Chapitre 8.5

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Après la révélation et l’annonce d’un nouveau couronnement, Ymirgas fut en fête ; la capitale avait revêtu ses plus beaux atours. Les rues s’étaient colorées de fanions aux couleurs du royaume et les habitants se préparaient déjà à fêter l’événement.

Le palais était en ébullition, chacun s’était vu assigné une tâche et celle-ci effectuée, courait à la suivante. Les différentes salles avaient été décorées avec faste et d’immenses tables dressées, attendant de nombreux invités.

Certains étaient déjà là, notamment Cassian et son père, le duc Porel. Khiara les avait accueillis chaleureusement et ce ne fut que lorsqu’ils demandèrent où était Kaldrys qu’elle s’aperçut que son frère n’avait pas montré le bout du nez depuis le début de la matinée. Elle chercha Sélène pour l’interroger, mais celle-ci ne l’avait pas vu non plus.

« Êtes-vous allée voir aux écuries ? demanda-t-elle en pensant qu’il n’avait pas encore pris le temps d’aller voir Onyx depuis son retour.

  • Je ne peux pas y aller habillée ainsi ! fit-elle, déconcertée en montrant sa somptueuse robe blanche aux fines dentelles.
  • Alors je vais y aller pour vous, fit Sélène avec un sourire.
  • J’ose croire qu’il est déjà habillé et qu’il ne se sera pas sali ! »

Sélène répondit par un nouveau sourire puis se dirigea vers les écuries. Elle était à peine entrée qu’elle entendit la voix de Kaldrys dans le box du frison. L'écuyer qui avait la charge d’Onyx se trouvait devant et lui jeta un regard inquiet, comme si elle venait de le surprendre à faire une bêtise.

« V-Votre Altesse, je serais plus rassuré si vous sortiez. Comme je vous le disais, ce cheval est plutôt capricieux avec ceux qu’il ne connait pas. Avec tous, en fait. Il ne supporte que votre sœur et moi-même, fit l’homme dont l’angoisse qu’il arrivât quelque chose au prince se lisait sur le visage blême.

  • Ne craignez rien, il est calme, vous voyez ? le rassura Kaldrys tandis qu’il frottait affectueusement l’encolure de l’animal. Il ne me fera pas de mal.
  • Votre sœur, cependant, je ne puis le garantir, le taquina Sélène en s’avançant. Elle vous cherche. Elle espérait que vous seriez déjà habillé.
  • Je n’en ai pas pour aussi longtemps qu’elle, lui souligna-t-il en glissant vers sa bien-aimée un regard complice.
  • Il n’empêche que les premiers invités sont déjà là et que vous n’êtes pas prêt, Votre Altesse. »

Au grand soulagement de l'écuyer, Kaldrys sortit du box.

« Bien, je suppose que je dois aller me changer dans ce cas, finit-il par dire à Sélène en lui faisait signe de le suivre. Qui donc est arrivé ?

  • Le duc…
  • Porel et son fils Cassian. Pourquoi cela ne m’étonne-t-il guère ? »

Ils remontèrent au palais et croisèrent Khiara accompagnés des deux hommes. Celle-ci leva les yeux aux ciels en voyant qu’il n’était pas encore changé.

« Veuillez excuser la tenue de notre frère, Messires, il semble être quelque peu en retard, fit-elle en plissant les yeux dans sa direction. D’ailleurs, vous ne l’avez jamais rencontré ou très brièvement, n’est-ce pas ?

  • C’est exact ! fit le duc.
  • Brièvement, c’est le mot, renchérit Cassian.
  • Eh bien, voici mon jeune frère, Kaldrys.
  • C’est un honneur que de vous rencontrer, Votre Altesse » fit le duc en s’inclinant respectueusement avec son fils.

Kaldrys les imita puis reporta bien vite son attention sur Khiara :

« Tu as un bien joli frison, ma sœur. Un cheval doux et docile qui plus est, et qui semble grandement m’apprécier. »

Comprenant son intention, Khiara esquissa un sourire et reprit sur le même ton :

« Eh bien mon frère, si il te plait autant que cela, nous te le donnons. Mais il te faudra apprendre à monter.

  • Votre sœur est une excellente cavalière, lui affirma Cassian, je ne doute pas que vous le serez aussi, Votre Altesse.
  • J’ai beaucoup à apprendre d’elle, mais je doute d’être un jour capable des mêmes exploits.
  • Bien sûr que tu le peux ! le gronda-t-elle gentiment. En parlant d’exploits, passer une tenue plus appropriée avant l’arrivée d’autres invités en serait un.
  • Bien, dans ce cas, je vais commencer par là » rit son frère.

Il s’inclina rapidement puis se dirigea vers sa chambre, accompagné de Sélène. Celle-ci lui avait demandé si elle devait aller chercher Thaniel, mais le jeune homme avait répliqué qu’il avait davantage besoin d’elle.

A peine avait-il fermé la porte derrière elle qu’il la prit dans ses bras et la serra contre lui.

« Vous allez être en retard, l’avertit-elle en plongeant dans son regard azur.

  • Ne le puis-je pas ? fit-il en levant un sourcil provocateur tandis qu’un large sourire s’emparait de ses lèvres.
  • L’insouciance vous va bien, mais vous savez que ce n’est pas le jour pour cela, répondit-elle en s'éloignant pour prendre une tenue – que sa sœur avait faite faire sur mesure – déposée pour lui sur le lit.
  • C’est ton père qui l’a faite, l’informa Kaldrys en voyant qu’elle examinait la veste avec attention. Khiara a jugé bon de le lui demander.
  • Pas vous ?
  • Je pardonne rarement les tentatives d’assassinat, fit-il avec amusement. Ma sœur pensait que nous lui devions des excuses.
  • Pourquoi cela ?
  • Elle a dit qu’il avait été mêlé malgré lui aux affaires de notre famille et qu’il fallait faire la paix. Et j’ai cédé lorsqu’elle a dit que sans cela, je ne t’aurais pas rencontrée.
  • Je vois, elle connait déjà vos faiblesses, lui fit-elle remarquer avec un large sourire. Allez, venez, je vais vous aider. »

Si au premier abord, il parut ravi qu’elle s’occupât à nouveau de lui, elle vit peu à peu, vêtement par vêtement, son expression changer. Et lorsqu’elle passa devant lui pour attacher les boutons de sa chemise, elle croisa brièvement son regard et devina ce qui le tracassait.

« Ils vont naturellement vous comparer à votre père, pensant vous faire un compliment et gagner vos faveurs. Ne leur en veuillez pas, c’est ainsi que fonctionne les choses. Mais vous n’êtes pas comme lui, vous ne le serez jamais.

  • Mais tous savent en partie ce qu’il m’a fait. Pourtant ils n’auront pas la décence de tenir leurs langues. Parce que le roi Drasyl était un grand roi, à leurs yeux. Et que je ne suis rien.
  • Ils ne vous connaissent pas et ignoreront toujours ce que vous avez fait pour Ymirgas, mais c’est le chemin que vous avez choisi. Le regrettez-vous ?
  • Non, je déplore seulement les inconvénients. Je finirai par m’y faire.
  • Vous ne devriez jamais vous y faire si cela vous cause de la peine. Mais si vous ne pouvez agir contre, vous pouvez toujours m’en parler si cela vous soulage. »

Kaldrys la regarda tendrement, conscient qu’il ne voulait ni ne pouvait plus se passer d’elle. Bien qu’il se trouvât terriblement imparfait, savoir qu’elle l’aimait avait sur lui un effet tout à fait apaisant et réconfortant. Avec elle, il avait le droit d’être simplement lui-même. Une chose dont il avait été privé depuis toujours mais dont l’envie ne l’avait jamais quitté.

Sa main alla caresser la joue de Sélène puis il lui donna un baiser.

« Cherchez-vous encore à être en retard ? le taquina-t-elle.

  • J’aurai aimé que tu puisses être près de moi lors de la cérémonie, avoua-t-il tristement.
  • Les domestiques n’y assistent pas, sinon rien ne serait prêt et vos invités devraient se débrouiller seuls pour le déjeuner. Mais toutes mes pensées seront tournées vers vous.
  • Et les miennes vers toi. »

Un sourire illumina le visage de Sélène qui sentait ses joues rougir. D’une main délicate, elle arrangea ses cheveux tandis qu’une douce chaleur s’installait dans sa poitrine. Elle aurait voulu se concentrer sur son travail, mais ses yeux croisèrent de nouveau ceux du jeune homme et elle se stoppa. Kaldrys sembla attendre qu’elle dît quelque chose mais elle savait qu’il finirait par être vraiment en retard s’ils continuaient ainsi.

« Vous êtes prêt, vous devriez rejoindre votre sœur, fit-elle en reculant d’un pas.

  • Bien, je suppose que tu as raison, conclut-il avec un bref soupir. Après ce jour, je serai définitivement libéré du trône.
  • Cela vous manquera-t-il ?
  • J’ai toujours agi pour ma sœur, pas une seule fois je n’ai envisagé de régner à sa place. Ce n’est que par un concours de circonstances malheureuses que j’y suis arrivé. Mais aujourd’hui, je voudrais agir pour moi-même, et le trône ne fait pas partie de mes projets. »

Sélène ne put que l’approuver. Il fallait à présent qu’il se concentre sur lui-même pour se découvrir.

Elle se dirigea vers la porte et l’ouvrit avant de lui faire signe de sortir.

« Tu me mets dehors ? lança-t-il, amusé. C’est ma chambre !

  • Oui, sans quoi Votre Altesse va continuer à me regarder et sera effectivement en retard pour le couronnement de sa sœur.
  • Bien, alors je m’y rends de ce pas. »

Il sortit dans le couloir puis fit brusquement volte-face :

« Sélène, arrête de me vouvoyer ! Qu’importe ce qu’on en dira, nous sommes bien plus proche que cela.

  • V-Vous êtes sûr ? hésita-t-elle, étonnée.
  • Absolument. Et si quelqu’un ose te dire que c’est un manque de respect, envois-le moi.
  • Eh bien, si vous y tenez, je le ferai !
  • J’y tiens. »

Il s’éloigna et la laissa là, le sourire aux lèvres, amusée par son insouciance.

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