’insolences qui me meurtrissent. De la débauche de la nature humaine. Dépravation. Anarchie. Mai 68. Bam. Un coup de hache tombe sur la tête d’un innocent, tel une guillotine réinventée. C’est idiot, mais c’est un peu ça le monde d’aujourd’hui. De la violence, de la haine, et non de l’amour.

Et moi, là, je navigue.

Je navigue sur le verre de mon insouciance, de ce nectar qui palpe mes lèvres et coule lentement au plus profond de mon gosier acéré, asséné par tant d’insuffisances. D’insolences. D’arrogances. Bam. C’est moi qui perd la tête. Je dévie de mon horizon. Je perçois l’arbre majestueux du jardin d’Eden, et pourtant je ne mérite pas l’accès à ce Paradis. Puisque je ne connais l’amour qui devrait nous guider à jamais. Un voyage. Un voyage. Juste ce voyage et le temps qui passe dans cet avion maudit. Et ce tic. Et ce tac. Bam. La tête roule sur le plancher et je dérive encore. Cette musique change et passe au « Sang de mon sang », « blood of my blood ». Comme s’il y avait là réunion de deux êtres maudits qui doivent se retrouver pour ne former qu’un. Une union parfaite et unique. Finalement, un seul être qui s’élève vers les cieux pour pourfendre les Dieux et leur voler la flamme qui apportera la paix et l’amour sur cette terre désolée.

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