L'Egaré
Innomée, depuis l’antre de deuil dans lequel tu ouvres le monde de la poésie, adresse-moi un signe, un geste de la main, une esquisse de sourire, ce sourire fût-il celui, blême et outrancier de la mort, mais profère donc le cri du silence afin que je te connaisse dans l’instant. Déjà aboli, naissant à peine. Innommée, reconduis-moi à ma nuit, efface-moi de ta vision perdue dans le tumulte des heures. Il est toujours temps de rejoindre sa tanière d’effroi, tellement de simulacres parcourent les allées de terre et de poussière. Sais-tu, au moins, depuis la bogue infinie de ta sagesse que l’on me nomme « L’Egaré », celui qui, par lui-même, procède à sa propre extinction ? Celui qui, croyant être-parmi-les-autres, n’est même pas arrivé en lui. Il fait si étonnant dans l’air qui se déchire et replie ses membranes autour de ma tête-rhinolophe. J’entends mon propre sifflement, mes battements d’ailes dans la grande caverne mondaine et soudain il fait si froid et, soudain, les pierres tombales se mettent en mouvement en direction des meutes pariétales où s’agite en tous sens, comme sur un écran livide, la disconvenue des hommes, où se lèvent les trémulations de leurs membres de bois sec.
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