Le roi des morts. (Partie Deux)
Les vieilles pierres effritées par l’âge antique de ces lieux ancestraux tremblotèrent, relâchant dans leur terreur des filets de poussières et des morceaux de roches autour de l’assemblée du roi chanteur, dont les notes graves et profondes étouffaient toutes les autres.
Les squelettes aimaient chanter, à l’exception faite d’un récalcitrant, qui, en plus de bousculer ses congénères en transes, se permit l’affront – et le plaisir – de s’offrir une aventure entre les cotes de l’homme qui fût.
Il s’agrippa aux os de ses doigts minuscules et, habile, remonta les vertèbres, se hissa sur la clavicule jaunie et détériorée jusqu’à la nuque, à ces cervicales qui retenaient ce crâne, cette couronne d’os merveilleux pour y planter dans les interstices sa solide brindille. Ingénieux, le petit squelette s’en servit comme levier, poussa fort – à piailler d’effort – jusqu’à un craquement sonore, et le mugissement d’un roi mort.
Une main puissante s’abattit soudain sur lui ; il esquiva en se laissant glisser adroitement sur les omoplates, brindille en main ; les pieds allant rencontrer l’émergence des vertèbres, il reprit sa grimpette jusqu’à la nuque, fermement décidé à déloger cette tête de ces épaules.
Hélas, aussi vif fut-il, sa taille minuscule fut-elle, la main gigantesque et rapide, après de maladroits essais, parvint à se saisir du misérable faquin et à le jeter au loin, pensant n’en faire qu’un tas d’os bons à rien. Or, c’est dans un tas de sable et de gravats qu’il termina, au grand désappointement de ses congénères lorsqu’il s’en releva, hurlant et piaillant de rage, agitant sa brindille avec tant de vigueur qu’aucun ne s’approcha.
Hormis la silhouette gigantesque d’un titan aux orbites profondes, les bois saillants avec tant de grâce sur son crâne, qu’il ne fit aucun doute qu’il était roi.
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