La Plaine !
Le champignon d’or arpentait une région vaste d’herbes et de fleurs violettes, rouges, jaunes ou blanches ; elles embaumaient l’atmosphère de leurs parfums et du pollen qu’elles libéraient comme autant de petites lucioles jaunâtres, blanchies par les rayons chauds du début de l’été. Il avait fui son terrier envahi par les monstres et, après des semaines de marche, de courses, et des dizaines de buissons vidés de leurs baies, il était ici. Et quel endroit mystérieux ! L’absence des arbres le perturbait, comment les champignons font-ils pour se cacher ici, sans feuillage, sans racines, sans haut fut pour les masquer des yeux de leurs prédateurs ?
Or, dans toute son innocence de jeune champignon, il se mit à courir à vive allure à travers les fleurs qui libérèrent des paquets cotonneux sur son passage. Il en avait déjà vu de semblable, mais jamais autant. Il bondit. Il couina. Il tourbillonna. Il se roula par terre en agitant ses racines et étira un œil pour admirer l’azur du ciel où se formaient des voiles nuageux translucides. Il se laissa dorer tranquillement au soleil. Qu’il était bon d’avoir autant de lumière !
Un pétale se tordit pour lui donner un petit coup méchant sur le coin du chapeau. Il contorsionna son œil afin de regarder le coquin qui le dérangeait, et s’en prit un nouveau dans le globe, qu’il rétracta de douleur. Le vent balayait la plaine et formait des vagues florales.
Le champignon se releva maladroitement. Il remarqua que des racines s’emmêlaient aux siennes ; les fleurs l’avaient agrippée. Il tenta de s’en défaire sans y parvenir. L’instant suivant, il fut entraîné dans les galeries souterraines de la plaine. Au même moment, un oiseau colossal assombrissait le ciel de ses larges ailes à la recherche d’une proie à emporter dans son nid.
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