Chapitre 1
Je suis bien emmerdé, vraiment… Il va falloir que je trouve un nombre incalculable d’excuses… alors qu’avant même pas besoin… Je vous explique et puis je me présente aussi.. L’un ne va pas sans l’autre, Étienne, quarantenaire, informaticien, père et marié depuis … un sacré bout de temps et avec la même bien sûr… Une femme à peine plus jeune que moi, Julie que j’aime toujours, et qui m’aime toujours aussi, enfin je crois. Le petit couple avec une môme, la brave petite famille. Oui avec une ado, et je sais que c’est mal, mais je me suis servi de ma gamine pour cacher un truc à ma femme… Même si ma gamine n’est pas au courant non plus.
Je vous explique encore, tous les samedi depuis plus de deux ans maintenant, je l’accompagne le matin à un cours de dessin qui dure plus de trois heures. Ma femme bossant le week-end ne pouvant pas le faire… Et puis en plus y a pas de raison que les pères ne fassent pas des trucs comme ça, amener leurs gosses à des activités.. Seulement faut dire ce qu’y est, je me faisais chier comme un rat mort à l’attendre, marchant sans but dans ce quartier, un peu désert. Un peu de lèche vitrine comme ça sachant que y aura rien derrière, ou si peu. Les magasins d’info, les dernières sorties de dvd, la fnac, des conneries comme ça.. Mais ça va un temps, parce que ça frustre un peu aussi. Donc un matin, au lieu de ma balade, mon errance sans but de trois heures, je suis rentré dans une brasserie pas loin du cours de la gosse pour lire le journal et boire un café…
Trois heures c’est long, tout en étant très court vous en conviendrez, ça dépend ce que l’on fait aussi.. Trois heures à attendre c’est long. Et cette brasserie, ce bar est devenu mon point de chute du samedi matin. Donc, j’allais boire un café et lire le journal jamais le même lui. Ça pouvait passer de L’équipe à Courrier International, Libé ou Le Monde de la veille, une revue d’info ou Fluide Glacial… bref je me bois mon café en épluchant le journal, et un matin c’était un jour Courrier International, comme ça, j’ai été abordé. Oui, j’ai été abordé par un homme, un mec brun dans la trentaine, propre sur lui… Vivien.
Il est venu à ma table en me disant qu’il me voyait souvent là, que mes lectures éclectiques lui avait amené de la curiosité, et qu’il aimerait bien faire connaissance. Bon si tu veux, moi de toute façon je me faisais un peu chier à attendre. De là, ce premier jour, on a discuté de plein de choses, du titre en une, du boulot, il était à cette époque-là serveur dans un resto et de tout et de rien… Les premières rencontres quoi.. Il a vu mon alliance, bin oui, je suis marié j’attends ma môme qu’est à son cours de dessin. Là y a comme un truc qui est passé sur son visage, mais il n’en a pas été plus sec. Et à partir de ce jour-là, je l’ai retrouvé chaque samedi matin dans cette brasserie… à discuter, à rire, parler de trucs de mecs et c’était très agréable, un bon moment… Ça a duré un moment ces rencontres dans ce café, quelque chose comme six mois, peut-être même plus… Et de fil en aiguille pourrait-on dire, je me suis retrouvé à avoir hâte d’être samedi, alors qu’avant plutôt la purge, faut bien l’admettre.
Et quand il n’y avait pas de cours, pendant les vacances des mômes ça m’irritait, j’avais envie d’y aller, de retrouver Vivien pour discuter, pour le voir. Il se passait quelque chose que j’appréciais grandement. Avec lui je parlais de tout, même d’elle, elle ma femme, de nos problèmes de couple parfois… Parce que tous les couples ont des problèmes parfois… Ma femme est un peu chiante, comme toutes les femmes sûrement, mais faut être objectif nous aussi, les mecs on doit sans doute l’être.. bref. Et quand on s’était retrouvé le samedi suivant, après ces vacances pour lui aussi ça avait été dur, chiant.. bref on s’était manqué…
C’est ce jour-là où l'on s’est embrassé pour la première fois.. Une galoche de la mort, et c’est ce jour-là où l'on a fait l’amour ensemble pour la première fois aussi… Alors je vous vois venir, le mec il est hétéro et paf y se fait un mec… Oui, mais toutes ces histoires hétéro, homo et bi, perso je m’en fous un peu. L’amour n’a pas de sexe, le désir non plus.. on désire ou on aime une personne, et son sexe n’a rien à voir. Non son sexe n’a pas grand chose à voir avec la choucroute. Oui je suis tombé amoureux d’un mec, un petit brun, au yeux noisette qui pétillent, aux yeux dorés, au sourire ravageur et au rire clair… Vivien. Et ne vous méprenez pas non plus, je suis toujours très très amoureux de ma femme… Je me verrais mal être sans elle, elle me manquerait terriblement, un côté cauchemardesque même…
Je me pose souvent la question est-ce que je trompe ma femme ? Est-ce que ça compte si c’est de l’autre bord ? Est-ce que ça vaut ?… Objectivement oui, sans doute, enfin ça serait juste pour un coup de queue, bien me faire remplir le cul, là sans doute que non, encore que… Mais c’est pas ça du tout, même si ça arrive quand même… J’adore ça, me faire prendre par Vivien, me faire lécher aspirer et pomper, me faire dévaster par sa grosse queue. Ça me fait … Me retourne la tête… Mais y a pas que ça, oh non ça serait trop simple. Si y avait que ça, ma femme pourrait s’en charger, ça lui poserait aucun problème… Enfin je crois. Même si, il faudrait lui dire que j’ai eu des expériences comme on dit, et que ça me manque terriblement.. et coquine comme elle, et curieuse comme un chat, il lui faudrait des mots, beaucoup de mots mais … Oh oui je pense qu’elle s’occuperait bien de mon petit cul… Enfin sans doute. Seulement, avec Vivien y a pas que ça… hélas… faut dire un an et demi, qu’on se retrouve le samedi, et pas que d’ailleurs.
J’ai pas demandé d’exclusivité à Vivien, faut pas déconner, genre moi j’ai une nana que je me saute dans la semaine, et toi non, tu devrais te la mettre sur l’oreille. Cela aurait été salement égoïste et assez mal venu. On est.. en fait je ne sais pas vraiment ce qu’on est avec Vivien.. On est pas en couple même si je ressens pour lui quelque chose de profond, et que j’adore être avec lui… et que c’est donc bien plus qu’un plan cul. Et il n’a jamais été question que je quitte ma femme… ma famille… et en même temps, comment dire des fois, quand je discute avec elle, avec ma nana et bien je lui sors des trucs, et je les pense sincèrement sur le moment… et en même temps, je me dis que là c’est pas tout à fait juste.
Genre : « Tu sais rester pour rester alors qu’on ressent des sentiments pour quelqu’un d’autre, qu’on a pour quelqu’un d’autre des sentiments, c’est vraiment pourri… quand on ressent plus rien faut partir.. » elle est bien d’accord… Et objectivement, je n’aurais plus rien ressenti pour elle, je serais parti. Vivien ou pas Vivien d’ailleurs… Ni même pas pour me mettre avec Vivien. Mais seulement ce n’est pas le cas, du tout. Je l’aime toujours et suis heureux avec elle, sincèrement. Et d’un autre côté ça m’a donné une aigreur et comment j’osais lui sortir ça. Pourquoi je lui sortais ça d’ailleurs ?
Une autre fois elle m’a demandé très sérieuse de ne pas la trahir. « L’amour c’est fluctuant mon chéri… l’amour c’est pas gravé dans le marbre.. alors si d’aventure tu ne m’aimais plus, dis le moi plutôt que de me trahir… je peux comprendre l’un, mais je n’accepte pas l’autre… C’est que non seulement y a plus d’amour, mais en plus y a même plus de respect pour l’autre… » Et … là aussi, je suis plutôt d’accord, elle a raison. Le hic, c’est que bin, cette nana, je l’aime toujours et profondément… mais que Vivien aussi, d’une autre manière, une autre sorte d’amour, vraiment différent, et ça ne compte pas moins, même si c’est différent. Je suis pas dans la merde.
Et plus le temps passant, un an et demi c’est quand même long, plus je vois Vivien devenir jaloux… jaloux d’elle, jaloux surtout du temps que je passe avec elle et pas avec lui… Bon je dois bien admettre aussi, que plus le temps passant, plus on se voyait souvent, pas que le samedi, j’avais plein de prétexte de possibilité. J’ai même mis un pote au courant au cas où, « si Julie t’appelle et que je suis pas là, pas passé, peu importe, tu dis que je suis sur la route, rien de plus ».. Sans entrer plus dans les détails, détails qu’Éric le pote en question ne m’a pas demandés à ce moment-là. Mais elle déteste téléphoner aux gens… donc j’avais pas vraiment de soucis à me faire de ce côté-là.
Partant tôt du boulot je lui laissais un message « Je passe chez Éric, bouffez sans moi »… Éric c’est notre refourgueur de beuh.. Un bon gars qui fait dans le bio et le naturel… avec des beuh qui tapent pas trop la cafetière, pleines d’arômes… Un pote chez qui on fait des barbecues l’été, des fêtes, ou des soirées tranquilles à jouer à des jeux de société en groupe… Les parties de Molkï à trois heures du mat après des jeux à boire.. un très bon pote. J’adorerais le présenter à Vivien, sûr qu’ils s’entendraient bien… mais la dernière fois que je suis passé vraiment chez Éric pour faire des grosses réserves, histoire de pas me cramer non plus, genre je passe chez Éric mais je reviens les mains vides… toute une organisation… Mon pote a secoué la tête en disant que non… si Julie appelait et que je n’étais pas passé il ne me couvrirait plus… du tout… « Putain Étienne, ça fait dix-neuf ans que t’es avec Julie… dix-neuf ans !.. Et tu lui fais ça ?… » Là, faut admettre que je me suis un peu tassé sur moi-même… J’aurai dû le voir venir, la dernière soirée chez Éric, celle du Molkï fin bourré à trois heures du mat.. Bin oui j’ai vu la surprise sur le visage de notre pote quand dans la conversation le sujet était arrivé sur le tapis comme ça.. Abasourdi Éric qu’il était… Ouais dix-neuf ans avec la même.. Dix-neuf ans qu’on se supporte et qu’on s’aime, ça aussi faut pas l’oublier… Il y avait même eu le rire de Julie et le « C’est dingue, on me l’aurait dit, j’l’aurai pas cru… » Et là mon pote qui retire ses billes, qui joue plus, et qui me regarde même en biais… bon. Et même si c’est pas arrivé en un an et demi…. jamais. Qu’elle n’a jamais appelé Éric je vois pas pourquoi ça arriverait maintenant, il n’empêche…
J’l’ai bien sûr dit à Vivien, il a eu un regard baissé tout en fronçant les sourcils. Parce qu’en plus pendant les vacances le samedi, je prétextais d’aller chez Éric, pour aller voir Vivien, et c’était plutôt un bon plan, ça nous laissait beaucoup plus de temps.. Des fois je rentrais sur les coups de cinq heures, la dernière fois sept heures.. La tête dans les nuages, le corps apaisé, le cœur content… Même si je dois admettre aussi que la dernière fois, bin elle a voulu m’accompagner, Julie encore en tenue de nuit, moi beau propre comme un sous neuf, un pantalon qui me fait un beau petit cul dixit mes deux amours… Et Julie « Attends, je m’habille vite fait… je viens… je verrais bien Éric…»
Et là... Là, je suis mis à bafouiller, à prendre une voix toute gentille en l’assurant que c’était pas la peine.. Que c’était gentil mais que non repose toi… je ferais les courses vite fait sur le chemin du retour.. Parce que ma nana venait de perdre son boulot, et que donc le samedi maintenant elle était libre.. Plus de quatre ans qu’elle avait pas eu de week-end.. Elle voulait en profiter et faire des choses, des balades.. et moi essayant tant bien que mal de faire passer le truc, Julie a été très surprise… mais voyant que j’avais vraiment pas envie qu’elle vienne… tu m’étonnes, elle a lâché l’affaire en disant : « Je vois, t’as envie d’être entre potes… je me demande ce que vous vous racontez… j’aimerais être une petite souris » elle m’a embrassé coquine, câline et je me suis barré.
Alors non seulement elle a plus de boulot et le prétexte Eric le samedi ne marche plus.. et pour en rajouter une couche…. Parce que oui, c’est la merde… Cette année, pas assez de monde le samedi, trois élèves. Les cours ont donc sauté, pour le mercredi après-midi. En plus la môme est grande maintenant elle peut franchement y aller seule, ou en revenir seule. Ça commence a me faire mal au crâne…
Là, pour avouer je viens de rentrer de chez Vivien, il habite pas loin de la brasserie deux rues plus loin, et on vient de faire l’amour, il m’a pris avec vigueur, presque avec une sorte d’emportement, de désespoir. Sorte d’urgence… Heureusement que Julie dort beaucoup, une adepte des grasses matinées à plus finir… et depuis tous ces changements, c’était le deuxième samedi sans cours… Je me suis barré retrouver Vivien alors qu’elle dormait encore. Mais aujourd’hui, j’avais envie de le voir, j’avais besoin de le voir… et bien elle m’a appelé, appelé sur les coups de onze heures… J’étais dans les bras de Vivien, on se caressait, se cajolait… Une étreinte pleine de léchouilles de baisers … et la sonnerie de téléphone indiquant ma Julie…
En général je ne réponds pas.. Le truc de « je suis sur la route », et c’est vrai que sur la route je ne décroche jamais mon téléphone, peu importe qui m’appelle. Julie a une sonnerie dédiée, Highway to hell de AC/DC, ça l’a d’ailleurs fait bien rire quand elle a découvert ça, elle a eu la réaction suivante:
« Ah bin sympa !.. Hell’s bells pendant que t’y es…
— Oh tiens oui.. j’y avais pas pensé.. » en rigolant… Elle est fan d’AC/DC… Bref…
Non aujourd’hui j’ai répondu très vite, alors que Vivien m’embrassait la nuque, me caressait la poitrine, préliminaires tendres… voix de Julie:
« T’as essayé de m’appeler sur le fixe ?… je dormais… pas eu le temps de répondre.. J’ai maudit celui qui l’avait réveillé.
— Heu non… ça doit être ton frangin…
— .. Ah bon… y rappellera .. t’es où ?
— À la banque.. déposer le chèque de Camille.. de ma mère…
— Ah ok… on se fait un truc aujourd’hui ?
— Ouais ouais.. j’ai encore deux trois trucs à faire en ville.. réfléchis-y.
— Ok.. à plus… » Et on a raccroché… Je ne m’éternise jamais au téléphone, je n’aime pas ça, et là encore moins. Vivien avait arrêté ses caresses, quand je me suis tourné vers lui, il avait le regard baissé, une moue maussade sur les lèvres, impression qu’il était un peu au bord des larmes là. Il avait compris immédiatement, banque égal rapide, c’était le premier truc qui m’était venu, c’est pour ça que j’avais ajouté les deux trois trucs… une heure, une heure et demi, deux grand maximum… pas plus… Oui je devrai rentrer très vite, après ce coup de téléphone.
Et aujourd’hui, Vivien, quand on a fait l’amour, ça a été, putain… J’en ai le corps qui frissonne encore, je crois qu’il craque… qu’il peut plus… que ça le met en colère, ou que ça le rend triste… Moi aussi ça me rend triste, aujourd’hui sous lui je me suis senti moche, vraiment moche, et c’était la première fois. Alors que je prenais mon pied comme un fou… parce qu’il me démontait le cul en grands mouvements, presque violemment, s’engouffrant en moi sans aucune pitié, remord, en me faisant geindre si fort… en me dévorant de baisers, jouant avec ma bite, la serrant si fort dans son poing. Et moi les cuisses écartées, assez obscène pour tout dire.. agrippé aux avant-bras de mon amant, demandant encore, encore plus… englouti dans ce plaisir. Dans cette tension, cette détresse qu’il m’a fait ressentir…
Alors… là franchement je me sens… je sais pas trop… Et je sais pas trop quoi faire non plus…
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